Bien manger, chacun y aspire. Bien y voir, tout le monde le souhaite. Dépenser moins, tous le veulent. Non, il n’existe ni recette ni adresse de restaurant magique où l’on vous sert des plats de luxe pour une addition de misère. En revanche, ce qui existe bel et bien, ce sont des technologies qui offrent plus de lumière pour moins de consommation. Et ça, tout le monde devrait le savoir car les leds occupent maintenant le marché depuis plus de quinze ans. Elles ont gagné en performance, en qualité de lumière, en durée de vie. De plus, elles n’auront bientôt plus de sources concurrentes puisqu’à son tour la fluorescente se voit interdite du marché européen. Et désormais, elles s’inscrivent dans le tout récent plan de sobriété énergétique avec leur capacité à être pilotées automatiquement, pour ne s’allumer que si nécessaire, s’éteindre dès qu’il n’y a plus personne, monter et descendre en puissance selon les fluctuations de la lumière du jour, et déclencher des scénarios à heures fixes ou selon le bon vouloir du restaurateur, et tout cela à moindres frais…
Dossier réalisé par Isabelle Arnaud
INTERVIEW DE DAMIEN JOYEUX
Fondateur et directeur de Rayflexion :
La gestion comme interprète
de la conception lumière
Issu d’une agence de conception lumière, et après avoir constaté le manque d’accompagnement sur la gestion de l’éclairage, Damien Joyeux crée Rayflexion en avril 2020. L’objectif : traduire ce que souhaite le concepteur lumière et rendre concrètes ses intentions en définissant les éléments nécessaires à l’installateur pour répondre aux demandes de l’utilisateur.
Comment définiriez-vous le rôle de Rayflexion ?
Rayflexion est un bureau d’études spécialisé dans les systèmes de contrôle qui accompagne les maîtres d’ouvrage, concepteurs lumière et installateurs. Mon expérience de plusieurs années dans une agence dans l’événementiel et dans les mises en services, puis dans une agence de conception lumière, me permet de comprendre chaque étape d’un projet d’éclairage, ainsi que les différents intervenants afin de proposer des solutions totalement adaptées à la demande de chacun. Par exemple, nous aidons les maîtres d’ouvrage et maîtres d’oeuvre à optimiser les systèmes de contrôle pour leur garantir un coût juste, le choix des produits en fonction des besoins de l’utilisateur, sans oublier une consommation maîtrisée. Notre travail ne se substitue pas du tout à celui du concepteur lumière, nous contribuons plutôt à concrétiser ses idées et veillons à ce que l’installation soit parfaitement opérationnelle afin de pouvoir passer à la programmation en toute sérénité. Et nous élaborons des synoptiques de câblage et allons jusqu’au suivi de chantier pour aider l’installateur à définir les réseaux de commande.
À quel moment l’étude de la gestion de l’éclairage intervient-elle dans le projet ?
Plus la partie étude est anticipée et mieux c’est ; il est essentiel de définir les systèmes de gestion très tôt pour qu’ils répondent le plus précisément possible aux besoins de l’utilisateur final. L’étude permet de porter un regard sur les souhaits et les intentions du client et du concepteur lumière et d’orienter le projet vers différents protocoles de commande. La partie suivi est tout aussi importante parce qu’elle constitue le lien avec l’installateur : ensemble, nous nous assurons de la bonne mise en place de tous les systèmes avant de lancer la programmation avec le concepteur lumière.
Qu’est-ce qui nécessite un système de gestion dans un restaurant ?
Un restaurant représente, par excellence, un lieu où plusieurs ambiances lumineuses cohabitent, que ce soit de façon temporelle ou spatiale. La gestion de l’éclairage est l’outil qui va permettre de créer plusieurs scénarios. Un bar ou un restaurant comporte très souvent de larges baies vitrées, et vit donc avec la lumière naturelle une grande partie de la journée ; comme ces établissements restent ouverts tard le soir, l’atmosphère s’en trouve complètement modifiée à la nuit tombée. À midi, les clients, qui la plupart du temps sortent du bureau, apprécient un éclairage dynamique qui ressemble à la lumière naturelle ; tandis que le soir, ils préfèrent le confort chaleureux et calfeutré d’un espace qui leur rappelle plutôt l’intimité de la maison. Grâce à un système de gestion adapté à ces différents moments, nous faisons varier les niveaux d’éclairement, les températures de couleur, nous créons des contrastes en passant d’un scénario à l’autre, de façon imperceptible, et sans intervention particulière du gérant de l’établissement. Par exemple, pour le restaurant 39V, nous avons défini des niveaux d’éclairement très faibles pour la nuit, de l’ordre de 3 ou 4 %. Le système de gestion est aussi fonction des technologies utilisées. Dans les restaurants, on trouve principalement deux typologies de produits : des appareils led linéaires ou encastrés de plafond, assez techniques, qui se pilotent directement en DALI et permettent des variations de 0 à 100 %. À l’opposé, les sources type lampes led se pilotent directement en 230 V, avec une gradation par phase.
Comment réalisez-vous cette orchestration ?
Nous travaillons à partir des plans du projet du concepteur lumière et les fiches techniques des produits. Nous analysons les objectifs : faut-il seulement un déclenchement horaire, de nombreux scénarios, avec changement de températures de couleur, à quel rythme, etc. Que souhaite le client final : disposer d’une commande par bouton-poussoir, avec une tablette, ou un déclenchement automatique selon certaines heures ? Notre étude s’appuie à la fois sur les aspects techniques, pour la définition du système, et pratiques pour son utilisation. Nous devons cependant être pragmatiques et rester à l’écoute du maître d’ouvrage qui doit pouvoir intervenir, pour modifier les ambiances : en baissant par exemple le niveau d’éclairage sur une seule table si les convives le souhaitent. Les systèmes de gestion permettent cette flexibilité, et on peut laisser la main au chef d’établissement. C’est pour cette raison que l’analyse des besoins se trouve au centre de nos études, afin d’accompagner le restaurateur qui, lui-même, ne sait pas exactement ce qu’il veut. Nous intervenons comme des interprètes en fait, car ces systèmes de gestion ont besoin de passerelles, de traducteurs, pour piloter une installation en DALI, faire de la gradation en 0-10 V, organiser des séquences lumière… Tous ces traducteurs construisent une sorte de pyramide de dispositifs commandés par le système de gestion que nous mettons en place.
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Under, à Båly, Norvège, par iGuzzini
Le cabinet Snøhetta a conçu pour la zone côtière la plus méridionale de Norvège, près du village de Båly, le premier restaurant sous-marin d’Europe.
Under – c’est son nom – a été pensé en accordant une attention particulière à son contexte aquatique : l’édifice, de forme élégante et élancée, est constitué de béton rugueux qui facilite l’agrippement des moules. Avec le temps et la densification de la population de mollusques, le monolithe submergé deviendra une barrière artificielle de moules à double fonction : purifier la mer et attirer encore plus de vie marine dans ses eaux propres.
Avec ses murs en béton de 50 cm d’épaisseur, la structure est réalisée pour résister à la pression et aux violentes tempêtes. La grande baie vitrée en acrylique – 11 m x 4 m – d’une épaisseur de 288 mm donne sur les fonds marins et leurs changements au fil des saisons et en fonction des conditions météorologiques. L’architecture, le menu et les objectifs didactiques d’Under offrent au visiteur une expérience multisensorielle. Le restaurant accueille aussi des équipes de recherche interdisciplinaires pour étudier la biologie marine et le comportement des poissons.
Le voyage du visiteur s’articule sur trois niveaux, un peu comme une plongée, mais sans combinaisons ni bouteilles. Depuis l’entrée, on accède à la zone du vestiaire puis, en descendant d’un niveau, au Champagne bar, qui marque la transition de la côte à l’océan. Ce passage physique est aussi souligné par une étroite fenêtre en acrylique qui coupe verticalement les niveaux du restaurant. Du bar, le client a vue sur les fonds marins, vers le bas, où se trouve le restaurant. Là, deux longues tables à manger et d’autres, plus petites, sont installées face à la grande fenêtre panoramique…
La palette des coloris adoptée au restaurant suit la logique des différents espaces de la construction : alors que le bar à champagne se décline dans les couleurs tendres de la région de la côte qui rappellent les sédiments de roche, coquillages et sable, la salle à manger est plongée dans les tons plus foncés de bleu et de vert, inspirés des fonds marins, des algues et de la mer agitée. La couleur chaude du bois de chêne utilisé pour l’intérieur du restaurant tranche avec le gris de la coque en béton, en créant une atmosphère intime.
Et c’est sur cette caractéristique de l’espace qu’est basée la lumière conçue par AF Lighting qui a opté pour les encastrés Laser Blade XS à une cellule – environ 400 appareils – positionnés de manière à concentrer l’éclairage sur les tables, en laissant l’espace dans une certaine pénombre. Les appareils, de faibles dimensions, sont dissimulés dans le plafond et semblent éteints, même sous différents angles de vue. L’éclairage de service, identique et nécessaire pour les serveurs, est réduit au minimum grâce à l’usage de balises qui dialoguent avec les appareils : les Laser Blade XS s’allument à l’approche du serveur et s’éteignent après son passage. L’atmosphère d’intimité pour les clients et le respect du milieu marin sont ainsi garantis.
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Restaurant Harena à San Benedetto del Tronto, Italie, par Artemide
Avec le projet Harena, l’architecte Enzo Eusebi veut trouver un lien entre les communautés et les individus, dans un moment historique où le concept de relation est reconsidéré de manière critique et radicale. L’espace se compose d’une séquence de salles abritant un restaurant, une académie de chefs professionnels organisée autour de postes de travail ultra-technologiques, un bar/bistrot américain avec un salon-bibliothèque et une cave à vin internationale.
La rénovation utilise l’ancien cinéma comme un grand espace en forme d’atrium. Ici, les plateformes d’origine qui supportaient les machines ont été utilisées comme points d’agrégation supplémentaires et différents.
Enzo Eusebi a également préservé et rénové avec des matériaux contemporains les structures existantes du bâtiment, en insérant seulement une nouvelle structure légère en acier qui réinvente la façade principale également par de nouvelles ouvertures pour la ventilation naturelle, qui réduit le besoin de refroidissement artificiel.
L’éclairage a été réalisé avec la suspension nh signée des designers chinois Neri&Hu pour Artemide. nh est un appareil simple, polyvalent et pratique qui peut être posé ou suspendu. Une sphère en verre soufflé blanc coulisse le long d’un anneau en laiton brossé, ce qui lui permet de prendre différentes positions et d’ajuster et de diriger librement le diffuseur.
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Le Harp Bar, à Belfast, Irlande du Nord, par ERCO
Le nouveau Harp Bar n’est distant de l’ancien que de quelques mètres. À la fin des années 1970 et au début des années 1980, ce dernier était un local célèbre pour la musique punk. De nombreux artistes s’y sont fait un nom et ont même atteint une célébrité internationale.
Au cours des deux dernières décennies, Cathedral Quarter s’est transformé en centre culturel qui organise notamment chaque année le Cathedral Quarter Arts Festival. Le Harp Bar compte toujours parmi les pubs les plus fréquentés de la région, grâce entre autres à la musique live tous les soirs. Reconstituée en studio, la version historique du Harp Bar a également servi de coulisses pour le film Good Vibrations de 2013, souvent récompensé. Il raconte la vie du propriétaire de magasin de disques Terri Hooley, l’une des figures de la scène punk au moment du conflit nord-irlandais.
L’actuel bâtiment du Harp Bar, qui date de 1832, appartenait autrefois à la Bushmills Distillery, l’une des plus anciennes distilleries de whisky au monde avec une tradition de plus de 400 ans. Dès 1989, le bâtiment historique a abrité le restaurant Nick’s Warehouse, et depuis peu, ces locaux sont occupés sur deux niveaux par le Harp Bar. Le patron, Willie Jack, qui exploite d’autres pubs à Belfast avec sa société Commercial Court Inns, collectionne du mobilier et des miroirs de bar irlandais.
L’aménagement intérieur du Harp Bar est marqué par le victorianisme belfastois. L’ambiance est dominée par des bois sombres, des capitonnages rouges, des surfaces cuivrées polies, des miroirs aux murs et du marmoleum avec un revêtement spécial au plafond. Le décor est complété par des objets de la culture écossaise du whisky et de la bière noire : des bouteilles soigneusement rangées et des pièces techniques de distilleries en passant par des affiches publicitaires historiques. Sous ces objets décoratifs sont placées des antiquités chinées – notamment un lampadaire historique qui se dressait jusque dans les années 1980 devant l’Ulster Tavern de la Chichester Street.
L’éclairage du nouveau Harp Bar, mis en oeuvre avec la dernière technologie led, devait rappeler un ancien pub belfastois. Les appareils suspendus décoratifs historiques sont complétés par des luminaires ERCO – Quintessence, Zylinder, Pollux et Nadir –, l’éclairage d’ambiance étant assuré par des accentuations sur les sièges et la décoration. Les musiciens sont naturellement mis en valeur par des spots à lumière variable. L’un des principaux défis pour les concepteurs consistait à prévoir une adaptation permanente du concept lumière du pub, qui a été progressivement aménagé avec des pièces de collection du fonds d’antiquités du patron.
Les miroirs agrémentés d’écritures, de logos et d’ornements par les fabricants irlandais de boissons devaient être les premiers mis en scène avec précision – en évitant tout éblouissement. Les miroirs sont soulignés au moyen de projecteurs qui révèlent les couleurs des inscriptions décoratives. Les invités ne sont éblouis ni par les luminaires ni par les réflexions et l’éclairage led ne nuit pas aux objets vintage.
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Restaurant Commotie à Gand, Belgique, par Delta Light
Après deux essais réussis à Courtrai et à Gand, le chef Thomas Gellynck et la sommelière Lara De Vlieger ont décidé d’ouvrir un lieu permanent à la périphérie de Gand, dans le vert, avec le meilleur des deux mondes.
Dans la cuisine ouverte, on trouve des herbes cultivées sur place, des produits biologiques et des vins locaux. Le chef cuisine régulièrement sur un feu ouvert, créant une expérience unique et partageant sa vision de la pureté.
Avec l’architecte Merijn Degraeve, ils ont opté pour un design minimaliste japonais, l’atmosphère Wabi Sabi avec de nombreux éléments naturels et bruts.
La nature et le silence deviennent les plus grandes sources d’inspiration des lieux, entourés de verdure et d’une forêt.
Les matériaux tels que le béton, le bois, la chaux, le liège et la pierre naturelle devaient faire l’objet de la plus grande attention, en montrant le moins de différences possible entre l’extérieur et l’intérieur.
Les questions techniques dont les luminaires devaient rester en arrière-plan autant que faire se peut.
Des luminaires miniatures (Kix Pin, Micro Reo et Dot.Com ON) ont été sélectionnés et dotés de la couleur de l’arrière-plan, ce qui a donné lieu à une atmosphère sublime, notamment pendant le service du soir.
« À mon avis, et d’après les réactions enthousiastes des visiteurs, nous avons parfaitement réussi à traduire l’intérieur de ce qui est servi dans l’assiette », estime Merijn Degraeve.