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Foudre : pour des sites et équipements bien protégés

(c) Dehn

Pour les spécialistes de la foudre, 2018 va rester une année très orageuse, la plus orageuse en France depuis 30 ans. Météorage a en effet comptabilisé plus de 720 000 impacts de foudre et 296 jours d’orage, toutes les régions étant touchées. Un chiffre exceptionnel, favorisé par les conditions climatiques et la canicule. Selon les climatologues, le changement climatique et le réchauffement global des températures provoqueront à terme une multiplication des épisodes orageux violents.

Les surtensions transitoires provoquées par la foudre, ajoutées aux nombreuses surtensions générées sur le réseau électrique et les sites des entreprises, ne peuvent qu’inciter les sites petits ou grands à se protéger contre ces risques. Des risques qui vont de la dégradation à long terme d’équipements électroniques et électriques à la destruction de composants, de machines et à des arrêts coûteux de process. La protection des personnes est aussi un objectif prioritaire.

Cette protection sera assurée pour les installations et bâtiments industriels (photovoltaïque, éclairage urbain LED…) par des paratonnerres, et par des parafoudres pour les équipements et appareils sensibles ou stratégiques.

Impacts de foudre. (c) Dehn

Paratonnerres et parafoudres, des équipements complémentaires
Le paratonnerre va protéger une structure contre les impacts directs de la foudre et faciliter l’écoulement du courant électrique vers le sol en minimisant l’impédance du chemin utilisé par la foudre. Quatre types de paratonnerres peuvent être mis en œuvre :
• les paratonnerres à dispositif d’amorçage (PDA), une technologie récente : une électronique génère sur sa pointe un signal haute tension qui permet la formation d’un traceur ascendant et sa propagation vers le traceur descendant du nuage d’orage (norme NFC 17-102) ;les paratonnerres à tige simple (PTS) ;
• les protections de type cage maillée sur un bâtiment (norme NF EN 62305-3) ;
• les fils tendus au-dessus de la zone à protéger (norme NF EN 62305-3).

Le choix et les modalités d’installation d’un ou plusieurs paratonnerres ne pourront être réalisés qu’après une étude détaillée par des spécialistes : analyse des risques (ARF), choix du niveau de protection et définition des équipements requis et de leur implantation.
La protection contre les effets induits de la foudre et des surtensions se fera par implantation de parafoudres, à choisir en fonction du type d’équipement à protéger, de la localisation du parafoudre dans l’installation électrique et des conditions extérieures (présence d’un paratonnerre par exemple). Les parafoudres pour réseaux BT sont classés en 3 types :
• Parafoudre de type 1 : pour des installations où le risque foudre est très important, ces modèles sont puissants pour écouler une onde très énergétique.
• Parafoudre de type 2 : installé généralement en tête d’installation (TGBT) ou à proximité d’équipements sensibles.
• Parafoudre de type 3 : placé près d’équipements particulièrement sensibles.

Chaque type est qualifié suivant des tests d’ondes de courant plus ou moins fortes.

Protection d’un site industriel par paratonnerre à dispositif d’amorçage PDA. (c) Indelec

Des obligations pour la protection foudre des ICPE, ERP et IGH
La réglementation des installations classées pour la protection de l’environnement (ICPE) prévoit une analyse du risque foudre (ARF) démontrant la nécessité de protection et l’identification des installations et fonctions à protéger et des modalités de prévention. Réalisée suivant la norme NF EN 62305-2, elle distingue trois types de dommages pouvant apparaître à la suite d’un coup de foudre : blessures d’êtres vivants, dommages physiques, défaillance des réseaux électriques et électroniques. Une étude technique est ensuite effectuée lorsque l’ARF conclut à l’obligation de mettre en place une installation de protection foudre. Cette étude définit les mesures à mettre en œuvre pour atteindre l’efficacité de protection définie par l’ARF. L’installation réalisée suivant cette étude technique devra être ensuite vérifiée périodiquement (vérification complète tous les 2 ans) par une société différente de celle ayant procédé à l’installation.

Test dans le laboratoire d’Indelec d’un paratonnerre PDA. (c) Indelec

Pour les établissements recevant du public (ERP), les prescriptions peuvent être différentes suivant le type d’ERP, en particulier pour l’installation ou non de paratonnerre. La réalisation d’une ARF peut permettre de trancher ; l’analyse est basée sur la dernière version de la norme NF EN 62305-2 de 2012.

Les immeubles de grande hauteur (IGH) sont des points préférentiels d’impact de foudre. L’arrêté du 30 décembre 2011 précise les dispositions à prendre pour la protection contre les risques d’incendie et de panique à l’article GH 40 : installation d’un paratonnerre. La protection par paratonnerre PDA (à dispositif d’amorçage) présente de nombreux avantages pour protéger la toiture et les zones latérales.


Des besoins de protection qui se développent avec l’éclairage urbain par LED et les installations photovoltaïques

La technologie LED est désormais largement utilisée pour l’éclairage urbain pour son efficacité, son économie d’énergie et sa durée de vie. Toutefois, cette technologie est très sensible aux surtensions transitoires créées par la foudre et par les manœuvres sur le réseau. Ces surtensions vont créer des défaillances dans les circuits d’alimentation dans les armoires de commande ou au niveau du luminaire LED. « Nous avons développé des produits spécifiques type 2 (ou 3) avec des encombrements réduits pour des installations en pied de mât ou intégrés dans la lanterne LED, des parafoudres BT type 1+2 ou type 2 seront installés dans les armoires de commande », commente Christian Macanda, responsable Produits de Citel.

Protection par paratonnerre d’un site photovoltaïque. (c) France Paratonnerre

Les installations photovoltaïques en toiture ou au sol sont aussi très exposées au risque de foudroiement et aux surtensions sur le réseau de distribution publique. La protection contre les surtensions côté AC et DC doit donc être assurée, et parfois obligatoire selon la normalisation. Mais pour Christian Macanda, « le comportement en court-circuit du photovoltaïque est radicalement différent de celui d’une source continue classique. Les tests en fin de vie et d’emballement thermique seront différents. Alors que la normalisation pour les parafoudres pour réseau PV est bien établie (EN 50539-11/IEC 61643-31), une nouvelle norme, IEC 61643-41, devrait être publiée en 2020 pour les parafoudres connectés à un réseau courant continu. Néanmoins, la demande est forte pour les utilisateurs qui ont des problèmes sur des réseaux c.c., et Citel propose des solutions dans l’attente de la future normalisation ».

Phoenix Contact propose depuis 2018 une nouvelle gamme de parafoudres type 2 pour courant continu : « Ces parafoudres intègrent des déconnecteurs particulièrement efficaces pour interrompre des courants de plusieurs centaines d’ampères. »

De nouveaux produits pour répondre à ces besoins diversifiés et aux nouvelles normes
Citel a présenté à la Foire de Hanovre 2019 le renouvellement de sa gamme de parafoudres modulaires pour réseaux basse tension mettant en œuvre la 3e génération de sa technologie exclusive VG. Christian Macanda explique : « Notre technologie VG associe varistance et un éclateur à gaz spécifique fabriqué par Citel. Cette association apporte des gains substantiels : avec l’éclateur, pas de courant de fuite, ce qui augmente la durée de vie de la varistance, donc du parafoudre. Cette technologie permet une coordination totale avec les parafoudres ou les équipements en aval et une tenue renforcée aux TOV (surtensions temporaires durables). Certains parafoudres intègrent un fusible pour protéger contre les courts-circuits en complément du déconnecteur contre l’emballement thermique, d’où un gain en taille et en facilité d’installation. Le niveau de protection Up a été aussi réduit pour une meilleure protection. Cette nouvelle gamme de plus de 500 références a été aussi améliorée pour la facilité de débrochage, la visualisation de déconnexion ou l’utilisation d’un QR code permettant de visualiser la notice d’installation. »

Parafoudre monté sur carte électronique. (c) Mersen

Dans le cadre de son offre de protections pour le photovoltaïque (fusibles, parafoudres et interrupteurs-sectionneurs) HélioProtection TM, Mersen lance un nouveau parafoudre 1 500 VDC à la fois type 1 et type 2. La cartouche débrochable est compatible avec le parafoudre 1 500 VDC Plug-in sorti en 2018. Répondant aux normes photovoltaïques IEC 61643-31, EN 50539-11 et UL 1449 PV, il s’agit d’un système interne spécialement développé pour se passer de protection fusible en amont de l’installation.

ADEE Electronic propose depuis 2018 sa gamme Vario, destinée aux réseaux d’énergie « courants forts », réseaux de transmission de données et aux réseaux « courants faibles ». Cette gamme à varistances et éclateurs à gaz est déclinée en parafoudres type 1+2, type 1 et type 2. Des versions avec un encombrement très réduit existent aussi pour l’éclairage public.

Parafoudre de technologie ACI de Dehn.

Pour ses parafoudres type 2, Dehn a développé une nouvelle technologie ACI (Advanced Circuit Interruption) combinant interrupteur et éclateur, ce qui élimine le disjoncteur/fusible en amont. Cette conception évite les erreurs de sélection et de dimensionnement de ce disjoncteur ou fusible. La résistance aux TOV de ces nouveaux parafoudres est considérablement améliorée, ce qui réduit les risques pour le système.

Les parafoudres sont très souvent équipés de voyants et de contact de défaut pour s’assurer que si la protection est fonctionnelle ou non. Le parafoudre peut être hors service très rapidement ou après plusieurs années. Il n’est pas possible d’anticiper sa fin de vie ! Phoenix Contact a développé un nouveau système, ImpulseCheck, qui détecte et mesure les ondes de choc foudre ou surtensions réseau en temps réel, sur chacun des 4 conducteurs actifs. Les données c

Analyse des données et de l’état d’un parafoudre par le système ImpulseCheck de Phoenix Contact.

ryptées sont analysées dans Proficloud via une connexion Internet. Un algorithme analyse l’ensemble des données et calcule l’état réel du parafoudre en fonction des caractéristiques des ondes de choc ou surtensions réseau détectées, en tenant compte des différents mécanismes de vieillissement des composants, basés sur les normes d’essais et le type de parafoudre utilisé. L’outil d’analyse intégré au cloud reste évolutif dans un système automatique et intelligent. L’utilisateur peut également configurer des notifications personnalisées telles que des rapports périodiques sur l’état de ses parafoudres ou encore dans le cadre de la vérification périodique des systèmes de protection contre la foudre, conformément à la norme EN 62305-3 (exemple : installations ICPE). ImpulseCkeck, développé par Phoenix Contact, a été présenté en exclusivité mondiale lors de la Foire internationale de Hanovre en avril dernier.

Les normes évoluent pour plus de sécurité des installations et des personnes
Le domaine de la protection contre les surtensions par des paratonnerres et parafoudres est couvert par de nombreuses normes, guides pratiques et documents techniques auxquels se réfère la législation pour la conception des installations électriques et la protection des personnes et des biens. Ces normes établies par les comités de normalisation et experts de la CEI, du Cenelec et de l’Afnor, sont révisées régulièrement et complétées en fonction de l’évolution des technologies et des besoins.

Impact de la foudre. (c) Dehn

Parmi les plus importantes, on peut citer :
• la série de 4 normes NF EN 62305-1/2/3/4 Protection contre la foudre. Une nouvelle version est en cours de rédaction (édition 3) ;
• la série NF EN 61643-11/21/31 Parafoudres basse tension. Une nouvelle norme 61643-41 couvrant les réseaux en courant continu est en cours d’élaboration ;
• le guide UTE C 15-443, en cours de modification, précise les paragraphes 443 et 534.1 de la norme NF C 15-100 ;
• le guide UTE C 15-712 Installations photovoltaïques (incluant la protection contre les surtensions) ;
• la norme NF C17-102 Protection contre la foudre par paratonnerre ;
• La norme européenne HD 60364 : cette norme est déjà appliquée dans plusieurs pays européens et devrait être transposée en norme française dans la nouvelle version de la norme NF C 15-100 pour les chapitres 443 et 534.

La publication de cette nouvelle version de la C 15-100 est attendue pour 2020, elle devrait rendre les parafoudres obligatoires pour les installations industrielles et tertiaires.

Jean-Paul Beaudet

Filière 3e: