Avec l’arrivée sur le marché d’offres complètes, abouties, et l’avancée de l’interopérabilité, rendue possible notamment par la migration des solutions vers l’IP, le bâtiment poursuit sa mue vers le tout connecté. Qu’il s’agisse de garantir un accès à Internet pour les employés ou de préparer le bâtiment à l’arrivée de nombreux services, reposant sur le Cloud, l’objectif est le même : valoriser l’actif immobilier.
Le sujet de la connectivité du bâtiment prend de plus en plus d’importance, notamment pour les propriétaires, les promoteurs ou encore les gestionnaires de patrimoine. Un bâtiment déjà équipé ou prêt à l’être se louera ou se vendra plus rapidement et à un prix plus élevé. Car la connectivité est aujourd’hui un argument de poids : les utilisateurs finaux, désormais habitués aux services et au tout connecté, souhaitent de plus en plus voir arriver ces technologies, jusque-là domestiques, sur leur lieu de travail.
Une connectivité à différents niveaux selon les usages
Mais pour l’avènement des bâtiments réellement intelligents, la connectivité est un enjeu essentiel, qui repose sur différentes technologies, autant pour la connectivité directe que pour la redondance de l’installation. Car cette notion de redondance, essentielle au monde du Cloud et du numérique, l’est d’autant plus pour le bâtiment. Si la connexion en mode standard est perdue, il faut un moyen rapide pour prendre la relève et continuer à assurer l’ensemble des services proposés. Cette notion de connectivité se joue donc à différents niveaux et peut faire appel à différentes technologies.
L’importance de l’infrastructure filaire
L’infrastructure filaire, d’abord, la plus connue et la plus importante, permet de faire circuler les informations dans le bâtiment. Le câblage horizontal, premier maillon de la chaîne, relie le bâtiment au réseau Internet grâce à la fibre optique. Le câblage vertical, relié au câblage horizontal, permet de faire monter la connectivité aux différents étages du bâtiment par l’intermédiaire de câble fibre, mais le plus souvent à l’aide de paires torsadées. Ce câblage vertical distribue la connectivité aux sous-répartiteurs d’étage, qui les acheminent ensuite sur toute la surface de l’étage. Serge Le Men, vice-président Building de la Smart Building Alliance for Smart Cities, l’explique : « L’un des postulats essentiels de la SBA est de considérer le réseau Smart Ethernet IP comme quatrième fluide du bâtiment, au même titre que l’eau, le gaz ou l’électricité. »
Sans oublier la redondance et l’infrastructure sans fil
Sur cette infrastructure filaire, un premier niveau de redondance est mis en place. Tout d’abord, on ne compte non plus une, mais deux entrées télécoms dans l’immeuble, mais également deux colonnes montantes, qui constituent une autre redondance au niveau du câblage vertical. Des infrastructures sans fil, comme un réseau mobile et un réseau Wi-Fi, sont conseillées pour augmenter le niveau de sécurité. Enfin, un réseau hertzien peut venir compléter l’installation, permettant une redondance supplémentaire en cas de panne du réseau fibre.
Des architectures réseau enrichies
L’infrastructure du bâtiment est constituée de câbles et l’objectif est de transmettre et d’organiser les données générées par les divers équipements. Le réseau, qui constitue l’élément actif, est constitué de routeurs, de switches managés et de produits supplémentaires en fonction de la redondance de l’installation.
Selon Serge Le Men, « le socle API, constitué d’équipements et d’interfaces, est central dans cette installation, et ces éléments doivent assurer l’ouverture de l’ensemble, tout en admettant un haut degré d’interopérabilité des équipements ». Enfin, l’ajout d’une brique supplémentaire intégrant les Web Services est possible, mais pour cela, il faut qu’un opérateur de services puisse s’interfacer avec l’installation.
Garantir l’accès à Internet et/ou la connectivité des équipements
Selon la volonté des propriétaires, des promoteurs ou des gestionnaires de bâtiments tertiaires, différents degrés d’accès Web peuvent être prévus. Dans un premier temps, un accès à Internet et au réseau mobile fiable et sécurisé, pour garantir de bonnes conditions de travail aux employés, mais surtout une meilleure performance. Dans un second temps, ce même accès à Internet mais enrichi par l’apport d’une multitude de services et d’informations.
Zoom sur le label R2S
Pour mesurer la maturité du bâtiment en termes d’intelligence et d’ouverture, le label Ready2Services (R2S), mis au point par la Smart Building Alliance for Smart Cities (SBA) et commercialisé par Certivéa, fixe un référentiel précis, avec différents niveaux selon l’infrastructure des bâtiments. « Le label R2S prend en compte la connectivité, autrement dit la garantie d’une connexion Internet fiable, mais aussi la communication, qui implique un dialogue permanent entre les différents équipements. À ces deux briques essentielles au bon fonctionnement de l’infrastructure, nous ajoutons l’interopérabilité, ou le fait pour différents équipements de parler un langage commun », explique Serge Le Men.
Le label R2S repose sur le comptage et le sous-comptage, qui permettent de récupérer les données énergétiques et de les mettre à disposition. Il s’agit d’ailleurs du seul service obligatoire prévu par le label. Les trois étapes essentielles du R2S sont la connectivité, la communication entre les équipements et l’ajout d’une plateforme multiservices.
Le label R2S repose sur deux socles de gouvernance : la sécurité numérique et le management responsable, comme nous l’explique Serge Le Men : « Nous demandons un cadre de confiance pour l’accès aux ressources numériques et la protection des données du bâtiment incluant le respect de la réglementation générale pour la protection des données (RGPD), mais également le pilotage fin du projet en continu pour garantir les résultats en conformité avec les objectifs. »
Zoom sur le label WiredScore
Si un propriétaire d’immeuble souhaite rendre son bâtiment compatible avec les usages actuels des occupants d’un bâtiment et non pas avec les services qui arriveront dans le futur, le label WiredScore permet de mesurer le degré de connectivité effectif. Selon Frédéric Motta, directeur général de WiredScore, « l’ambition du label est de développer la connectivité du bâtiment tout en étant un outil de transparence, permettant d’orienter les comportements des acheteurs grâce à la mise en valeur des caractéristiques essentielles pour le client final ». Et de poursuivre : « Pour choisir leurs locaux, les entreprises ont besoin de savoir si l’immeuble qu’ils choisissent dispose d’une bonne connectivité, autant au niveau d’Internet que des réseaux télécoms, des réseaux intersites ou des réseaux mobiles. Avant la création de WiredScore, ces locataires ne disposaient d’aucune information. »
Cette startup américaine s’est donc fixé comme objectif de déterminer le besoin en numérique pour les activités de l’entreprise et la bonne connectivité de l’immeuble, puis d’attribuer une appréciation en fonction. « La valeur mise en avant est donc celle pour la connectivité des utilisateurs, par le biais de trois axes que sont la facilité d’utilisation, la diversité médias et la résilience de l’installation », poursuit l’expert. « Le premier objectif de la connectivité est celui du travail au quotidien, le second, celui du Smart Building. Nous considérons que ce domaine n’est pas assez mûr aujourd’hui et nous nous concentrons donc sur le premier objectif », conclut Frédéric Motta.
Deux labels complémentaires
ARP Astrance, société de conseil en immobilier, aménagement d’espaces et bâtiment durable accompagne ses clients dans leurs démarches de labellisation, comme nous l’explique Camille Tafani, responsable d’activité Smart Building au sein d’ARP-Astrance : « L’activité de conseil d’ARP-Astrance développe depuis plus de 3 ans une offre visant à l’intégration des nouveaux enjeux liés à la digitalisation des actifs immobiliers. Sa vision couvre les aspects techniques, d’usages et de services sur les échelles du quartier, du bâtiment et des espaces intérieurs. Cet accompagnement va de la définition de stratégies digitales à l’obtention de certifications en passant par la sélection de services numériques pour les utilisateurs, sur des projets en construction, rénovation ou exploitation. » ARP-Astrance, très connecté à l’écosystème digital, a participé au développement de ces deux labels : « ARP-Astrance a aidé l’organisme WiredScore à transposer certaines exigences américaines vers la grille française et est dans un process d’amélioration continue du référentiel avec les équipes WiredScore. Côté R2S, ARP-Astrance a eu la chance d’accompagner 3 des 12 projets pilotes, a contribué à la mise sur le marché de la première version du référentiel et se trouve être un membre actif de la SBA. », explique Camille Tafani.
La labellisation WiredScore s’adresse exclusivement à des bâtiments de bureaux et la plupart des immeubles labellisés se concentrent dans les grandes villes, notamment dans les principaux quartiers d’affaires. « Pour le moment, la majorité des bâtiments labellisés WiredScore sont des projets emblématiques, comme des immeubles de grande hauteur ou des sièges sociaux, dont la surface est supérieure à 10 000 m². Ce label étant déjà présent dans six pays, sa renommée internationale en fait un outil de communication et de commercialisation qui intéresse certains investisseurs », poursuit Camille Tafani.
Le périmètre de labellisation R2S est plus large car il s’adresse à tout type de bâtiment tertiaire : bureaux, commerces, hôtels, enseignement, industrie et logistique. Camille Tafani le confie : « La labellisation R2S étant plus récente, les retours d’expérience sont moins nombreux. Cependant, on remarque que les mêmes tendances se dessinent : les bâtiments concernés sont pour la plupart neufs ou en rénovation, d’une surface supérieure à 10 000 m² et situés dans les principales villes de France. De plus, Certivéa, organisme de certification reconnu en France, propose des synergies entre les labels HQE, OsmoZ et R2S. Aucun doute qu’il n’aura pas de difficultés à pénétrer le marché et à s’imposer comme un standard, notamment pour les bâtiments neufs ou en rénovation. »
ARP-Astrance intervient auprès de l’équipe projet dès la conception, afin de définir un profil de certification cohérent et pertinent. Le profil a pour objectif d’atteindre un niveau élevé de certification, mais également d’apporter une vraie plus-value pour le projet. « Les certifications “à points” entraînent souvent la mise en place de prescriptions techniques décousues sans forcément de vision d’ensemble. Par exemple, il peut parfois être nécessaire d’aller légèrement au-delà des demandes de la certification ou d’y répondre de manière détournée afin d’apporter une vraie valeur au projet définitif. En un mot, nous sommes garants de l’atteinte des objectifs de certification mais également force de proposition sur les choix technico-économiques réalisés afin de garantir la qualité du projet », conclut l’experte.
Ce rôle est notamment facilité par une connaissance technique des problématiques systèmes et réseau mais également par des relations fortes avec les labélisateurs : WiredScore et Certivéa. ARP-Astrance vérifie ensuite la bonne intégration des prescriptions lors des travaux et réalise les audits de fin de conception et de réalisation afin d’obtenir les certificats attendus.
L’importance d’anticiper les réglementations et évolutions à venir
ARP-Astrance participe donc à l’évolution des deux labels R2S et WiredScore. Un point clé tellement cette question du bâtiment intelligent évolue rapidement. La recherche de connectivité dans les bâtiments n’en est qu’à ses débuts et l’augmentation constante du besoin des usagers impose une évolution des réponses techniques à apporter dans l’immobilier.
Première évolution de taille, l’arrivée de la 5G, prévue pour 2020, doit déjà être intégrée aux projets en cours de conception pour assurer la livraison de bâtiments techniquement « à jour ». Ensuite, les aspects liés à l’arrivée massive des objets connectés dans le bâtiment doivent être pris en compte dès aujourd’hui, afin de pouvoir traiter les volumes de données et d’assurer les importants besoins en bande passante. L’arrivée de ces objets connectés va rapidement rendre incontournables le Big Data et l’intelligence artificielle, permettant de traiter automatiquement toutes les données générées. Enfin, l’intégration du bâtiment au quartier et à la ville constitue également une évolution de taille à prévoir : le bâtiment doit pouvoir se connecter au monde extérieur, avoir un accès au Cloud pour le stockage et le traitement des données issues des objets connectés.
Autant d’enjeux à anticiper pour les projets en cours de développement, pour garantir aux propriétaires, aux promoteurs et aux locataires de disposer d’un bâtiment à jour techniquement et performant. Un levier qui permet d’augmenter la valeur d’usage du bâtiment et par là même son prix de vente ou de location.
Alexandre Arène