Après avoir travaillé deux ans dans la conversion d’énergie, et plus de 21 ans dans la distribution de composants électroniques, Didier Petit-Brisson quitte l’entreprise où il occupe le poste de responsable France, et crée sa propre société d’éclairage leds, à Bordeaux. Neuf mois après, il recrute deux commerciaux et remporte un marché auprès de l’enseigne McDonald’s pour l’éclairage de leurs boucliers d’angle en bois.
Didier Petit-Brisson a installé les bureaux d’EAS Solutions (pour Énergies Alternatives & Solaires) à Pompignac (33), et également une zone de stockage et une zone d’assemblage où travaillent six personnes.
Quinze ans après sa création, comment EAS Solutions a-t-elle évolué ?
Didier Petit-Brisson – L’entreprise a suivi l’évolution de la led, si l’on peut dire. Nous sommes partis du domaine des commerces, pour passer aux secteurs de l’industrie et du tertiaire. Nous nous sommes focalisés sur les marchés les plus énergivores pour leur apporter des économies, de la fiabilité et des produits adaptés à leur environnement. Il y a une douzaine d’années, nous avons signé des partenariats avec les marques Digital Lumens, Innolumis et, depuis huit ans, Dialight, fabricants de produits qui entrent parfaitement dans l’adéquation de ce que nous recherchons. À la demande de nos clients, nous avons également entrepris la fabrication de projecteurs étanches pour l’extérieur, notamment la gamme Xion, pour laquelle nous avons signé un accord de co-branding avec Osram pour les puces leds. Autre évolution, nous nous sommes aperçus que les tubes leds du marché n’étaient pas cohérents ni performants ; nous avons alors développé des linéaires dans lesquels nous avons intégré un plateau leds. Aujourd’hui, nous ne les fabriquons plus, au même titre que les dalles leds, et faisons appel à un partenaire italien, mais nous choisissons nos leds et nos drivers (de la marque Tridonic principalement) afin d’assurer une durée de vie de 100 000 heures à nos produits.
Quels sont les produits que EAS Solutions fabrique aujourd’hui ?
Didier Petit-Brisson – Nous produisons des luminaires pour l’industrie et le tertiaire en partant de critères de performances, de consommation, de durée de vie, d’environnement et de fonctionnement. Compte tenu de ces critères et aussi du fait que nous fabriquons en France, il va sans dire que nous privilégions la qualité, la réparabilité, la traçabilité et la disponibilité de nos produits et de leurs composants. Bien entendu, cela suppose de travailler en bonne intelligence avec tous nos partenaires et d’être très réactif. Ainsi, peu avant le confinement lié au Covid, nous avons été alertés sur les délais d’approvisionnement, ce qui annonçait un risque de pénurie des composants. Nous avons immédiatement anticipé et passé des commandes de composants stratégiques, de petits semi-conducteurs et de plusieurs millions de leds afin de nous assurer la continuité de notre activité. Nous avons pu ainsi fournir nos clients de l’agroalimentaire qui avaient besoin de ces produits. Nous avons même augmenté notre chiffre d’affaires en 2020 ! Comme nos sous-traitants étaient tous en France, nous avons continué à livrer nos clients. Afin d’être réactifs et innovants, nous développons et fabriquons nos propres mécanique, plasturgie, et cartes électroniques. Nous avons investi plus de 400 000 € en recherche et développement sur deux ans pour être encore plus performants et autonomes.
C’est ainsi que vous avez déployé votre propre système intelligent, le Smart Facility Mist ?
Didier Petit-Brisson – Exactement. Nous tenions à développer notre propre système d’intelligence fonctionnant en radio afin de simplifier toute la mise en place du processus. Il s’agit d’un protocole ouvert qui permet de commander des luminaires en DALI (marché européen), en 0-10 volts (marché américain, principalement), PWM (Pulse Width Modulation : modulation de largeur d’impulsion) et aussi des systèmes en ON/OFF capables de commander des contacteurs de puissance pour éteindre et allumer n’importe quel produit. Associée à cela, une interface cloud permet de se connecter pour paramétrer le système. Aujourd’hui, cette solution est complètement opérationnelle. Plus de 2 000 nœuds de connexion ont été déployés, commandant plus de 4 000 éclairages et capteurs. Notre solution est entièrement évolutive ; elle s’adresse au tertiaire et à l’industrie (à l’intérieur et à l’extérieur). En ajoutant de l’intelligence aux points lumineux qui nous entourent, nous créons un nouveau réseau de communication qui permet de se raccorder par radio à de nombreux capteurs (occupation, température, CO2, humidité…). Ainsi, dans une chambre froide, le capteur mesure la température et envoie une alarme dès que le niveau descend en dessous d’un certain seuil. Ou encore dans une salle de réunion, des capteurs déclenchent l’éclairage et mesurent le taux de CO2, envoyant un signal dès que le niveau dépasse le seuil programmé. Notre système Mist peut répondre à une multitude d’applications en restant autonome sans être connecté au cloud, offrant ainsi une grande souplesse de configuration.
Aujourd’hui, vous affrontez donc le marché en toute sérénité ?
Didier Petit-Brisson – Complètement. Le monde de « l’intelligence » dans l’industrie n’est pas simple : il faut avoir une réelle expertise. En quinze ans, nous avons équipé plus de 1 000 clients et permis d’économiser 138 millions de kilowattheures et 48 680 tonnes de CO2. Nous apportons une économie d’énergie allant de 80 à 95 % suivant les applications, un éclairage de qualité et un accompagnement clé en main. Nous allons même jusqu’à fabriquer des modules sur mesure afin de permettre à nos clients de conserver leurs structures existantes, tout en faisant évoluer leur éclairage. Comme nos aides viennent de la région Nouvelle-Aquitaine, nous faisons appel à des partenaires qui fabriquent dans notre région, ou en France, car il est normal que l’argent de la collectivité serve à faire travailler des acteurs régionaux. Notre chiffre d’affaires, de 3 millions d’euros, ne cesse de croître, et nous réfléchissons à faire entrer de nouveaux partenaires et actionnaires. Aujourd’hui, les professionnels tiennent compte des décrets tertiaire et BACS, mais la rénovation de l’éclairage est souvent délaissée au profit d’autres investissements, alors qu’un éclairage intelligent de qualité diminue la fatigue au travail, réduit drastiquement la consommation d’énergie, et fait partie d’une politique RSE. L’éclairage est un point essentiel de notre bien-être et un levier non négligeable d’amélioration du BFR (besoin en fonds de roulement).
Comment voyez-vous l’éclairage de demain ?
Didier Petit-Brisson – L’éclairage suit l’évolution des comportements de la société. À savoir, l’usage plutôt que la possession. Notre offre locative d’éclairage sur 5 ans, avec un coût de location du matériel d’éclairage inférieur à celui de l’économie d’énergie réalisée, va dans ce sens. La location préserve les ressources financières, les liquidités et l’équilibre du bilan de l’entreprise. Au terme des 5 ans du contrat, la société peut racheter à EAS Solutions l’installation. L’innovation fait partie de notre ADN. Nous développons une offre à tiroirs, avec des sous-ensembles de produits que nous assemblons et installons en France, mais aussi en Suisse, en Belgique, au Portugal. EAS Solutions continue à investir dans la recherche pour apporter toujours plus d’intelligence et d’efficacité énergétique à ses produits.
Propos recueillis par Isabelle Arnaud