L’association Équilibre des Énergies (EdEn) regroupe une cinquantaine d’acteurs du monde de l’énergie, de la construction, de la mobilité, de l’industrie ainsi que des représentants des consommateurs et d’organisations professionnelles. Créée en 2011, son objectif est de proposer des solutions pour construire une société énergétique meilleure.
Qu’entendez-vous chez EdEn par « Construire une société énergétique meilleure » ?
Jean-Pierre Hauet – C’est une société énergétique qui respecte davantage l’environnement et veille à la bonne utilisation des ressources naturelles. Face à l’urgence climatique, notre priorité est évidemment la décarbonation. Nos travaux s’articulent donc autour du bâtiment, le plus gros émetteur de gaz à effet de serre, mais aussi de la mobilité et du système énergétique. La décarbonation est un défi considérable, une véritable rupture. Mais nous croyons qu’il est possible d’y parvenir et proposons des solutions appropriées aux différents domaines. Dans le bâtiment par exemple, nous sommes heureux que la nouvelle réglementation environnementale (la RE 2020) prenne en compte non seulement les consommations d’énergie mais aussi les émissions de gaz à effet de serre. En revanche, nous regrettons que la réglementation exprime encore pour l’instant les objectifs en énergie primaire, alors que l’énergie finale est un indicateur infiniment plus pertinent.
De quelle manière l’énergie peut-elle être davantage décarbonée selon EdEn ?
J.-P. H. – Décarboner l’énergie peut se faire assez facilement en acceptant de donner davantage de place à l’énergie électrique, aujourd’hui pénalisée par le coefficient de conversion en énergie primaire de 2,58. La réglementation fait souvent obstacle à l’électricité et dans le bâtiment, la compétition entre le gaz et l’électricité, vieille de 50 ans, ne se fait pas aujourd’hui de façon équitable. Nous ne voulons pas tuer le gaz mais nous voulons privilégier les solutions neutres en carbone. Un logement neuf chauffé au gaz émet 12 kg de CO2 par m² et par an, contre environ 3 kg/m².an pour un logement chauffé à l’électricité. Il faut que le gaz suive cette voie, au besoin par des solutions hybrides. Il est essentiel pour cela que la réglementation trouve les bons indicateurs pour favoriser le développement de bâtiments vertueux. Dans la directive européenne de performance énergétique des bâtiments (DPEB), la question du carbone est faiblement traitée. Nous pensons qu’il faut que la réglementation nationale introduise deux indicateurs bien distincts, l’un pour la phase de construction, l’autre pour la phase d’exploitation pour prendre en compte cet élément, et la réglementation carbone doit avoir, a minima, la même importance que celle de l’énergie.
Comment est-il possible de décarboner le parc de bâtiments existants ?
J.-P. H. – Nous avons réalisé une étude sur la décarbonation du parc existant dont les conclusions ont été publiées dans EdenMag. Dans le secteur résidentiel, il y a un énorme effort de rénovation du bâti à effectuer, à hauteur de 600 milliards d’euros sur 30 ans pour réduire les consommations de l’ordre de 55 %. Ensuite, il faut promouvoir des solutions décarbonées et notamment développer massivement les pompes à chaleur. Il faut bien choisir les priorités, et le critère CO2 est le plus pertinent car il intègre différents aspects, y compris la précarité énergétique des ménages les plus modestes.
De quelle manière EdEn participe au débat sur ces sujets et favorise l’élaboration d’une réglementation plus vertueuse ?
J.-P. H. – Nous sommes reconnus comme une des associations qui mène des analyses pertinentes sur le sujet énergétique. Nous sommes en contact régulier avec l’administration et les élus pour les éclairer sur ces sujets et aider à l’évolution de l’arsenal législatif. Nous sommes favorables à l’électricité mais plus généralement à toutes les solutions décarbonées car notre objectif est de prendre en compte l’intérêt général et de réfléchir à des solutions minimisant l’impact environnemental du système énergétique, quelle qu’en soit la source.
Propos Recueillis par Alexandre Arène