Pouvez-vous brièvement nous présenter France Datacenter, le GIMELEC et l’Alliance Green IT ainsi que vos domaines d’intervention respectifs ?
Géraldine Camara – France Datacenter est l’association professionnelle de référence de la filière datacenter. Elle compte actuellement plus de 100 adhérents issus de l’ensemble de la chaîne de valeur du datacenter. Nous avons à la fois des opérateurs de datacenter, des opérateurs télécoms, des opérateurs de cloud, des entreprises utilisatrices de datacenters, des constructeurs, des concepteurs de datacenters, des exploitants et des sociétés de maintenance. Ces adhérents sont des grandes sociétés, des ETI, des PME, des TPE, des start-up, qui sont implantées non seulement à Paris et en région parisienne, mais également dans toutes les régions de France : Nord, Sud-Ouest, Grand Est, etc. Cette représentativité est une force, car elle nous permet d’être au plus près des marchés, des attentes des membres, des réalités de terrain et des évolutions sectorielles. France Datacenter a pour mission de représenter ses adhérents auprès des pouvoirs publics et de les fédérer en permettant l’échange de pratiques entre membres.
Joël Vormus – Le GIMELEC est l’association professionnelle des industries de l’électronumérique. Par ses adhérents, le GIMELEC est historiquement lié aux métiers de la performance énergétique. Auparavant, cela concernait quelques familles d’équipements, notamment les systèmes d’alimentation sans interruption. Aujourd’hui, nous traitons davantage des sujets techniques, notamment les solutions et les méthodes pour soulager le réseau électrique grâce aux datacenters… En effet, comme le datacenter est muni de batteries et peut également participer à des opérations d’effacement lors des pics de consommation ou d’absorption de production renouvelable, il a la capacité de soulager l’infrastructure énergétique. Le GIMELEC traite également des sujets politiques, avec tout un éventail d’initiatives variées. Nous nous efforçons de valoriser les efforts des industriels du point de vue de la performance énergétique des installations, qui fait l’objet d’un manque de pédagogie.
Caroline Vateau – L’Alliance Green IT (AGIT) est l’association des acteurs engagés pour promouvoir un numérique écoresponsable. Constituée en 2011 et composée actuellement de plus de 70 adhérents, l’AGIT a trois missions : fédérer les acteurs du Green IT, contribuer au débat public sur le numérique durable par la publication de livres blancs et de supports de communication, et sensibiliser les parties prenantes aux enjeux du numérique responsable, notamment au travers de notre événement annuel We Do Green IT. Les membres de l’AGIT sont principalement des entreprises, mais de typologies très variées (activité, taille, secteur, etc.) et ont la capacité d’adresser ensemble une grande partie du spectre du secteur numérique. Nous constatons également une belle représentation du secteur datacenter, regroupant plusieurs hébergeurs, bureaux d’études, exploitants, équipementiers, etc. Dans le but de propager les bonnes pratiques de sobriété numérique, l’AGIT publie diverses études, livres blancs, enquêtes, que nous souhaitons rendre accessibles librement et gratuitement au plus grand nombre. Sur le segment Datacenter-Cloud, plusieurs études ont déjà vu le jour, par exemple « Le Cloud est-il Green ? », en 2011, une vidéo explicative de décryptage des principales idées reçues sur le Cloud Computing. Notre Baromètre Green IT, une enquête réalisée tous les deux ans, dont la dernière édition a été menée en 2020, vise à mesurer la maturité Green IT des entreprises françaises. Nous adressons notamment une série de questions sur les thématiques des infrastructures informatiques et du datacenter.
Quels travaux menez-vous en commun ?
Géraldine Camara – Le GIMELEC est membre du conseil d’administration de France Datacenter et en tant que tel, nous pouvons mener des actions en commun sur certains sujets institutionnels ou techniques.
Joël Vormus –– Nous avons un certain nombre d’adhérents en commun. Le GIMELEC est présent à l’AGIT et France Datacenter, où nous représentons les industriels. Nous ne sommes pas représentatifs de la filière datacenter dans sa globalité. Nous intervenons principalement sur des sujets liés à la performance énergétique et aux réseaux électriques. Le GIMELEC sert de tuteur et souhaite accompagner le développement du secteur et les bonnes pratiques. Il faut rappeler que le datacenter est un secteur très jeune et en plein développement. Nous apportons donc principalement une contribution technique.
Caroline Vateau – En partenariat avec France Datacenter et le GIMELEC, nous avons produit en 2017 un livre blanc intitulé « Les indicateurs de performance énergétique et environnementale des data centers ». L’idée, derrière ce livre blanc, était de proposer un outil opérationnel décryptant à la fois les normes et bonnes pratiques existantes, tout en explicitant les méthodes de calcul des KPI et comment faire les mesures des paramètres associés. Nous avons également organisé au cours des dernières années quelques événements en commun sur la thématique du datacenter, notamment sur la communication et le retour d’expérience autour du code de conduite européen.
»Il est important de rappeler que le datacenter ne représente que 14 % de l’empreinte environnementale du numérique, et qu’il est le bon élève du secteur. »
Géraldine Camara
Comment évoluent vos adhérents ? Couvrez-vous les petites structures et le corporate ?
Joël Vormus – Le marché du datacenter est composé de peu de gros acteurs et de beaucoup de moyens et petits. Les gros datacenters font l’objet d’investissements lourds et sont à la pointe de la technologie, pour des raisons évidentes de coûts d’exploitation. Pour les installations importantes, le poids énergétique au cours du cycle de vie d’un datacenter est considérable, et les enjeux liés à la performance énergétique sont donc adressés. Concernant les installations moins importantes, leur gestion peut être moins professionnalisée et leur performance très disparate. Ce segment constitue l’essentiel du potentiel de performance.
Caroline Vateau La crise sanitaire qui a démarré il y a maintenant plus d’un an a renforcé la prise en considération des enjeux environnementaux associés au développement des outils et services numériques dans les entreprises de toute taille, des PME aux grands groupes. Nous constatons une accélération réelle de la prise de conscience et une volonté d’aller dans le bon sens. L’idée est bien sûr de permettre à toutes les entreprises d’adopter des pratiques vertueuses, de la plus petite structure à la plus grande. Pour cela, nous comptons également sur nos partenaires historiques, le GIMELEC, le Syntec Numérique et Cinov Numérique. Ils ont rejoint la gouvernance de l’AGIT il y a quelques années et nous encouragent à accompagner les entreprises qu’ils représentent afin de fédérer l’ensemble de la filière.
Le 13 janvier dernier, le Sénat a adopté une proposition de loi « visant à réduire l’empreinte du numérique en France ». Quelles sont les lignes directrices de ce texte et comment les acteurs du datacenter l’accueillent-ils ?
Géraldine Camara – Une grande partie du contenu de la proposition de loi initiale s’est déjà traduite par une éco-conditionnalité du taux réduit de taxe intérieure de consommation finale d’électricité (TICFE) pour les centres électro-intensifs. Dans le contexte actuel, où nous avons plus que jamais besoin du numérique pour travailler, nous divertir, prendre soin de notre santé, nous nourrir même, c’est-à-dire dans un contexte où les datacenters, socles tangibles du numérique, sont devenus indispensables à toute l’économie et à toute la société, il est important de rappeler que le datacenter ne représente que 14 % de l’empreinte environnementale du numérique, et qu’il est le bon élève du secteur : des efforts considérables sont fournis par la filière dans ce domaine (efficacité énergétique, économie circulaire, etc.). Bien qu’il reste encore à faire dans ce domaine du numérique et de l’environnement, il faut aussi considérer, en matière de numérique, les terminaux (les usages des smartphones) et les réseaux.
Joël Vormus –– Le Gouvernement tente de réguler la performance énergétique des datacenters via le décret tertiaire. Le GIMELEC est un fervent défenseur du décret tertiaire, mais dans le cas du datacenter, qui est un hybride de bâtiment et d’industrie, l’appliquer au secteur est inadapté. Une méthodologie très complexe a été mise au point selon des critères franco-français. Même les acteurs les plus importants ont du mal à la comprendre. Selon nous, l’intégration du datacenter au décret tertiaire n’apportera pas de gains énergétiques, plombera la compétitivité des acteurs et les mettra dans l’irrégularité. Il est important de rappeler que les datacenters sont très aisément délocalisables. Nous sommes donc en faveur de la régulation, mais si elle est réalisée en cohérence avec le « langage du secteur ». La proposition du Sénat que vous évoquez est bien plus constructive et prend en compte les critères de performance comme le PUE (Power usage effectiveness) ou d’utilisation d’eau (Water Usage Effectiveness). Il est essentiel que l’ensemble des acteurs comprennent les textes réglementaires, car, comme nous l’évoquions précédemment, les moyens et petits datacenters doivent pouvoir appliquer ces règles pour améliorer la performance du parc existant. L’Europe s’intéresse depuis de nombreuses années aux datacenters : leur dernier rapport, qui préfigure une régulation européenne, est sorti en novembre. Un guide d’achat public et un code de conduite européen existent depuis des années déjà.
» l’intégration du datacenter au décret tertiaire n’apportera pas de gains énergétiques, plombera la compétitivité des acteurs et les mettra dans l’irrégularité. »
Joël Vormus
Caroline Vateau – Le constat que nous faisons est que la question du numérique responsable va dans le bon sens. Si les politiques s’étaient déjà saisis de cette question les années précédentes, l’année 2020 a été marquée par des actions concrètes, notamment la loi Anti-Gaspillage pour une économie circulaire, entrée en vigueur le 10 février, et cette proposition de loi du Sénat qui renforcent considérablement les engagements et cibles de performance pour réduire les impacts environnementaux du secteur numérique. Ces dispositifs réglementaires concernent non seulement les datacenters, mais toute la filière, ils vont pousser l’ensemble de la chaîne de valeur à changer les codes pour plus de transparence et pour une transition digitale qui soit durable. Pour ce qui concerne le datacenter, cette loi, en plus des critères d’écoresponsabilité conditionnant l’abattement de TICFE à horizon 2022, incite les datacenters à souscrire à des engagements pluriannuels contraignants de réduction de leurs impacts environnementaux. Pour nous, les dispositifs législatifs doivent adresser l’ensemble de la chaîne de valeur du secteur numérique, et concernant les datacenters, il est important de différencier les objectifs à atteindre sur les sites « nouveaux » de ceux des sites existants. Dans tous les cas, ce projet de loi est un réel levier, à la fois pour permettre le développement des infrastructures numériques durables, faire évoluer le parc de datacenters existant, améliorer la transparence et éviter les mauvaises interprétations des enjeux environnementaux et la place du datacenter dans le numérique responsable. Concilier transition numérique et transition écologique est plus que jamais une nécessité absolue.
Dans le cadre du Plan de relance, l’État va engager 7 milliards d’euros entre 2020 et 2022 pour accélérer la transition numérique de la France, dont 3,7 milliards pour renforcer la souveraineté numérique et l’innovation technologique française ; 2,3 milliards pour la transformation numérique de l’État ; 800 millions pour l’accès au numérique partout et pour tous ; et enfin, 300 millions pour la formation aux métiers du numérique. Comment les acteurs du datacenter accueillent-ils ces mesures et comment vont-elles se décliner concrètement sur le terrain ?
Géraldine Camara – Bien entendu, nous sommes favorables à ces efforts déployés au niveau national pour faciliter la transition numérique, efforts qui sont également à coordonner au niveau européen. Cela étant, le datacenter n’est pas cité en tant que tel dans le plan de relance. Il faut qu’il soit mieux reconnu comme l’indispensable levier de cette double transition, numérique et écologique, comme levier de la souveraineté numérique que beaucoup appellent de leurs vœux, et comme vecteur d’une image positive de la France.
Joël Vormus –– Le plan de relance français met des moyens sur la transition numérique, mais aucun montant n’est fléché directement vers les datacenters. Cela est compréhensible au vu de la croissance et de la santé économique des acteurs. Le marché du datacenter n’a donc pas particulièrement salué l’annonce du Plan de relance, car il aura peu d’impact direct sur la filière. Le datacenter bénéficiera en revanche du développement du numérique. La crise liée à l’épidémie de Covid-19 a fait chuter le chiffre d’affaires des entreprises industrielles de 10 % en moyenne, contre seulement 0 à 2 % pour les entreprises du datacenter.
Caroline Vateau – Nous saluons positivement les propositions du Plan de relance, car elles pourront faire gagner la France en attractivité à l’échelle globale du secteur numérique ; les conséquences pour les datacenters ne seront qu’indirectes, car un fort déploiement des usages, données et services numériques requiert des centres d’hébergement qu’il est préférable d’avoir sur le territoire national, pour des enjeux de souveraineté, mais également de développement du tissu économique local. Comme pour de nombreux produits, il est possible de « consommer local » sur les données et applications.
Parallèlement au Plan de relance, France Datacenter a lancé le plan stratégique Ambitions 2025, qui vise à gagner en compétitivité et à accélérer la croissance du secteur. Quels sont les principaux leviers pour atteindre vos objectifs ?
Géraldine Camara – Le plan Ambition 2025 repose sur 4 axes : développer l’attractivité des métiers de la filière, renforcer la résilience de nos infrastructures, innover pour mieux protéger l’environnement, accélérer le développement de la filière datacenter en France. Pour atteindre ces objectifs, nous avons plusieurs activités : représenter la filière auprès des institutions en tant que porte-parole de nos adhérents, développer les services aux membres en diffusant de l’information et en organisant des événements et des groupes de travail pour faciliter l’échange entre pairs, et enfin, informer les décideurs publics, les usagers, les médias en les sensibilisant aux enjeux des infrastructures numériques. Plusieurs livres blancs sont en cours de rédaction ou en voie de mise à jour.
Joël Vormus – Nous contribuons à ce plan à hauteur de ce que nous représentons, en mettant en avant les trois composantes du datacenter essentielles à nos yeux que sont la souveraineté, l’énergie et l’IT. D’autres sujets, liés à la cybersécurité, mais aussi à la fiscalité ou à la cohérence entre les régulations, sont également clés pour comprendre le marché. En France, l’expertise des pouvoirs publics sur le sujet est encore faible et les organisations professionnelles manquent par conséquent d’interlocuteurs.
Quels sont les besoins en formation et en qualification pour la filière et comment accompagnez-vous cette transition ?
Géraldine Camara – Nous avons fait de la formation le premier axe de notre plan stratégique à 2025, car nous considérons que cette question est majeure. En effet, certains de nos métiers sont en tension et les formations ciblées sur le datacenter se comptent sur les doigts de la main. Il faut référencer les métiers de la filière, développer les formations, faire connaître le secteur. Nous activons des partenariats en ce sens, comme avec les Plombiers du numérique sur le volet insertion.
Joël Vormus – Le manque d’employés qualifiés est une des grandes problématiques du marché. Cela occasionne une réelle tension, avec des débauchages entre acteurs et des débauchages dans le secteur industriel.
Caroline Vateau – L’implantation de nouveaux datacenters est source de création d’emplois directs et indirects, et ce, pendant toutes les phases du projet, à savoir la conception, la réalisation, l’exploitation et l’utilisation des sites. Ainsi, les besoins en personnels ressources qualifiés augmentent fortement. Or, face à cette demande croissante, le marché de l’emploi est plutôt stressé, notamment par un manque de connaissance du secteur et un manque de profils qualifiés. L’enjeu humain étant l’un des principaux leviers, si nous voulons des datacenters durables, la formation est un enjeu clé pour un développement d’infrastructures conciliant très haut niveau de disponibilité, sécurité physique et logique et performance environnementale. Avis aux candidats intéressés pour relever ce défi !
» La formation est un enjeu clé pour un développement d’infrastructures conciliant très haut niveau de disponibilité, sécurité physique et logique et performance environnementale. »
Caroline Vateau
Quel est votre point de vue sur la santé des acteurs de la filière après une année de crise sanitaire ?
Géraldine Camara – Les chantiers ont connu un ralentissement l’an dernier, puis ont repris. La demande reste forte, mais certaines contraintes liées à la crise sanitaire demeurent. Pour l’instant, le secteur fait preuve de résilience, mais il doit continuer à être soutenu pour appuyer la croissance des usages numériques.
Joël Vormus – Dans le périmètre du GIMELEC, il s’agit cette année du secteur qui se porte le mieux, avec tout de même quelques variations selon les acteurs. Avec l’attentisme engendré par la crise sanitaire, le segment des datacenters de taille modérée est moins dynamique. En revanche, les acteurs les plus importants n’attendent pas !
Caroline Vateau – Les datacenters, à l’instar de la filière numérique, ont eu la chance d’être épargnés par les impacts économiques directs de la crise sanitaire. Les besoins en usages numériques professionnels et grand public ayant étant été renforcés par les mesures de confinement (télétravail massif, télé-éducation, cours en ligne, téléconsultation, achats en ligne…). S’il est vrai que certains chantiers de construction de datacenter ont été ralentis pendant le premier confinement, l’activité ne s’est néanmoins jamais vraiment arrêtée. Tous les acteurs de la filière se sont fortement mobilisés pour permettre un fonctionnement continu des services numériques dans cette période particulière. Par ailleurs, la crise sanitaire engendrée par la Covid-19 a pour conséquence de démontrer le rôle essentiel des infrastructures numériques dans la disponibilité des applications et la continuité des activités de la société. Depuis le début du confinement à ce jour, les plateformes de visioconférence ont connu un pic d’activité sans précédent. Les acteurs clés comme les opérateurs réseau, les fournisseurs de service Internet et cloud, ou opérateurs d’importance vitale (OIV) du numérique ont vu leur trafic connaître une hausse massive. Ces opérateurs se sont fortement mobilisés depuis mars 2020 pour garantir un fonctionnement de l’économie et de la communication tout en intégrant les mesures pour permettre d’endiguer cette épidémie sans précédent.
Du point de vue des infrastructures numériques, dans quelle position se trouve la France vis-à-vis de ses voisins européens ?
Géraldine Camara – La France compte encore parmi les terres d’accueil de datacenters en Europe, mais risque d’être distancée à court terme si rien n’est fait. Paris se situe désormais en cinquième position derrière Francfort, Londres, Amsterdam et maintenant Dublin. À nous de réagir pour ne pas prendre de retard.
Joël Vormus – Nous nous étions plaints, il y a quelques mois, de la rétrogradation de la France dans le classement européen. Historiquement, le Royaume-Uni et l’Irlande étaient les principales terres d’accueil européennes des datacenters pour deux raisons : la plupart des câbles transatlantiques y arrivent et ces pays bénéficient d’une fiscalité intéressante. Deux câbles transatlantiques arrivent en France, l’un à Paris, l’autre à Marseille. Le datacenter est une infrastructure critique et stratégique, ce qui n’encourage pas les acteurs à communiquer. Aujourd’hui, nous constatons un retard structurel par rapport à nos voisins européens, notamment les pays nordiques, qui sont très dynamiques. L’un des problèmes est que la France n’élabore pas de stratégie claire : l’absence de guichet unique, la lourdeur administrative et la diversité des interlocuteurs ne simplifient pas la tâche. La France possède de nombreux avantages, mais encore faut-il alléger les volets administratifs pour donner envie à des entreprises de s’installer.
La France est-elle un pays attractif pour l’accueil de datacenters sur son sol ?
Géraldine Camara – La France a des atouts : énergie décarbonée, qualité des réseaux de télécommunications et du réseau électrique, formations d’excellence, recherche… et des faiblesses, telles que certaines taxes ou charges administratives liées à l’implantation. C’est un constat objectif, que l’on peut établir en se comparant tout simplement à nos voisins européens.
Caroline Vateau – De plus, la France dispose de conditions géographiques et d’un climat favorable à l’utilisation de sources d’énergie renouvelable (free cooling), d’un potentiel foncier important, d’un emplacement idéal vis-à-vis des réseaux télécoms, et surtout de compétences de haut niveau sur tous les métiers du datacenter à même de rivaliser avec les autres pays européens.
Quelle est votre appréciation du parc français aujourd’hui ?
Géraldine Camara – En 2020, nous avons recensé 200 datacenters ou centres numériques dédiés, ainsi que 5 000 salles informatiques hébergées dans les entreprises et les administrations, avec des réalités très diverses selon la taille et le type de datacenter.
Joël Vormus – Difficile d’avoir une image nette de l’ensemble des datacenters installés en France : entre les « petits », « les moyens » et les « gros », il y en aurait plus de 3 000 ! Les seules études proviennent de la Commission européenne ou de l’Agence internationale de l’énergie. On y apprend notamment que les 8 % du parc le plus ancien représentent à eux seuls près de 30 % des consommations.
Caroline Vateau – Le site datacentermap.com recense actuellement 4 730 datacenters de colocation dans le monde dans sa base de données, dont 157 sites pour la France, qui se classe en quatrième position mondiale derrière les États-Unis avec 1 798 sites, le Royaume-Uni avec 271 sites et l’Allemagne, qui compte 217 sites. Ces données sont à compléter par les datacenters internes des entreprises, voire des salles informatiques intégrées dans les bâtiments tertiaires, qui représentent la plus grosse partie des superficies de salles informatiques en France.
Quels sont les enjeux de rénovation du parc existant pour gagner en efficacité énergétique et opérationnelle ?
Géraldine Camara – La rénovation est un enjeu pour une partie du parc français, qui peut y voir une opportunité de gagner en efficacité énergétique.
Joël Vormus – Il y aura toujours des salles informatiques et il y aura toujours de gros et de petits datacenters. Le vrai sujet est celui de la performance énergétique, avec un gros potentiel d’économies sur le parc existant. Les questions sont plus ou moins les mêmes que pour la performance énergétique des bâtiments et la difficulté de toucher le parc diffus. Il faut pour cela structurer la filière et mettre l’accent sur la pédagogie. Dans le secteur public, il serait cohérent de se poser les questions liées aux achats publics. Il existe un guide européen pour encourager les bonnes pratiques, mais il n’est malheureusement pas promu en France. Pour les plus gros datacenters, les adhérents du GIMELEC fournissent des solutions techniques qui ont prouvé leurs performances. Quoi qu’il en soit, il est difficile pour un datacenter rénové d’atteindre les performances des datacenters neufs. Il faut continuer à diffuser la technologie, mais aussi aider à changer les habitudes, grâce à la communication, la formation et la pédagogie. Enfin, il est essentiel de regrouper les acteurs du parc diffus et de comprendre leurs enjeux pour mettre au point une stratégie et des réglementations cohérentes.
Caroline Vateau – Les technologies actuelles permettent de concevoir et construire des datacenters avec de hauts niveaux de performance énergétique et environnementale. La rénovation du parc existant, plus vétuste et moins performant, est un enjeu clé pour que le parc global de datacenters s’inscrive en ligne avec les objectifs nationaux de réduction des émissions de gaz à effet de serre. Tout cela relève d’une analyse technico-économique spécifique à chaque site et contexte. Dans certains cas, il est plus important de migrer vers le cloud ou vers un datacenter de colocation plus performant que de rénover des infrastructures existantes.
Quels sont les atouts du Edge computing pour contribuer à la réduction des consommations ?
Géraldine Camara – Le Edge computing peut permettre de réduire les distances parcourues et de ce fait, de réduire les consommations énergétiques et l’impact environnemental.
Joël Vormus – Je pense qu’il y aura toujours une cohabitation entre des gros, des moyens et des petits datacenters. Il est possible de faire une analogie avec les enseignes de distribution qui, pour mailler le territoire et les zones urbaines, disposent de réseaux d’hypermarchés, de supermarchés et de magasins de proximité complémentaires. Ce que l’on appelle le Edge, c’est-à-dire les petites installations diffuses, qui doivent tout de même être bien gérées pour être performantes. Le Edge peut donc être une solution, notamment dans l’industrie avec l’avènement de la 5G, mais peut aussi être un poids, s’il n’est pas correctement exploité et maintenu.
Caroline Vateau – Le Edge computing se définit donc comme une architecture informatique, dans laquelle les ressources informatiques sont maintenues au plus près de là où elles sont générées. Ces datacenters de proximité permettent de répondre aux exigences de faible latence induites par les nouveaux. La contribution à la réduction des consommations n’est pas établie à l’échelle globale, car le déploiement du Edge computing risque d’induire des effets rebonds liés à de nouveaux usages et de nouveaux besoins en terminaux. D’un autre côté, dans certaines situations, ces nouveaux usages pourront permettre de réduire les consommations dans d’autres secteurs d’activité. Il sera intéressant de conditionner le déploiement du Edge computing à des critères de performance environnementale et de comparer les impacts générés aux impacts évités associés aux nouveaux usages.
Quelles technologies permettent de répondre au mieux à ces enjeux ?
Géraldine Camara – Si la question porte sur les enjeux environnementaux, alors oui, les technologies telles que la maintenance prédictive ou l’intelligence artificielle pourront permettre de répondre à ces enjeux, mais elles le feront progressivement.
Joël Vormus – Les alimentations sans interruption (plus connues sous le terme anglais d’UPS), qui constituent le cœur de l’alimentation des datacenters en électricité, sont désormais très efficaces et matures. Au-delà de sécuriser le datacenter, elles permettent désormais de fournir des services au réseau. La migration des technologies plomb-acide vers les technologies lithium-ion, qui offrent une meilleure densité énergétique, constitue une avancée, et représente environ 30 % des solutions installées. Les GAFA ont pour ambition de créer des datacenters 100 % renouvelables à tout moment, ce qui nécessitera l’intégration de batteries pour stocker et restituer les énergies renouvelables variables (solaire et éolien) lors des creux ou des pics de production. Les datacenters peuvent donc s’inscrire au centre de Smart Grids, ce qui constitue la prochaine étape de leur développement. D’autre part, les solutions DCIM (Datacenter infrastructure management) combinées à l’intelligence artificielle permettent une optimisation du fonctionnement et des consommations grâce à des logiciels. Mais dans toutes ces technologies, il ne faut pas oublier la place de l’humain, dont dépend tout de même de la bonne gestion. Par ailleurs, le GIMELEC traite également les sujets liés à l’économie circulaire, avec l’amélioration des services liés aux solutions et la durabilité des équipements. Une part conséquente du chiffre d’affaires de nos clients concerne les services relatifs aux équipements, notamment le remanufacturing. Enfin, il y a une vraie logique à mettre en place pour faire valoir ces bonnes pratiques lors des processus d’achats publics.
Caroline Vateau – Avant de considérer toute technologie, il convient de se positionner dans une approche de sobriété numérique à tous les niveaux de la chaîne de valeur : éviter le surdimensionnement, éviter « l’infobésité » et sensibiliser les utilisateurs afin qu’ils aient un usage raisonné des services numériques. En complément, l’un des leviers est le développement de modèles économiques qui incitent à la sobriété et non pas à une consommation illimitée. Les potentiels de calcul et de stockage peuvent paraître illimités, il faut garder à l’esprit que les ressources et matières premières de notre planète ne le sont pas. Concernant l’approche technologique, toute nouvelle technologie devrait pouvoir témoigner de son efficacité environnementale avant son déploiement massif.
En dehors de la gestion technique des datacenters, quelles sont les bonnes pratiques à l’usage pour les gestionnaires ?
Géraldine Camara – Sur le plan environnemental, le confinement des allées et l’utilisation du free cooling sont des bonnes pratiques à l’œuvre depuis longtemps dans le secteur. D’autres pratiques se développent, telles que l’économie circulaire avec le recyclage des serveurs, l’investissement ou l’utilisation d’énergies renouvelables, la récupération de la chaleur fatale, l’information aux clients, la formation aux bonnes pratiques d’exploitation, la mise en place de normes ISO, la limitation de gaz à effet de serre… La filière datacenter est extrêmement innovante en la matière et force de proposition dans la recherche de solutions. Elle doit être soutenue en ce sens par les pouvoirs publics.
Joël Vormus – Les bonnes pratiques sont pour la plupart répertoriées dans le code de conduite européen, avec un travail mené depuis 10 ans par le JRC (Centre commun de recherche européen), l’organe de recherche de la Commission européenne. Ce guide de bonne conduite compte une centaine de préconisations pour l’exploitation des datacenters. Dans la loi de finances 2021, les pouvoirs publics ont mis en place une éco-conditionnalité entre le plafonnement de la TICFE et l’adhésion au code de conduite européen. Pour modérer les propos de certains, le secteur a beaucoup normalisé sur la partie hardware, mais beaucoup reste à faire au niveau des softwares. Il est important pour un tel sujet d’adopter une logique holistique, en s’adressant équitablement à l’ensemble de la chaîne de valeur.
Caroline Vateau – Il faut savoir que bon nombre de bonnes pratiques de performance environnementale des datacenters sont détaillées dans le code de conduite européen des datacenters. La performance environnementale des datacenters repose sur quatre piliers complémentaires : la conception et/ou réhabilitation qui valorise au maximum les ressources renouvelables, la conduite et le pilotage de l’environnement technique pour garantir la performance énergétique, la gestion du parc informatique et des services hébergés pour finir le pilotage et le suivi d’indicateurs environnementaux qui doit se déployer à tous les niveaux : environnement technique, IT et cloud. Il est essentiel d’avoir des indicateurs d’impact environnementaux qui évaluent non seulement la performance énergétique, mais également l’ensemble de l’empreinte environnementale de ces ouvrages, en intégrant toutes les étapes du cycle de vie de la multitude des équipements qui le composent. C’est le concept de l’analyse du cycle de vie appliqué à la partie centralisée du système d’informations. Il faut également avoir à l’esprit que le surdimensionnement, qui peut exister à tous les niveaux (datacenter, cloud, application, usage), a d’importants impacts sur l’environnement. En effet, le fonctionnement de ces services requiert la fabrication d’équipements électroniques. Il faudrait mettre en cohérence les ressources déployées face au besoin réel. Pour finir, toute stratégie de réduction des impacts environnementaux doit impliquer l’ensemble des parties prenantes. Il est essentiel que les différents acteurs soient suffisamment sensibilisés et formés et qu’ils s’inscrivent pleinement dans cette démarche globale.
Les acteurs du datacenter ont montré un certain volontarisme ces dernières années. Comment cela se traduit-il dans les chiffres ?
Géraldine Camara – Si vous parlez du développement du secteur, celui-ci suit aussi l’accroissement des besoins des territoires, des populations, des entreprises et de l’administration.
Joël Vormus – En France, l’expertise publique et les données disponibles demeurent réduites, donc pas de valeurs à l’échelle du pays, mais on dispose de plus de visibilité aux niveaux européen et mondial. Il y a dix ans, tous les experts prédisaient ainsi une explosion des consommations d’énergie liées aux datacenters. Ces derniers constatent aujourd’hui une légère hausse, autour de 5 %, entre 2010 et aujourd’hui. À mettre en perspective avec la multiplication par 10 à 20 du trafic mondial de données.
Caroline Vateau – Contrairement aux idées reçues, les datacenters représentent moins d’un quart des émissions de gaz à effet de serre du numérique. En effet, entre 2010 et 2018, il y a eu une multiplication par 25 des capacités de stockage, une multiplication par 10 du trafic Internet, une multiplication par 6 des instances de calcul. Dans ce même laps de temps, la consommation électrique des datacenters n’a augmenté que de 6 %. Cela est dû aux nombreux efforts consentis par les acteurs du datacenter. Pour commencer, l’efficacité énergétique du matériel s’est considérablement améliorée. D’autre part, elle reflète le passage progressif des anciens centres de données inefficacement exploités à des datacenters aux normes environnementales actuelles. Pour finir, le recours aux techniques de refroidissement telles que le free cooling (utilisation de l’air frais pour le refroidissement des salles informatiques) ont permis aux datacenters d’atteindre des niveaux de performance remarquables.
Selon vos estimations, quel sera l’impact de la 5G ou de la digitalisation de la société sur les besoins en infrastructures numériques ?
Géraldine Camara – La 5G est bien entendu une tendance qui va accélérer les usages et les besoins en datacenters.
Joël Vormus – L’infrastructure pourra y répondre, car elle s’adaptera toujours aux besoins. La question est donc davantage liée aux besoins. La 5G présente une réelle valeur ajoutée dans l’industrie, où elle a une vraie pertinence économique et environnementale. La question est plutôt : que veut-on faire de la 5G ? Comme aujourd’hui nous ne disposons d’aucun chiffre, chacun adopte une position dogmatique. Il nous faut aujourd’hui des données et des moyens pour financer la recherche.
Caroline Vateau – Si les premiers déploiements de la 5G ont débuté en 2020, le plein potentiel de la 5G ne devrait apparaître qu’à l’horizon 2023. Cependant, il est clair qu’avec la 5 G le trafic des données va connaître une croissance immense qui devrait, par extension, augmenter les besoins d’infrastructures de datacenters plus proches du réseau et des utilisateurs, les datacenters Edge, et également inciter au renouvellement massif des terminaux.
Quelles seront les principales évolutions à venir pour le marché des datacenters en France dans les cinq années à venir ?
Géraldine Camara – Nous en voyons cinq : la 5G et le développement du Edge computing, la croissance du cloud, le développement du prédictif, le développement des nouveaux systèmes de refroidissement et bien entendu, les défis au regard de l’environnement. Dans ce cadre, chaque type de datacenter a sa raison d’être dans l’économie numérique : grands datacenters pour mutualiser les serveurs, Edge computing au plus près des territoires…
Joël Vormus – La principale évolution sera probablement l’arrivée des GAFA sur le sol français avec des datacenters en propre, car ils passent aujourd’hui principalement par la colocation. D’autre part, nous pouvons espérer un projet européen, à l’image de l’Airbus des batteries, pour développer la souveraineté technologique européenne. Le sujet de la cybersécurité devrait également continuer à prendre de l’ampleur. Il faut que le datacenter soit considéré à la hauteur de son rôle sur l’environnement, l’économie, la souveraineté et la sécurité. La France doit s’organiser pour bien considérer ces différents éléments du puzzle IT. Nous appelons de nos vœux une vision transversale de la part des pouvoirs publics.
Caroline Vateau – Le marché mondial des datacenters devrait enregistrer une croissance de 14 % en 2021. De plus, selon les prévisions, le marché mondial des datacenters atteindra 251 milliards de dollars entre 2021 et 2026[1]. Ce marché a connu une augmentation significative depuis l’apparition de la pandémie. D’autre part, nous assisterons de plus en plus à la relocalisation des données des entreprises et organisations en France, afin de répondre aux questions liées à la souveraineté des données. Cela s’accompagnera de la construction de nouveaux sites en Europe et en France et l’émergence d’acteurs du cloud public à même de rivaliser avec les plus grands acteurs américains. Par ailleurs, avec le déploiement progressif de la 5G, le marché des datacenters Edge connaîtra une croissance forte, sans pour autant éclipser celui des datacenters centralisés, des datacenters classiques et des datacenters hyperscale (au-delà de 10 000 m2 de surface) des GAFAM.
Quels seront les grands chantiers et les temps forts de l’AGIT et de France Datacenter cette année ?
Géraldine Camara – France Datacenter est une organisation qui prend de l’ampleur et continuera d’en prendre dans les prochains mois compte tenu du contexte : avec des relations de plus en plus étroites avec les pouvoirs publics, à qui nous délivrons l’expertise et les connaissances les plus justes sur le secteur, avec une quinzaine de groupes de travail actifs dans des domaines considérés comme prioritaires pour nos adhérents, avec des antennes régionales qui se mobilisent… Nos chantiers 2021 sont les déclinaisons des axes de notre plan stratégique Ambition 2025, à savoir, l’attractivité des métiers du datacenter, la résilience des infrastructures (cybersécurité…), l’environnement, la compétitivité. Pour ce qui est des temps forts, outre notre assemblée générale, et nos rendez-vous digitaux qui ont désormais lieu quasiment tous les mois, nous organisons deux événements majeurs en juin et en septembre, qui nous permettent de rassembler la filière et de faire intervenir les pouvoirs publics. Nous invitons tous ceux qui sont intéressés par l’actualité du datacenter à nous suivre sur notre site Internet ainsi que sur les réseaux sociaux !
Joël Vormus – Le GIMELEC suivra avec attention les travaux et décisions européens, extrêmement structurants pour le secteur. Nous continuerons à suivre les travaux de la Commission et à intervenir auprès des pouvoirs publics français sur les sujets liés à l’énergie et aux réseaux. Nous rêvons enfin d’une expérimentation sur la flexibilité du datacenter en France, à l’image de ce que Google souhaite réaliser en Belgique.
Caroline Vateau – À l’AGIT, notre principal chantier cette année sur la thématique du datacenter est la publication du livre blanc actuellement en cours d’écriture et qui synthétisera l’ensemble des travaux du groupe de travail « Datacenter, levier de la transition écologique », piloté par l’AGIT. Ce groupe de travail met autour de la table les acteurs du datacenter, notamment les bureaux d’ingénierie, les chercheurs universitaires et industriels, les fournisseurs d’énergie, les exploitants de datacenter, les hébergeurs, les fournisseurs de solutions de pilotage énergétique. Ce groupe de travail vise à mettre en lumière des solutions concrètes pour réduire significativement l’empreinte environnementale du datacenter et montrer dans quelle mesure il peut être la première brique du numérique responsable. Ce groupe de travail s’emploie à promouvoir les bonnes pratiques environnementales issues des retours d’expériences de ses membres, et la communication aussi bien sur les enjeux environnementaux du datacenter que sur ses externalités positives (digitalisation des territoires, récupération de la chaleur, création d’emplois, entre autres) à l’endroit du grand public et des autorités.
Propos recueillis par Alexandre Arène