La Ville de Yerres s’est portée acquéreur du parc Budé lorsque le propriétaire a mis en vente en même temps le parc et le château. N’étant pas en mesure de racheter ce dernier, mais ne souhaitant pas perdre ce patrimoine, la municipalité a cherché un acquéreur privé qui s’est engagé à financer des travaux de restauration. Le groupement, composé de spécialistes des sites classés, avec notamment le cabinet d’architecte Claude Vermeulin, les concepteurs lumière Valérie Lenain et Jean-Pierre Maquair, de l’agence De Cour à Jardin, et les paysagistes Élise et Martin Hennebicque, a restauré le parc dans l’esprit du début du XIXe siècle.
« Au-delà de l’espace paysager pour partie en zone inondable, explique Jean-Pierre Maquair, les nouveaux aménagements concernent la rénovation complète des remparts et de sa tour de guet, l’embellissement du mur d’enceinte et la sécurisation de la grotte monumentale. Cette dernière est la surprise de tout visiteur, qu’il soit professionnel ou touriste. À l’origine, la végétation et les éboulis dissimulaient la superposition de ses blocs de calcaires et de son large volume. À l’avenir, son intérieur pourra être visité en de rares occasions. Les innovations reposent sur la création d’un belvédère en surplomb du parc pour l’observation, et l’ouverture d’un chemin d’accès traversant vers l’artère commerciale de la ville. L’univers végétal du parc situé en cœur de ville, les remparts, la tour de guet, les enrochements, la grotte, l’eau, la passerelle, le petit pont, etc., tout respire calme et tranquillité. Ce qui a valeur le jour l’a plus encore la nuit venue. »
Un parc économe en énergie
Valérie Lenain et Jean-Pierre Maquair, concepteurs lumière et associés, connaissent bien la commune de Yerres pour avoir défini, il y a quelques années, le plan lumière de la ville dont l’éclairage public a été presque complètement rénové en led. « Le parc de 12 000 m², situé en coeur de ville, devait être doté de son propre éclairage, déclare Valérie Lenain. Il joue un rôle fédérateur où l’élégance naturelle tant de la partie urbaine que de la zone protégée révèle la beauté et les mystères des lieux. Nos objectifs étaient de sécuriser les cheminements piétons, révéler le patrimoine bâti, tout en préservant la faune et la flore. Nous devions également conserver l’aspect pratique des circulations pour les Yerrois. »
Pour ce faire, les architectes et paysagistes ont créé un cheminement traversant qui conduit de la rue Charles de Gaulle au marché. Toute la subtilité de la scénographie de la lumière consistait à éviter que la lumière de la ville ne vienne perturber celle du parc. Pour cette raison, les concepteurs lumière ont mené en parallèle une étude de l’éclairage public afin de procéder au remplacement des sources d’ancienne technologie en led de façon à apaiser l’éclairage urbain et gagner en performance énergétique.
« En attendant, nous avons occulté les faces arrière des lanternes de la rue de l’Abbé Moreau en périphérie, afin de limiter l’entrée du flux dans le parc. D’ailleurs, notre réflexion s’est faite en deux étapes : une qui a porté sur la partie urbaine et l’autre sur la partie naturelle », précise Valérie Lenain.
Le belvédère qui longe le parc côté rue de l’Abbé Moreau a été créé comme un second trottoir, une passerelle qui vient en surplomb de l’espace boisé. Il assure une vue panoramique sur la zone protégée et offre un confort visuel homogène par l’intégration de l’éclairage au garde-corps sur un linéaire de 132 m. L’installation éclaire le trottoir en platelage bois et facilite l’accès au stationnement longitudinal de cette voie en bord de rivière. L’éclairage du garde-corps reste allumé toute la nuit.
Les remparts et la tour de guet
À l’extrémité ouest du parc, du côté de la rue Marc Sangnier, les remparts, de pierres blanches, forment un demi-cercle qui marque l’enceinte du château Budé. Le flux d’une trentaine de projecteurs et barres led encastrées, aux optiques extensives, nappe le mur d’enceinte et éclaire la tour de guet d’un blanc chaud. Cette mise en lumière, qui décline huit séquences à changements de couleur, scénographiée par Jean-Pierre Maquair, a été définie pour différencier les ambiances de l’axe urbain de la zone naturelle sensible, déclinant une palette de blancs. Elle permet également de programmer des éclairages dynamiques lors d’événements particuliers : fête du 14 juillet, Octobre rose, illuminations de Noël, etc. Afin de préserver des zones de pénombre tout en sécurisant les déplacements, l’éclairage des circulations piétonnes n’a concerné que les grandes allées ; les cheminements secondaires, à la demande de la Mairie, n’ont pas été éclairés. Les allées principales, qui sillonnent tout le parc, forment le fil conducteur et l’unité du parc. Elles sont éclairées par une centaine de projecteurs led encastrés de sol à effets rasants, ouverts à 180°, limitant l’éblouissement. Leur implantation, tous les 7 mètres en quinconce, a nécessité plus de deux kilomètres de câblage.
Protection du site naturel
Le parc était totalement en friche et la végétation recouvrait une grotte qui a été mise à jour lors des travaux d’aménagement. « Elle est très bien conservée, raconte Valérie Lenain, mais, inscrite au titre des Monuments historiques, elle ne peut être laissée ouverte en permanence. Bien que consolidée, les visiteurs ne peuvent pas y pénétrer pour des raisons de sécurité et de préservation : seul un aménagement spécifique permet de tourner autour. C’est pourquoi la municipalité a tout de même souhaité la mettre en lumière. »
Plusieurs essais in situ ont été nécessaires pour procéder au choix des produits et à leur implantation. Les appareils sont complètement dissimulés dans la végétation, et à l’abri des regards des visiteurs afin d’éviter qu’ils ne s’en approchent. L’installateur, en accord avec l’architecte, a même pris soin de sceller quelques appareils à certains endroits.
« Des projecteurs asservis par DMX sculptent les éléments les plus significatifs dans un ballet de couleurs douces, poursuit Jean-Pierre Maquair. Les divers enrochements se détachent de leur univers végétal, offrant ainsi au regard la cohérence dans l’offre mystérieuse des lieux, dans une variation de teintes blanches, plus ou moins chaudes. »
La sobriété des installations d’éclairage s’est imposée pour répondre à l’identité naturelle du lieu et à sa protection comme zone sensible.
La gestion des installations
La sélection des matériels économes en énergie, leur gestion, le choix des températures de couleurs et la temporisation des installations respectent la réglementation liée aux nuisances lumineuses et à la préservation de la biodiversité, applicable depuis le 1er janvier 2020.
L’éclairage dynamique permet de réduire les troubles sur la faune, la flore et les écosystèmes. Les nuances de blancs de l’éclairage patrimonial et les températures chaudes choisies pour le balisage du belvédère et des cheminements répondent aux contraintes de colorimétrie et de zéro émission lumineuse au-dessus de l’horizontale.
En respect de l’arrêté du 27 décembre 2018 relatif à la réduction des nuisances lumineuses, les conditions de temporalité sont gérées à l’armoire de commande, avec une extinction au plus tard une heure après la fermeture du parc.