Pour mettre en lumière le quartier historique Saint-Nicolas, au Mans, l’Atelier Coup d’Éclat s’est inspiré du mythe d’Ariane. Rendu aux piétons en 2008, après l’aménagement de la première ligne de tramway, le quartier n’avait pas connu de rénovation. La municipalité mancelle entreprend d’y remédier dix ans plus tard, incluant un plan lumière, dont la première phase s’est achevée en 2019.
Située à la confluence des rivières de la Sarthe et de l’Huisne, Le Mans, labellisée Ville d’art et d’histoire, a entrepris le réaménagement complet du quartier Saint-Nicolas. « Ces travaux, explique Élodie Gourrier, du service de l’Aménagement urbain à la direction du Développement urbain, concernent aussi bien les revêtements que le mobilier urbain, les plantations et, bien sûr, l’éclairage. » Ce dernier n’avait pas été modifié depuis la piétonnisation du quartier et n’était plus du tout adapté à la configuration actuelle. De plus, il fonctionnait avec des appliques équipées de sources traditionnelles très énergivores. « Nous avons lancé un appel d’offres et c’est l’agence Coup d’Éclat qui a été retenue : Florian Colin était déjà intervenu sur l’éclairage public dans la commune d’Arnage, nous connaissions donc déjà sa manière de travailler, même si pour ce projet, le contexte était différent car le quartier Saint-Nicolas comprend de nombreuses rues commerçantes, et il est entouré de places historiques comme la place de la République et celle des Jacobins. Nous avons demandé d’ailleurs à Florian Colin de prendre en compte cette configuration afin que le concept d’éclairage connecte ces lieux au quartier. »
Des deux scénarios proposés, la municipalité retient l’idée des caténaires avec de petits modules faits sur mesure. « Une fois que nous avons approuvé l’esthétique, le rendu, et la technique, notre service a pris le relais pour faire appel aux entreprises et assurer le suivi des travaux, ajoute Élodie Gourrier. Ainsi, trois rues et une place ont été rénovées, les autres phases devant se poursuivre jusqu’en 2024. En tout, sont concernés quinze rues et trois places ou squares, éclairés dans des ambiances intimistes par des colonnes lumineuses. Il est aussi question de travailler l’éclairage des portes d’entrée du quartier comme des “appels lumineux”. »
Le service de l’Aménagement urbain souhaitait des luminaires discrets et une mise en lumière efficace, qui évite les nuisances lumineuses conformément à l’arrêté de décembre 2018, avec une certaine homogénéité et vraiment dédiée aux piétons. « Les échanges avec Florian Colin ont été très fructueux et ses propositions ont bien répondu à nos attentes. »
Du diagnostic au plan lumière
« Dans un premier temps, explique Florian Colin, nous avons procédé à une analyse sensible de l’existant (contrastes, luminances, pollutions…), puis avons conçu notre plan lumière en tenant compte de la géographie du quartier, de ses usages et temporalités. »
Le quartier est très enclavé entre les deux places, un peu comme un canyon traversé par des rues assez étroites de 3 à 9 m de large, qui créent comme un labyrinthe. C’est cette configuration particulière qui a donné la première idée (et celle retenue par la ville) au concepteur lumière, qui a imaginé un concept sur la base du mythe d’Ariane. « Étymologiquement, Ariane signifie rendre agréable et dans la mythologie grecque, raconte Florian Colin, le fil d’Ariane permet à Thésée de retrouver son chemin dans le labyrinthe après avoir affronté le Minotaure. Notre concept lumière s’inspire de ce classique pour proposer une lecture nocturne du quartier Saint-Nicolas à la fois pragmatique, amène et poétique. »
Dans la mise en œuvre de cette première phase, une nappe de lumière douce et confortable accompagne les cheminements sans aucune nuisance lumineuse (façade ou ciel). La multiplication de discrets luminaires fabriqués sur mesure permet de réduire considérablement les luminances et dans le même geste, de marquer l’axe historique de la place de la République à la place des Jacobins, par une ponctuation colorée, à la fois guide et repère.
Au fil de la déambulation,
des créations lumières
L’éclairage par caténaire répondait à une double exigence pratique : conserver l’emprise au sol libre – l’histoire avait montré que le rayonnement des appliques créait des gênes chez les riverains et diffusait la lumière au mauvais endroit – et obtenir une répartition lumineuse sur toute la largeur de l’espace. « Nous avons redessiné des optiques propres à chaque appareil, précise Florian Colin : ceux des extrémités, c’est-à-dire au plus près des façades, ont des optiques asymétriques qui éclairent le centre de la chaussée, et ceux disposés au milieu ont des optiques qui éclairent les côtés, évitant ainsi la lumière perdue vers les façades ou les commerces. Les appareils sont installés à une distance les uns des autres de 15 m au minimum. »
À l’origine, cet appareil (ID d’Ewo) de 15 cm de long seulement, a été conçu pour éclairer les mains courantes des escaliers et des garde-corps. Il peut recevoir 2, 3 ou 4 LED (25 W environ). Doté d’une enveloppe en Inox brossé, il devient le Mutz, discret une fois installé. « Nous avons choisi une teinte chaude de 2 700 K pour le blanc et le turquoise pour la couleur ponctuelle », ajoute le concepteur lumière. Sur les places, des objets lumineux invitent les passants à « toucher » la lumière qui émane des colonnes ajourées de Technilum, transformées en pentagones. Pourquoi 5 faces ? La raison en est simple : arrivant de n’importe laquelle des six rues, le promeneur aperçoit forcément une des facettes des trois colonnes au lieu d’une arête. C’est Le Mans Métropole qui a choisi le motif dont on retrouve les contours sur le sol de la place. Enfin, sept seuils ont été identifiés pour marquer les entrées du quartier qui seront signalées par un « objet nocturne identifiable » (ONI). L’élaboration d’un cahier des charges pour chacun d’eux est en cours. À suivre…