BOS, hypervision, peu importe le concept, pourvu qu’on ait les bonnes datas au bon endroit et au bon moment
« La GTB et la supervision évoluent de plus en plus rapidement vers des offres globales de services aux usagers et intègrent des solutions complètes, et notamment du monde numérique et de l’IoT », introduit Prudence Soto, directrice générale de Sauter Régulation SAS. « En tant que “fabricant” de solutions, nous avons anticipé ce changement de paradigme : les projets ne sont plus centrés sur le bâtiment mais centrés sur les occupants et exploitants. Nous sommes force de proposition pour mettre à disposition une véritable plateforme de services avec nos propres solutions, produits ou services tiers. Avec des solutions à la carte : de la GTB, de la GMAO, de la télégestion, de l’hypervision, du suivi énergétique ou la solution “Mobile Building Services” permettant à l’occupant de gérer ses paramètres de confort via son smartphone, où qu’il soit. Pour citer d’autres exemples précis, nous réalisons des solutions interopérables avec des systèmes de gestion de réservation de chambres d’hôtel pour une optimisation énergétique ou interopérables avec des applications smartphone développées par ou pour des sociétés de Property Management pour leurs occupants. »
« Avec le lancement en 2012 du superviseur full Web SVC (Sauter Vision Center), notre groupe a fait le choix de mettre à disposition des clients, et au format standard API REST, toutes les données de la GTB, poursuit l’experte. Toute société développant des applicatifs externes peut ainsi utiliser les données via ce standard API REST sous réserve d’une autorisation du “propriétaire” des données. Ces sociétés qui développent des Apps de “Services à l’occupant” peuvent avoir besoin d’une structuration de données, et dans ce cas, nous proposons aussi la mise en place des données de GTB sous forme structurée au sein d’une plateforme IoT dédiée, en Cloud grâce à notre partenariat avec la société Overkiz. »
Cette approche se retrouve aussi chez les éditeurs de solutions de supervision « agnostiques » comme Codra. « Nos clients intégrateurs utilisent la plateforme de supervision Panorama pour piloter un ou plusieurs lots de bâtiments (GTE/DI/CVC), mais aussi pour réaliser des applications plus complètes (GTB/GTC) au service des usagers. Pour les projets multisites, la scalabilité de la plateforme permet de réaliser des applications d’hypervision. Dans tous les cas, la connectivité est un enjeu important et il est possible de réaliser dans une même application une acquisition de données hétérogènes. Elle peut provenir d’automates, d’objets connectés (IoT) ou de systèmes de télégestion. Notre plateforme agit comme un véritable catalyseur pour le Bâtiment Intelligent », détaille Loïc Drugeault, responsable marketing de l’éditeur Codra.
Avec l’augmentation massive de la volumétrie des données, il est important de disposer d’un outil efficace, capable de gérer cette masse de données et d’en exploiter l’information.
Fini le synoptique multicolore d’il y a quelques années, avec toutes les informations qui clignotent. Avec cette augmentation très importante de données, ce n’est plus possible. Le design d’application pour améliorer l’expérience utilisateur prend maintenant tout son sens. Il faut aujourd’hui savoir comment présenter la bonne donnée, au bon moment, de façon simple pour que l’utilisateur, qu’il soit rondier sur son mobile, mainteneur ou encore responsable sécurité incendie, puisse avoir une réaction rapide et adéquate. Ajoutons aussi qu’il fait sens d’avoir dans un même outil des données par exemple issues du contrôle d’accès, de la sécurité incendie ou de la vidéosurveillance. « En cas d’accès non identifié, il est ainsi possible de coupler les systèmes avec la supervision pour effectuer par exemple une levée de doutes », illustre Loïc Drugeault.
En parallèle, « nos clients intégrateurs, grâce à leur projet, nous ont permis de faire évoluer nos solutions en simplifiant au maximum le travail de paramétrage ou accéder à une TMA évolutive simple de l’application ».
La puissance informatique et la démultiplication des données ont changé la donne. La colonne vertébrale que constitue la supervision permet de s’appuyer sur une solution éprouvée tout en permettant une exploitation fiable et efficiente du bâtiment, mais aussi des interactions avec son environnement proche. Aujourd’hui son quartier, et demain la ville.
« Sur l’existant notamment, l’idée n’est pas non plus de tout révolutionner. On peut procéder étape par étape pour faire en sorte d’envoyer l’information là où on en a besoin. Pour cela, on préconise le plus souvent de mettre un serveur d’intelligence ouvert et adapté au contexte et capable d’évoluer dans le temps. Ce serveur agit comme un rond-point d’informations pour dispatcher les bonnes informations vers les bons applicatifs », explique Sylvain Massin, responsable d’affaires dédié Systèmes au sein de Cegelec 3S.
Le métier de l’intégrateur en ce sens a donc beaucoup évolué, il s’agit de récupérer les datas du bâtiment et de les exploiter au plus simple pour mettre en œuvre les services ad hoc pour le client.
Qui veut gagner le « gros lot »… Smart ?
« Pour faire un bâtiment smart, on ne peut plus limiter la réflexion aux régulations et à des remontées d’informations par lot, vers un ou des superviseurs locaux qui vont réaliser un optimum local, parfois éloigné de l’usage réel du bâtiment. On commence ainsi à voir émerger, surtout sur les gros projets, la notion de lot “système ou smart”, un lot pas forcément conséquent mais qui est transversal et qui va définir le serveur de données intelligent permettant de répondre à des services, et non plus à des optimums par lot », explique l’expert de Cegelec 3S.
Un point clé car ce lot système ou smart est aussi coordinateur, et ce n’est pas faire un projet moins cher que de le penser et prévoir dès les premières étapes.
Des données, mais pour quels services ?
Les données doivent circuler pour l’efficience du bâtiment, c’est-à-dire sur trois points principaux. « En premier lieu, il y a les économies d’énergie et on peut très vite réaliser sur un bâtiment classique de 20 à 30 % en maîtrisant le bâtiment et en l’optimisant finement. Vannes thermostatiques, objets connectés de détection de présence, détection d’ouverture de fenêtre, les éléments que l’on peut ajouter créent de la valeur avec un ROI rapide », illustre l’expert de Cegelec 3S.
En deuxième lieu, il s’agit d’améliorer la gestion de la maintenance et de limiter les problématiques de pannes intempestives, qui auraient pu être évitées avec une analyse plus fine des situations, et demain avec l’intelligence artificielle insérée dans une GMAO ou dans un module complémentaire de la solution de supervision.
En troisième lieu, il s’agit d’optimiser l’espace occupé : détection de présence, capteurs multiples, traceurs de flux de déplacement, la palette est large pour faire en sorte que le confort soit apporté de façon optimale là où on en a besoin, tout en optimisant l’espace.
« Prenons le cas de la réservation d’un grand amphi pouvant accueillir jusqu’à 500 personnes. S’il est réservé en hiver et seulement pour 10 personnes présentes, une petite salle est suffisante », illustre Sylvain Massin, de Cegelec. Gérer l’inoccupation est un premier pas, le second pas est souvent de gérer les usages avec non seulement des comptages énergétiques, mais aussi de la présence humaine.
Comment se protéger de menaces ou vols de données ?
« La sécurité des données doit être à tous les niveaux, depuis les couches dites basses jusqu’à la supervision, l’hypervision et les applicatifs externes dans le cloud, précise Prudence Soto, de Sauter Regulation. La passerelle vers l’extérieur est souvent un automate particulier qui intègre un Web server et les solutions VPN sont utilisées avec cryptage pour les échanges de données entre les sites distants et la supervision, voire plus généralement entre les flux de données vers le cloud et le bâtiment. Par exemple, la dernière gamme d’automate Sauter modulo6 dispose d’une interface réseau entièrement indépendante du réseau du bâtiment et forme ainsi une sorte de “pare-feu” entre l’IoT et le réseau du bâtiment, répondant ainsi aux impératifs de cybersécurité grâce à sa conception selon le standard international IEC 62443 et au protocole standard BACnet/SC (BACnet Secure Connect). »
En ce qui concerne la cybersécurité, pour la partie supervision et hypervision proprement dite, l’éditeur Codra est aujourd’hui le seul éditeur à avoir passé la certification CSPN auprès de l’ANSSI. « Ce qui revient à utiliser un logiciel intégrant nativement des fonctions de cybersécurité avancées. La solution de supervision étant un point central du projet, il est essentiel d’utiliser un outil ajustable aux enjeux de cybersécurité du client. Nos clients intégrateurs l’ont bien compris et l’on constate une forte montée en puissance de notre formation sur la cybersécurité », ajoute Loïc Drugeault, de Codra.
L’intelligence artificielle se nourrit des données
Le document « Intelligence artificielle : agissons ensemble pour des bâtiments performants », édité par le Gimelec, est présenté sous forme de manifeste à destination de l’ensemble des acteurs de la construction (études, intégration IT, installation, exploitation, maintenance). « Nous y avons apporté notre pierre et le document met en exergue l’importance des données, et leurs usages avec des exemples dans des applicatifs d’IA déjà existants », indique Prudence Soto.
De fait, l’IA apporte d’ores et déjà des aides cognitives pour simplifier l’interface homme-machine (reconnaissance vocale, identification des défauts et assistance, etc.), mais aussi prédictives (par exemple anticipation des préférences des occupants, prévisions de consommation ou de production d’énergie, maintenance), et également des fonctions d’aide au décisionnel (aide à l’établissement de budgets, à l’évaluation de la performance immobilière, etc.).
Les données, qui sont le « carburant » des moteurs d’IA, sont de quatre ordres : les données structurelles du bâtiment (métadonnées mises à jour tout au long de la vie du bâtiment), les données opérationnelles temps réel issues des systèmes techniques, les données en provenance des usagers (état, position… et leurs souhaits), et les données qui inscrivent le bâtiment dans le contexte plus large d’un quartier, d’une ville (autres bâtiments, état du réseau d’électricité, transports…).
Tout n’est pas indispensable, et on peut y aller pas à pas, mais une base de données fiable, standard et évolutive est cruciale, par exemple SQL, ajoute l’experte.
« Si l’on veut réussir son projet d’intégration et la ges- tion des données du bâtiment, il convient d’avoir une approche terre à terre et par étape, et sans complexité », ajoute Sylvain Massin. On peut par exemple commencer par des régulations par bureaux, puis y ajouter l’intrusion et des scénarios en remontant les données issues des différents points ou objets connectés.
C’est en tout cas l’intégrateur qui a les clés pour réussir un bâtiment communicant et évolutif, permettant d’apporter par étape des palettes de services utiles en s’appuyant sur les connexions aux différents protocoles et réseaux et équipements électronumériques. Le choix de l’intégrateur est donc déterminant, et ses compétences informatiques et réseau sont primordiales pour mettre l’intelligence au bon endroit, et garantir fiabilité et évolutivité des solutions ainsi qu’une gestion ad hoc des données du bâtiment.
Jean-François Moreau