L’éclairage de sécurité permet d’identifier les issues en cas de besoin. On en distingue deux types : l’éclairage d’évacuation, qui est obligatoire pour l’ensemble des bâtiments et l’éclairage d’ambiance, destiné aux locaux de plus de 100 personnes, pour éviter la panique en cas d’évacuation. L’éclairage d’évacuation permet d’indiquer les sorties de secours, et l’éclairage d’ambiance ou antipanique est composé de luminaires haute puissance. Ces systèmes d’éclairage se mettent en route en cas de coupure de courant.
Des solutions adaptées aux besoins
Certaines applications nécessitent des solutions plus spécifiques, comme l’explique Fabrice Morton, responsable Marketing de l’offre, Legrand : « Pour les établissements avec locaux à sommeil, notamment les hôtels, les hôpitaux, les internats et les Ehpad, des solutions combinant BAES + BAEH (bloc autonome d’éclairage d’habitation) sont préconisées. » En cas de coupure secteur, les BAEH se mettent en fonctionnement pour assurer un éclairage de remplacement. Si l’alarme incendie se déclenche, la fonction BAES est activée. « Les BAES, pour l’évacuation, diffusent un flux de 45 lm avec 1 heure d’autonomie. Les BAEH sont dédiés aux habitations et diffusent un flux de 8 lm avec 5 heures d’autonomie », précise l’expert. Les produits combinant BAES + BAEH sont exclusivement réservés aux établissements avec locaux à sommeil. Enfin, il existe d’autres produits, à l’image des dispositifs de balisage renforcés (DBR), permettant d’orienter les personnes en situation de handicap vers les espaces d’attente sécurisés.
Ces systèmes d’éclairage de sécurité sont imposés par la réglementation, qui précise quand des BAES ou un système d’éclairage sur source centrale sont préconisés et le nombre de luminaires à installer. Le bâtiment est donc maillé par ces équipements, dont il faut garantir le bon fonctionnement, comme l’explique Nora Neggazi, product Marketing Specialist EML, ABB Kaufel : « Le bâtiment est composé de nombreux blocs qu’il faut maintenir dans le temps. Les principales causes de dysfonctionnement sont les sources grillées ou les batteries hors service. L’entretien est un enjeu central. »
Outre la maintenance, l’objectif est aujourd’hui d’apporter des fonctionnalités pour aider les occupants, au-delà de la coupure de courant, comme l’explique Claude Boyer, directeur des Activités Life & Safety Eaton France : « L’éclairage de sécurité s’intègre progressivement aux enjeux de sécurité et de sûreté actuels. Il peut être un véritable atout et sauver des vies, notamment en cas d’attentat ou de risque climatique. L’enjeu de la profession est de s’inscrire dans cette dynamique et d’apporter des solutions pour répondre aux risques nouveaux. Un ensemble de décrets publiés récemment va dans ce sens, et des investissements importants ont été réalisés pour apporter des solutions. »
10 ans d’innovation dans l’éclairage de sécurité
Historiquement, les évolutions des produits sont liées à la maintenance, à travers trois technologies principales, comme l’explique Fabrice Morton : « Le contrôle manuel, où le luminaire nécessite un test manuel pour fournir des informations sur son fonctionnement. Le SATI, où des microprocesseurs sont intégrés au luminaire pour tester automatiquement les produits. Dans ce cas, un voyant de couleur s’affiche pour donner des informations sur l’état du produit. Enfin, la technologie adressable intègre les mêmes fonctionnalités que SATI, mais avec une remontée d’informations sur un logiciel de gestion. Il y a donc une hiérarchie de la maintenabilité. »
Les experts observent d’ailleurs une migration du marché du contrôle manuel vers le SATI, comme l’explique Fabrice Morton : « Il y a deux raisons principales à cela : les solutions à contrôle manuel ne peuvent pas intégrer de sources d’éclairage led, comme prévu par la réglementation, ce qui les rend plus énergivores. La led a également une durée de vie plus longue et certaines sources sont progressivement bannies. »
Aujourd’hui, les fabricants mettent sur le marché des installations plus simples à maintenir. « Les solutions adressables donnent des informations sur l’état de chaque luminaire et la localisation de chaque produit. Le SATI connecté, développé par Legrand, est une “évolution connectée” de la technologie SATI. Il permet un test à distance et en temps réel des installations, en indiquant le nombre de produits en défaut et la nature du dysfonctionnement via une web application dédiée.
Cette technologie est particulièrement adaptée aux petits et moyens établissements, car elle permet d’identifier un éventuel dysfonctionnement de l’installation d’éclairage de sécurité sans avoir à se déplacer sur site et devant chaque bloc », précise l’expert Legrand.
Le marché de l’éclairage de sécurité est régi par des cycles d’innovations longs, guidés par l’évolution des réglementations. « Beaucoup d’investissements ont été réalisés ces dernières années, ce qui a permis de faire émerger de nouvelles technologies », précise Claude Boyer. Ces innovations ont été développées à travers trois axes principaux que sont l’environnement, la performance des équipements et l’efficacité de la signalisation.
« Sur le plan environnemental, l’éclairage de sécurité a été précurseur de la norme NF Environnement et la consommation des équipements a été divisée par dix en l’espace de dix ans. Parallèlement, le choix des matériaux, l’écoconception, la réduction des substances dangereuses et la performance des batteries ont permis d’aller plus loin », précise Claude Boyer.
Sur le plan de la performance, « les technologies adressables et connectées ont permis d’augmenter la durée de vie et la fiabilité des installations. », ajoute Claude Boyer.
Concernant l’efficacité de la signalisation, « le design, la lisibilité des pictogrammes et l’intégration dans leur environnement ont permis aux architectes de voir ces solutions d’un meilleur œil », explique l’expert. Aujourd’hui, l’éclairage de sécurité est totalement intégré au bâtiment. En effet, « ce lot était souvent considéré par les architectes comme une verrue du bâtiment », ajoute Nora Negazzi.
Enfin, selon Nora Negazzi : « L’une des principales évolutions vient de la digitalisation, ce qui est vrai dans de nombreux domaines, qu’il s’agisse de l’appareillage, des tableaux électriques… Les fabricants vendent des produits connectés ou connectables ainsi que les logiciels permettant leur gestion. »
Le numérique au service de l’éclairage de sécurité
Les fabricants saisissent l’opportunité des solutions connectées, en proposant des équipements permettant de simplifier la gestion et la tenue dans le temps des installations. ABB propose des blocs connectés fonctionnant sur le cloud, avec un système de géolocalisation via Google Maps. « Chaque bloc est scanné lors de la phase d’installation et positionné de manière dynamique au sein du bâtiment. L’objectif est de suivre la maintenance, de renforcer la sécurité du bâtiment et de gagner du temps. Les logiciels de supervision envoient ensuite des notifications, des rapports et des informations sur la pièce à changer », détaille Nora Neggazi.
Côté Legrand, le SATI connecté est un axe de développement fort, comme l’explique Fabrice Morton : « Les solutions adressables sont adaptées aux établissements de taille importante, disposant de plus de 100 blocs. Le SATI connecté adresse plutôt les petits bâtiments, en proposant un diagnostic à distance et en temps réel des installations. Cette solution permet ainsi aux exploitants de diminuer leurs coûts de maintenance (plus de déplacement inutile) et de respecter leurs obligations réglementaires. »
Claude Boyer nuance l’importance du numérique : « La connectivité et la gestion centralisée existent depuis longtemps, avec le SATI et l’adressable. Le déploiement de ces solutions avec notamment l’opportunité offerte lors de la rénovation des installations est un réel enjeu. À mes yeux, la réelle innovation est l’apport principal du numérique lié à l’interopérabilité des solutions. Les informations sur la sécurité incendie, l’évacuation en cas de colis suspect, de risque industriel ou d’acte de malveillance peuvent être transmises aux services en charge de la surveillance. Elles peuvent être rendues interopérables avec la vidéosurveillance ou la détection de fuite de matières inflammables, par exemple. »
ENCADRÉ
Zoom sur Visibilité +
Visibilité + est né d’une volonté des industriels de proposer des solutions à plus haute valeur ajoutée. L’éclairage de sécurité a deux modes de fonctionnement : en veille, et en secours lorsque le bâtiment est évacué. Dans 9 cas sur 10, l’évacuation se fait en présence de secteur, en journée et en pleine lumière. En cas d’évacuation, le constat est que les occupants sortent du bâtiment par l’entrée principale et n’empruntent pas les sorties de secours. L’objectif est donc de les accompagner vers la sortie. La fonction Visibilité + permet d’améliorer la visibilité et de fluidifier les cheminements en cas d’évacuation secteur présent. Lorsqu’un bâtiment va être évacué à la suite du déclenchement d’une alarme incendie secteur présent, les produits vont clignoter avec un flux de 45 lm (flux de secours). Ce mode de fonctionnement ne se fait pas au détriment de l’éclairage d’évacuation. S’il n’y a plus de courant, le système conserve le même fonctionnement. Il existe aujourd’hui une norme NF Visibilité +. Elle ouvre la voie à la prise en charge de l’ensemble des risques du bâtiment. Il s’agit d’un cheval de Troie permettant de connecter l’éclairage de sécurité à la sûreté des bâtiments et de remettre l’éclairage de sécurité face à sa fonction réelle.
Les nouveautés produits
Les acteurs du secteur innovent pour développer les technologies permettant d’aller plus loin que les fonctions standard de l’éclairage de sécurité.
Côté Legrand, le SATI connecté est un axe de développement fort, comme l’explique Fabrice Morton : « Les solutions adressables sont adaptées aux établissements de taille importante, disposant de plus de 100 blocs. Le SATI connecté adresse plutôt les petits bâtiments, en proposant un diagnostic à distance et en temps réel des installations. Cette solution permet ainsi aux exploitants de diminuer leurs coûts de maintenance (plus de déplacement inutile) et de respecter leurs obligations réglementaires. »
De son côté, ABB Kaufel a lancé le 31 mai 2022 une offre baptisée BrioSpot. Cette offre n’existait jusque-là qu’en encastré. « Aujourd’hui, nous proposons deux versions : BrioSpot S pour une installation en saillie et BrioSpot R pour une installation en encastré. Sur le marché, il est rare de trouver une gamme unique pour couvrir l’ensemble des besoins et il faut souvent composer. ABB propose une gamme complète, qui intègre également des BAES étanches et d’ambiance. Le design a également été revu, avec des blocs petits et compacts, disponibles en noir et blanc. Un travail a été réalisé sur la diffusion lumineuse. La gamme a été pensée pour l’occupant et se fond dans son environnement. Elle a également été pensée pour les installateurs, avec trois modes de pose distincts : mural, plafond et drapeau, le tout sans outil, par une simple rotation de la patère », explique Nora Neggazi.
Enfin, Eaton a développé le premier système adaptatif, qui permet de s’assurer de la sécurité des occupants lors de la phase d’évacuation, comme l’explique Claude Boyer : « L’objectif est de minimiser les risques lors de l’évacuation, en orientant les usagers vers des zones qui ne présentent pas de risques. La signalétique est donc adaptée pour éviter les zones dangereuses. » La deuxième innovation se concentre à la fois sur l’aspect environnemental, l’intégration au bâti et la simplification de pose pour les installateurs. « Les gammes Planete2 et UltraLED2 offrent un mode de pose simplifié pour optimiser la visibilité des produits une fois en position », explique Claude Boyer. Enfin, une troisième innovation concerne l’intégration au bâti, avec la gamme Spot, qui permet une intégration esthétique tout en respectant la fonction initiale. « Ces produits utilisent les outils standard de l’électricien avec des modes de pose adaptés au secteur de l’éclairage », précise l’expert Eaton.
Le marché poursuit sa mue
Deux principaux axes vont conduire l’évolution des solutions dans les années à venir. Le premier concerne la création de fonctions nouvelles. « Les solutions adaptatives et dynamiques s’imposeront à terme », explique Claude Boyer. Nora Neggazi abonde dans ce sens : « Le marché va progressivement se diriger vers une plus grande connectivité et davantage de fonctions pour aller plus loin que Visibilité +. La communication entre les blocs pourrait à terme contribuer à réduire le câblage, améliorer la maintenance et l’intelligence globale de l’installation. » Pour Fabrice Morton, « le connecté et le Smart sont le défi de demain, et notamment en dehors du levier maintenabilité, qui existe déjà ».
Le second axe concerne le respect de l’environnement, comme l’explique Fabrice Morton : « La diminution de l’empreinte carbone des produits, la gestion des déchets et la réparabilité des produits sont des sujets centraux. » Pour Claude Boyer, l’enjeu est d’intégrer des notions d’économie circulaire, « grâce, notamment, à de nouvelles directives sur la réparabilité et la recyclabilité, ce qui aura un impact significatif sur la manière de concevoir les produits ».
Le marché de l’éclairage de sécurité poursuit donc sa mue pour offrir plus de valeur ajoutée aux occupants et aux gestionnaires des bâtiments. L’enjeu est considérable, au moment où la remise à jour des installations en fin de vie, ou utilisant des sources énergivores, se pose. Les acteurs de la gestion du bâtiment et de la maintenance vont donc devoir s’emparer de ces sujets pour proposer des solutions globales, adaptées, performantes et en lien avec les autres composantes de la sûreté des bâtiments.
Alexandre Arène