Dans une démarche de sobriété énergétique, l’Assemblée nationale a procédé à la rénovation de la façade du palais Bourbon afin de réduire les consommations et de bénéficier d’un éclairage dynamique adapté aux besoins.
Le palais Bourbon, situé sur le quai d’Orsay dans le 7e arrondissement de Paris, en face du pont de la Concorde et de la place du même nom, abrite depuis 1879 l’Assemblée nationale française. Le bâtiment fut édifié de 1722 à 1728, quatre architectes se succédèrent : Giardini, Pierre Cailleteau dit « Lassurance », tous deux prématurément décédés, puis Jean Aubert et Jacques V Gabriel V qui termina les travaux en 1728. Le palais rappelait par son style le Grand Trianon et fut considéré au XVIIIe siècle comme le plus grand ornement de la ville après les maisons royales.
Le fronton actuel représente la France, drapée à l’antique, debout devant son trône, accompagnée de la Force et de la Justice, appelant l’élite à la confection des lois, œuvre de Jean-Pierre Cortot. Les quatre statues au pied de l’escalier sont celles de quatre grands commis de l’État symbolisant les fonctions du législateur et l’organisation de l’administration : Maximilien de Sully (le réformateur) par Pierre Nicolas Beauvallet, Jean-Baptiste Colbert (l’organisateur de l’économie) par Jacques-Edme Dumont, Henri François d’Aguesseau (l’unificateur du droit et de la jurisprudence) par Jean-Joseph Foucou et Michel de L’Hospital (le conciliateur) par Louis Pierre Deseine. La symbolique du fronton est également héritée de la mythologie gréco-romaine : l’escalier est flanqué de part et d’autre de deux statues, une d’Athéna (déesse de la sagesse associée à la démocratie athénienne) par Philippe-Laurent Roland et pris sur le modèle de la Giustiniani Minerva du temple de Minerve Medica conservée au musée du Vatican, et une de Thémis (titanide symbolisant la justice, portant dans sa main gauche une balance) par Jean-Antoine Houdon. Deux bas-reliefs ornent chaque côté de la façade, commandés en 1837, et représentent, à droite, Prométhée animant les Arts (architecture, sculpture, peinture, musique et poésie) par François Rude et à gauche l’Instruction publique (Minerve ou Athéna enseignant l’alphabet à de jeunes enfants, entourée des neuf muses et des représentants de l’enseignement religieux) par James Pradier.
Une lumière qui adoucit la façade
L’Assemblée nationale a lancé un appel d’offres pour refaire la mise en lumière de la façade du palais Bourbon qui ne répondait plus aux besoins actuels du maître d’ouvrage ni aux critères d’économie de consommation. Camila Le Bertre, conceptrice lumière, NoctaBene, explique : « L’idée était de proposer un concept d’éclairage pérenne et modulable qui puisse s’adapter à différents événements et notamment, reproduire le drapeau tricolore. Nous souhaitions trancher avec le vidéomapping existant et créer un éclairage plus élégant, plus sobre et davantage en accord avec l’architecture. L’équipe projet était composée de deux ingénieurs et deux architectes. Gabrielle Boulanger n’étant pas restée jusqu’à la fin du projet, les travaux ont été suivis uniquement par Marie Danièle Pessard. Tout le projet a été conçu à l’aide de projecteurs LEC, une gamme de matériels assez large qui nous a permis de faire tout ce qu’on voulait. » Ainsi, les concepteurs lumière ont positionné les luminaires entre les colonnes pour retrouver cette élévation majestueuse et reformer les volumes de toute la façade. « Nous avons placé les projecteurs devant l’emmarchement et derrière les statues d’Athéna et de Thémis, poursuit Camila Le Bertre, afin de créer un voile lumineux pour atténuer les contre-plongées assez importantes des encastrés de sol et d’adoucir et de réchauffer l’ensemble avec du 2 700 K. Ce qui a permis aussi de révéler les façades latérales que l’on distinguait mal auparavant. »
Sculpter les éléments architecturaux
Les projecteurs à découpe ont été orientés de façon à créer des ombres qui redessinent les personnages du fronton. Les bas-reliefs des façades latérales sont traités avec des projecteurs classiques. « Les encastrés de sol sont équipés de deux plateaux avec angles serrés pour nous permettre de traiter toute la hauteur des colonnes, précise Camila Le Bertre. Les deux plateaux sont en 3 000 K. Derrière les colonnes, des réglettes RGBW offrent la possibilité de créer un éclairage événementiel avec des optiques assez larges. » Les hauts-reliefs du fronton sont soulignés par des projecteurs à gobos, placés derrière les statues des législateurs, qui découpent l’ensemble de personnages pour simuler un éclairage zénithal. Athéna, Thémis et les quatre législateurs sont éclairés selon le même principe : des petits projecteurs sont installés de chaque côté du personnage, en pied des statues, pour leur redonner un peu de présence, « même si elles conservent une partie dans la pénombre, commente Camila Le Bertre, car il était impossible, compte tenu de leurs dimensions, de les mettre complètement en valeur sans risquer de créer des nuisances lumineuses ». Pour le drapeau, les éclairagistes ont fait appel à des projecteurs à angle serré dans un blanc froid de 4 000 K.
Un éclairage événementiel
Soliled, Eiffage et NoctaBene ont travaillé ensemble pour créer un éclairage événementiel qui comprend 15 scénarios permettant de jouer sur les couleurs et mettre tel ou tel pays à l’honneur. Ainsi, la façade peut, selon l’événement, passer du bleu, blanc, rouge en lumières verticales, par exemple lorsque les députés siègent la nuit, au bleu européen. L’équipe technique permanente de l’Assemblée nationale a toute latitude pour modifier les séquences.♦
Merci pour cet article qui montre bien l’importance de mettre en scène le patrimoine au travers un travail sur l’éclairage. cela participe à l’ambiance urbaine .
Toujours intéressant de montrer le travail de toute une équipe sur notre patrimoine. Merci pour votre commentaire. Isabelle Arnaud, rédactrice en chef