L’électrification croissante de nos usages et la multiplication des équipements électroniques sensibles placent aujourd’hui la protection contre la foudre au cœur des préoccupations des professionnels de l’électricité. Cette problématique est particulièrement critique dans le domaine de l’éclairage, où la transition massive vers la technologie LED a créé de nouveaux défis en matière de protection.
Les installations d’éclairage modernes, notamment à l’extérieur, combinent plusieurs facteurs de vulnérabilité, qui nécessitent de mettre en œuvre une protection foudre adaptée : leur exposition aux intempéries, la sensibilité accrue des composants électroniques, et l’interconnexion des systèmes via d’importantes longueurs de câbles. Cette situation est d’autant plus préoccupante que ces équipements représentent des investissements conséquents pour les collectivités et les entreprises.
La technologie LED, malgré ses nombreux avantages en termes d’efficacité énergétique et de durée de vie, présente une sensibilité extrême aux surtensions transitoires, qu’elles soient créées par la foudre ou par les opérations de commutation sur le réseau électrique. Face à ces enjeux, la mise en place de solutions de protection adaptées devient une nécessité, non seulement pour garantir la continuité de service, mais aussi pour pérenniser les investissements réalisés.
Protection foudre et éclairage : sécuriser les installations modernes
L’électrification croissante des usages et la nécessité d’améliorer la performance énergétique des équipements constituent aujourd’hui deux enjeux. Cette problématique est particulièrement critique dans le domaine de l’éclairage, où la transition massive vers la technologie LED crée de nouveaux défis en matière de protection.
« Le coût de l’énergie a fortement incité les exploitants des infrastructures urbaines et routières à adopter cette technologie plus efficiente mais aussi beaucoup plus fragile », précise Olivier Pellissier, Product Manager System Protection Technologies & Power Supplies chez Phoenix Contact.
Les systèmes d’éclairage contemporains présentent en effet une triple vulnérabilité face aux impacts de la foudre : leur exposition extérieure, la fragilité intrinsèque de leurs composants électroniques, et l’interconnexion par de longs réseaux de câbles qui agissent comme autant de conducteurs potentiels.
L’éclairage architectural présente également des défis particuliers en matière de protection contre la foudre. Dans le cas des monuments historiques comme les cathédrales, l’installation requiert souvent des milliers de points lumineux, mais les contraintes de préservation du patrimoine interdisent tout percement des structures. Cette configuration spécifique crée une situation à risque, notamment en raison de la proximité des différents réseaux électriques. Régis Reeb, responsable technique et marketing chez Dehn, souligne cette problématique : « Dans ces installations, tous les câbles basse tension croisent les conducteurs de paratonnerres, ce qui peut provoquer un amorçage et détruire les luminaires. » La mise en place de parafoudres adaptés devient alors une nécessité pour protéger ces installations complexes et coûteuses.
Si les LED représentent une avancée majeure en matière de performance énergétique et de longévité, elles se révèlent particulièrement vulnérables aux variations brusques de tension. Ces perturbations, qu’elles soient d’origine atmosphérique ou liées aux manœuvres sur le réseau électrique, peuvent avoir des conséquences désastreuses. Les statistiques sont révélatrices : environ un dixième des installations LED ont connu des dysfonctionnements dus aux surtensions peu après leur mise en service.
Le phénomène foudre et ses impacts
La foudre représente l’une des manifestations naturelles les plus destructrices pour les installations électriques. Ce phénomène, dont la puissance peut atteindre plusieurs centaines de milliers d’ampères, mérite une attention particulière dans le contexte des installations d’éclairage modernes.
Le phénomène de foudroiement se caractérise par une décharge électrique de forte intensité entre un nuage et le sol. Cette décharge peut emprunter différents chemins, créant des effets directs et indirects sur les installations électriques. Les surtensions transitoires générées peuvent se propager sur plusieurs centaines de mètres à travers les réseaux électriques et de communication.
L’impact direct de la foudre sur une installation reste relativement rare mais ses conséquences sont souvent catastrophiques. Plus fréquents, les effets indirects se manifestent par des surtensions transitoires qui se propagent à travers les réseaux. Ces surtensions peuvent atteindre plusieurs milliers de volts et endommager les équipements électroniques sensibles, même à distance du point d’impact.
Les installations d’éclairage LED présentent une sensibilité accrue aux perturbations électriques. Comme l’explique Christian Macanda, de l’Association Protection Foudre : « Avant, les installations d’éclairage extérieur étaient équipées de lampes à décharge. Ces sources étaient très robustes et il fallait des tensions dépassant les 4 à 6 kV impulsionnels pour les endommager. Aujourd’hui, les LED sont des semi-conducteurs très sensibles et leurs alimentations électroniques peuvent être détruites avec des surtensions d’amplitude nettement plus réduite, autour de 1,5 kV impulsionnel. »
La protection contre la foudre s’organise selon le concept des zones de protection foudre (LPZ, Lightning Protection Zone). Ce système définit différents niveaux de protection selon l’exposition des équipements :
– Zone LPZ 0 : zone extérieure exposée aux coups de foudre directs
– Zone LPZ 1 : zone protégée des coups de foudre directs mais exposée aux effets indirects
– Zone LPZ 2 : zone intérieure où les perturbations sont atténuées
Cette compréhension des mécanismes de la foudre et de ses impacts est essentielle pour mettre en place une protection adaptée des installations d’éclairage modernes.
Le cadre normatif et réglementaire
La protection contre la foudre des installations d’éclairage est encadrée par un ensemble de normes et réglementations qui définissent précisément les exigences en matière de sécurité électrique. Ce cadre normatif a évolué pour s’adapter aux nouvelles technologies et aux retours d’expérience du terrain.
La norme NF C 17-200, publiée initialement en 2007 puis mise à jour en 2016, constitue le texte de référence pour les installations d’éclairage extérieur. Elle impose notamment l’obligation de réaliser une analyse de risque pour déterminer les besoins en protection contre les surtensions. Cette analyse prend en compte plusieurs facteurs comme la densité de foudroiement, la longueur des câbles et la sensibilité des équipements.
La norme NF C 15-100, devenue la référence, connaît, elle, régulièrement des mises à jour. Une nouvelle version est actuellement en phase finale de validation. Régis Reeb, de Dehn, explique : « La nouvelle version imposera à tous les bâtiments tertiaires, industriels, patrimoniaux, ERP, ou aux systèmes d’alarme, d’incendie ou de vidéosurveillance de mettre en œuvre un parafoudre si une évaluation du risque n’a pas été réalisée. »
Pour les installations spécifiques, plusieurs guides UTE viennent compléter le dispositif normatif. Par exemple, le guide UTE C 15-712 traite spécifiquement des installations photovoltaïques, définissant les protections à mettre en place tant du côté AC que DC.
Solutions techniques de protection
La protection contre la foudre des installations d’éclairage modernes nécessite des solutions techniques adaptées aux spécificités de chaque configuration. Les fabricants ont développé des gammes complètes de parafoudres répondant aux différentes exigences normatives et aux contraintes d’installation.
Les solutions pour lanternes doivent répondre à des contraintes d’encombrement particulières. Le modèle MLPC1-230L-V/DL de Citel est particulièrement intéressant, car il protège les éclairages de rue connectés. Il s’agit d’un parafoudre MSPD (parafoudre multifonction assurant la protection de plusieurs réseaux), qui assure la protection du réseau AC ainsi que du réseau de transmission de données. De par sa taille très compacte, il s’installe dans la tête du luminaire. Une version spécifique du produit est également disponible pour optimiser la coordination avec le driver : MLPCH1-230L-V/DL. Ces deux produits sont dédiés à la protection des luminaires de Class I, mais d’autres versions sont disponibles pour les luminaires de Class II : MLPC2 -230L-V/DL et MLPCH2-230L-V/DL.
Pour la protection en pied de mât, les fabricants proposent des solutions spécifiques comme la gamme DSLP de Citel, conçue pour un montage en logette. Ces parafoudres se caractérisent par leur faible encombrement et leur montage sur rail DIN. La version DLPM intègre une indication de fin de vie mécanique particulièrement utile pour la maintenance.
Les armoires de commande nécessitent également une protection renforcée. Les parafoudres de Type 2 comme le DAC40C-11 offrent une protection efficace avec un courant de décharge nominal de 20 kA et un courant maximal de 40 kA. Ces modèles intègrent généralement une télésignalisation permettant le report d’information vers la supervision.
L’intelligence croissante des systèmes d’éclairage nécessite également la protection des lignes de communication. Des solutions spécifiques existent d’ailleurs pour les protocoles DALI, RS485 ou 0-10V. La gamme DLA de Citel, par exemple, assure la protection des réseaux de communication avec un courant de décharge maximal de 20 kA.
Les fabricants continuent d’innover pour améliorer l’efficacité des protections. Les nouvelles générations de parafoudres intègrent des technologies comme la CTC brevetée par Citel, qui permet une déconnexion plus rapide et plus sûre en cas d’échauffement interne.
Maintenance et suivi des installations
La maintenance des systèmes de protection contre la foudre est un élément crucial pour garantir leur efficacité dans le temps. Une approche structurée et régulière est nécessaire pour assurer la pérennité des installations.
La fréquence des inspections dépend du niveau de protection requis et du type d’installation. Pour les niveaux de protection I et II, un contrôle annuel est nécessaire, tandis que pour les niveaux III et IV, une inspection tous les deux ans est suffisante. Les installations comportant des risques d’explosion nécessitent quant à elles une inspection visuelle semestrielle.
Les parafoudres modernes intègrent des systèmes de surveillance permettant de connaître leur état de fonctionnement. Christian Macanda confie : « Si le déconnecteur interne du parafoudre est activé, le parafoudre se déconnecte du réseau et un indicateur de défaut est actionné. Dans ce cas, le réseau n’est plus protégé et il faudra remplacer le parafoudre. »
Les fabricants proposent désormais des solutions avancées de surveillance à distance. Les parafoudres peuvent être équipés de contacts de télésignalisation permettant le report d’information vers la GTC (gestion technique centralisée) ou la supervision. Cette fonctionnalité est particulièrement utile pour les installations difficiles d’accès ou dispersées géographiquement.
L’ensemble des parafoudres BT (basse tension) Dehn de Type 1 et de Type 2 sont pourvus d’un voyant de signalisation en façade du parafoudre. « En option, nous proposons une liaison en contact sec, qui permet de faire remonter les informations de fonctionnement sur une GTC ou une GTB. Nous proposons une passerelle pour faire remonter les informations sur l’état des parafoudres en Modbus », précise Régis Reeb. Aurore Alric, cheffe de produit du groupe Citel, précise également que tous les produits Citel sont disponibles avec ou sans télésignalisation.
Les nouvelles générations de parafoudres intègrent des compteurs de surtensions qui permettent d’anticiper les opérations de maintenance. Ces dispositifs comptabilisent le nombre d’agressions subies, permettant ainsi d’estimer la durée de vie restante du parafoudre selon les données fournies par le fabricant.
Dehn a fait évoluer ses solutions en liaisons de communication, comme nous l’explique Régis Reeb : « Les parafoudres pour connexion Ethernet sont pourvus de voyants et d’un système de surveillance. Un laser traverse les trous des parafoudres. Lorsque le parafoudre est hors service, le trou est obstrué, ce qui coupe le faisceau du laser et fait remonter l’information de la fin de vie du parafoudre. » Le fabricant a également fait évoluer le système de câblage de certains de ses parafoudres basse tension en remplaçant les bornes à vis par des bornes à connexion rapide, de façon à simplifier le câblage et faire gagner du temps aux installateurs.
Toute intervention de maintenance nécessite l’établissement d’un rapport détaillé et rigoureux. Ce document technique doit présenter une évaluation complète de l’état général des composants du système de protection, accompagnée des relevés précis des mesures de continuité et de résistance effectuées. Il est également impératif d’y consigner l’état des parafoudres en mentionnant particulièrement leurs indicateurs de fin de vie. Le rapport se conclut par un descriptif exhaustif des actions correctives entreprises lors de l’intervention. Cette documentation technique constitue un élément essentiel pour le suivi dans le temps et peut être exigée par les assureurs ou lors d’audits réglementaires.
La protection contre la foudre des installations d’éclairage modernes représente un enjeu majeur pour les professionnels de l’électricité. Face à la multiplication des technologies LED et des systèmes connectés, la mise en place de solutions de protection adaptées devient incontournable.
L’évolution des normes, notamment avec la nouvelle version de la NF C 15-100, témoigne de cette prise de conscience collective. Les fabricants ont développé des solutions innovantes, comme la technologie CTC de Citel, qui permet une déconnexion plus rapide et plus sûre en cas d’échauffement interne.
Les retours d’expérience montrent que l’investissement dans des dispositifs de protection est largement rentabilisé par rapport au coût potentiel des défaillances. La destruction d’équipements LED ou la perte de service peuvent même avoir des conséquences financières importantes, sans compter l’impact sur la sécurité des usagers.
Les fabricants proposent aujourd’hui une gamme complète de solutions adaptées à chaque point stratégique de l’installation. La protection s’échelonne ainsi de manière cohérente, depuis les armoires de commande qui constituent le point névralgique du réseau, jusqu’aux pieds de mât qui assurent une protection intermédiaire. Au plus près des équipements, des dispositifs spécifiques protègent directement les luminaires. Cette approche globale se complète par une protection dédiée aux réseaux de données, éléments devenus incontournables avec l’essor des systèmes d’éclairage connectés.
L’avenir s’oriente vers des solutions toujours plus intégrées, combinant protection contre les surtensions et surveillance de l’état de fonctionnement. Les systèmes de télésignalisation et de comptage des surtensions permettent désormais une maintenance préventive efficace, garantissant ainsi la pérennité des installations.
La protection foudre n’est plus une option mais une nécessité, partie intégrante de la conception des installations d’éclairage modernes. Elle constitue un investissement raisonné pour garantir la continuité de service et la durabilité des équipements.
Cédric Locqueneux