L’automatisation du bâtiment a pris le virage de la révolution numérique, les capacités numériques et de mise en réseau ont permis ce premier pas important. Conception, construction, usage et exploitation vivent un tournant sans précédent. Et demain, les « Deep Machine Learning » ou « intelligence artificielle » seront-ils les prémices de systèmes de plus en plus autonomes, apprenants, capables d’automatiser au-delà de nos limites actuelles ?
Une réflexion globale des maîtres d’ouvrage est engagée
« La réflexion concerne le plus souvent l’ensemble du parc immobilier de nos clients. Ils ne mettent évidemment pas les mêmes moyens sur le neuf et l’existant, et fréquemment, le neuf sert de “laboratoire pilote” et de vitrine pour déployer ensuite des solutions sur l’existant », introduit Najib Goual, account manager de Schneider Electric en charge du développement des Smart Buildings auprès des promoteurs et investisseurs immobiliers.
Digitaliser un bâtiment de 10 ou 15 ans d’âge est possible, et ce, sans nécessairement des modifications lourdes de l’infrastructure existante. « Avec un premier objectif de valorisation des actifs par les usages, tout en limitant l’impact environnemental du bâtiment, et cette volonté s’est développée de façon forte depuis un peu plus de deux ans », poursuit-il.
« IP, véritable 4e fluide du bâtiment, permet cette ouverture et la GTB peut fédérer ainsi l’ensemble des données du bâtiment. La conceptualisation de la “smartisation” est aidée par les nouveaux labels comme R2S, avec le but de créer un socle digital le plus complet possible, qui va valoriser les données par de nouveaux usages. Notre plateforme ouverte EcoStruxure embarque par exemple nativement des Webservices afin de garantir une parfaite interopérabilité vers des applications de gestion très diverses – par exemple salle fitness, cantine, données de comptage de flux… – EcoStruxure le cœur de ce socle numérique », explique Jean-Baptiste Griffon, consultant Smart Building pour Schneider Electric et en charge de l’optimisation des bâtiments existants.
« Pour nos clients, Schneider Electric est un partenaire technologique privilégié qui les accompagne dès le début de leur réflexion pour valoriser leurs bâtiments existants ; les systèmes mis en place permettent de réaliser des échanges de façon très variée avec des applications externes dans le cloud, ou bien encore de réaliser un pilotage intelligent et optimisé en local s’appuyant sur des capteurs intelligents ou des objets connectés », complète Najib Goual.
« Dans cette logique, nous les soutenons en tout premier lieu dans l’établissement d’un état des lieux de maturité digitale, s’appuyant sur une méthodologie structurée mais adaptable à chaque contexte de bâtiment. Comment améliorer la productivité et le confort des usagers et employés ? Comment optimiser les mètres carrés, le tout dans une logique de transition énergétique environnementale ? Les réponses peuvent conduire à “smartiser la GTB existante” en affinant le confort local et les services, mais aussi à utiliser la base de données unifiée de la GTB pour servir à d’autres niveaux et, par exemple, pour alimenter des systèmes dans le cloud basé sur l’IA, permettant d’effectuer la maintenance préventive des matériels critiques du bâtiment », illustre Jean-Baptiste Griffon.
Le numérique modifie en profondeur la R&D des fabricants d’automatismes et leurs solutions
« Jusqu’à la fin des années 2000, la R&D de Sauter AG était principalement axée sur le développement hardware des automates et des actionneurs. Désormais, les effectifs de R&D sont composés pour plus des 2/3 de développeurs software, à la fois pour les logiciels applicatifs, les gestions des protocoles réseau et la sécurité », explique le docteur Felix Gassmann, directeur informatique et technologie (CTO) au sein du groupe Sauter AG.
La croissance quasi explosive de la puissance de calcul, la miniaturisation de la densité de stockage, associées à la diminution des coûts, bouleversent le secteur des automatismes du bâtiment et répondent à la demande des clients pour des modes de pilotage et de collaboration nouveaux, intuitifs et évolués.
« En conséquence, le numérique avec notamment les objets connectés et les nouveaux protocoles réseau influencent très fortement nos développements et les nouvelles générations de produits », poursuit l’expert. Un premier exemple avec l’ECOS 504-IoT qui est en même temps un régulateur d’ambiance et un serveur BACnet programmable intégrant une passerelle entre BACnet et MQTT pour l’IoT. Avec ce système, il est possible de fournir et recevoir des informations de différents clouds tels que Amazon AWS, Google Cloud, Microsoft Azure, et faire par exemple de la reconnaissance vocale pour agir directement sur les systèmes d’automatisation du bâtiment, éclairage, température, ventilation… Il est aussi possible par ce biais d’intégrer des capteurs intelligents dans le réseau local d’automatisation.
Un second exemple avec la toute nouvelle génération d’automates baptisés Modulo 6, caractérisés par une démultiplication du nombre de points physiques gérés, mais aussi par une convivialité renforcée dans la configuration des systèmes ; une nouvelle approche intuitive de configuration des systèmes a été développée, avec en premier niveau une unité de commande et d’affichage locale (LOI) graphique couleur haute résolution. Chaque module d’E/S peut y être connecté et délivrer en temps réel ses données clés, ainsi que pour la mise en service ou les situations d’urgence, et il est ainsi possible d’y effectuer une commande prioritaire déconnectée de l’unité de gestion locale, conformément à la norme EN ISO 16484-2, précise l’expert. « Ensuite, les systèmes sont accessibles sur tablette ou smartphone via Bluetooth ; à un troisième niveau, ils peuvent être connectés à des labtops ou des applications via Webservices. La façon de programmer et d’exploiter est donc fortement changée, et le second changement important, c’est que le système se connecte avec le cloud de manière aussi naturelle et sécurisée qu’avec les installations de chauffage, de ventilation et de climatisation existantes, et ce, par connexion cryptée, respectant les directives de cybersécurité du standard IEC-62443 », ajoute le docteur Gassmann.
« Le contrôle va être de plus en plus dans le cloud, avec des systèmes d’analyse statistique des données et de nouveaux algorithmes de contrôle commande et de prédiction de plus en plus intelligents. Ainsi, aujourd’hui, avec par exemple la mise à disposition d’informations instantanées sur le degré d’utilisation des servomoteurs et des vannes, avec prévision de leur durée de vie probable, et demain les “deep learning process” dépasseront peut-être les modes de prise de décision classique actuelle, avec des systèmes apprenant, pensant et agissant par eux-mêmes, et intégrant une multitude de facteurs », conclut l’expert.
Jean-François Moreau