Après la pollution sonore et lumineuse, voici la pollution électromagnétique. Elle se forme lorsque les champs électriques et magnétiques de deux systèmes électriques se rencontrent et réagissent l’un avec l’autre. Les conséquences peuvent être aussi bien matérielles qu’humaines. La compatibilité électromagnétique de tout système électrique doit donc être testée pour éviter toute nuisance.
Pour comprendre le principe de la compatibilité électromagnétique, il faut d’abord savoir que tout objet électrique ou électronique produit autour de lui un champ électromagnétique qui lui est propre. D’autre part, il existe des champs électromagnétiques naturellement présents sur Terre (champ magnétique terrestre, foudre…), qui entrent eux-aussi en ligne de compte. On parle donc de compatibilité électromagnétique (CEM) lorsqu’un appareil ou un système électrique fonctionne normalement dans son environnement électromagnétique, sans perturber lui-même de manière trop importante le champ électromagnétique qui l’entoure. Pour cela, la CEM doit être testée. Il faut d’une part, limiter le niveau des émissions non désirées de l’appareil et d’autre part, s’assurer que cet appareil est immunisé contre les perturbations venues des équipements voisins (susceptibilité). Il s’agit donc en testant la CEM de lutter contre une pollution environnementale, tout en optimisant le fonctionnement des systèmes électriques.
Portables : attention, danger
C’est à cause de l’incompatibilité électromagnétique qu’il est strictement interdit d’utiliser son portable dans un avion. Le champ électromagnétique créé par l’onde du téléphone, réagit avec le champ électromagnétique des appareils de contrôle et peut causer des dysfonctionnements graves. Autre exemple, il est très difficile voire dangereux de faire fonctionner certains appareils électriques ou électroniques pendant un orage. Plus généralement, la compatibilité entre un émetteur (foudre) et un récepteur (système électrique) localisés à proximité l’un de l’autre pose problème, car ils tendent constamment à réagir l’un avec l’autre. Les interactions électromagnétiques n’ont lieu que lorsqu’il y a, en plus de l’émission et de la susceptibilité, couplage entre les deux systèmes électriques. Ce couplage se fait soit par rayonnement, par le biais de champs électromagnétiques, soit par conduction lorsque les systèmes sont en contact avec un conducteur (fil électrique, tuyau de climatisation…).
Risque foudre : mieux vaut prévenir que guérir
Comme tout type de décharge électrostatique, la foudre constitue un risque pour les systèmes électriques. Lorsqu’un cumulo-nimbus chargé en électricité se décharge sur le sol et génère un foudroiement, le champ magnétique produit est colossal. Il faut donc équiper le système d’une protection contre la foudre, car elle peut soit altérer son utilisation, soit le mettre hors d’usage. Tout objet placé dans une zone à risque doit donc pouvoir résister à un tel champ magnétique, sans subir la moindre altération. Pour cela, il doit être testé pour des champs magnétiques équivalant à celui de la foudre.
Tester la CEM : plutôt deux fois qu’une
Tester la compatibilité électromagnétique est obligatoire pour tout objet électrique ou électronique. Cela permet de savoir dans quelle mesure un appareil peut être utilisé dans un environnement électromagnétique donné. Pour cela, il est possible de mettre deux méthodes à contribution, conjointement. La première méthode permet d’obtenir un résultat théorique : pour cela, il faut effectuer une simulation numérique. L’objectif est de modéliser le système électrique à vérifier ainsi que l’environnement dans lequel il sera placé en ajoutant un algorithme censé reproduire les interactions (émissions, susceptibilité et couplage entre les appareils). Cette méthode permet d’obtenir des résultats théoriques. Pour plus de précision, une simulation analogique est ensuite effectuée. L’objet étudié est placé dans un environnement électromagnétique de référence et son fonctionnement est observé. Des mesures sont alors réalisées et permettent d’établir, en cas de perturbations, une protection adéquate.
Protéger les systèmes : une sécurité de base
Pour rendre un système électrique compatible électromagnétiquement, des protections lui sont ajoutées afin de réduire sa susceptibilité, d’une part, mais aussi pour garder ses émissions au niveau le plus bas possible. On lui installe donc un blindage, qui se matérialise obligatoirement par un matériau conducteur. Soit il absorbe le champ magnétique, soit il le réfléchit. Pour une protection contre la foudre par exemple, un parafoudre permet d’encaisser l’énergie libérée par l’éclair. Dans le cas contraire, la foudre détruirait l’appareil à cause de l’augmentation fulgurante de son potentiel électrique.
Variateur de vitesse : une composante à surveiller de près
Pour permettre un meilleur contrôle et un meilleur rendement à une installation motorisée, il est possible d’y intégrer un variateur de vitesse. Ce dernier a pour objectif de fournir au moteur une onde de tension à amplitude et fréquence variables, en maintenant le rapport entre la tension et la fréquence sensiblement constant. Cela permet de commander la vitesse du rotor du moteur par la commande de la fréquence du courant au stator (partie du moteur dans laquelle tourne le rotor). Seulement, ce type d’équipement est très perturbateur, et souffre souvent d’une installation inadaptée. L’arrivée du variateur doit être filtrée, et l’installation d’un blindage entre le moteur et le variateur est nécessaire pour éviter d’éventuelles interactions. Si le raccord n’est pas correctement effectué, ce qui est souvent le cas, les équipements se perturbent mutuellement et cessent tout simplement de fonctionner.
Les normes CEM
Depuis le 1er janvier 1996, la compatibilité électromagnétique doit obligatoirement être testée pour tout objet électrique ou électronique et répond aux directives européennes CEM (directive 89/336/CEE). Mais depuis 2007, elle laisse la place à la directive 2004/108/CE dont un guide d’application a été publié par l’Union européenne. Seuls certains systèmes n’entrent pas dans le champ de la directive : les terminaux de communication et radios (directive 1999/5/CE), les équipements électromédicaux (directives 1993/42/CEE et 1990/385/CEE) et les équipements automobiles et aéronautiques (qui répondent à une réglementation spécifique).
Il est donc essentiel de tester la CEM pour éviter toute pollution et s’assurer du bon fonctionnement des systèmes. Un seul problème est observé : certaines normes produits n’ont pas évolué depuis une dizaine d’années, alors que l’environnement a connu de nombreux changements et accueilli de nouveaux arrivants, comme le Wi-Fi ou la 3G et la 4G, qui ont modifié de manière considérable le champ électromagnétique global.
Alexandre Arène