Télégestion et supervision, quelles différences ?
Aujourd’hui, les systèmes à l’intérieur d’un bâtiment se multiplient, cohabitent et communiquent de manière hétérogène au sein des immeubles. Le bâtiment est en capacité d’échanger de plus en plus avec l’extérieur, ce qui autorise l’usage de ses données par des applicatifs de gestion externe, avec des fonctionnalités qui peuvent paraître parfois éloignées des supervisions traditionnelles, mais qui nécessitent la mise en place de solutions IP nativement ouvertes aux Webservices. La supervision ne s’oppose pas pour autant à la notion de télégestion : « La télégestion d’un bâtiment désigne l’ensemble des produits et services mettant en œuvre les technologies de l’informatique, de l’électronique et des télécommunications pour permettre un contrôle à distance d’une ou plusieurs installations techniques, géographiquement réparties ou bien isolées », introduit Prudence Soto, directrice générale de Sauter Régulation SAS. Par l’intermédiaire d’un automate de télégestion installé sur site, le pilotage à distance des installations techniques du bâtiment assure, outre le bon fonctionnement de celles-ci, de réelles économies d’énergie à l’échelle du bâtiment, mais permet aussi d’anticiper les dépannages ou encore d’améliorer le confort des usagers.
Se connecter à distance via des applicatifs tiers
La notion de télégestion permet d’aller beaucoup plus loin que le pilotage des installations et la retransmission d’alarmes. « Elle permet notamment de comparer les consommations de différents bâtiments, de réaliser des statistiques d’alarmes, d’enregistrer les données, ou encore de développer des applications métiers répondant aux nouvelles exigences des maîtres d’ouvrage », ajoute Prudence Soto. « Sur le siège du groupe Nestlé, il est prévu la mise en place d’une supervision “Full Web HTML5” et multiservice qui permet d’accéder à distance, avec son smartphone par exemple, à la gestion du confort des pièces, la gestion des ascenseurs, la conciergerie, au travers d’un portail personnalisable et sécurisé », explique Jean-Marc Lartigue, directeur technique de Sauter Régulation SAS. Et avec HTML5, l’imagerie et les fonctionnalités sont identiques, que l’on soit en local ou bien distant. « Cela s’adapte à toutes les tailles d’écran et est donc facilement utilisable sur différents supports tels que PC, tablette, smartphone », ajoute l’expert de Sauter Régulation SAS.
« Compte tenu des volumes d’informations gérées, avoir une base de données fiable standard et évolutive est aussi clé. Par exemple, dans notre système, il s’agit de SQL », ajoute-t-il. Cela permet également d’intégrer aisément aussi des données externes d’un système tiers (ERP, CRM, etc.). Et avec la technologie API REST, tous les acteurs s’y retrouvent, le technicien ou l’exploitant, mais aussi le maître d’ouvrage, les exploitants ainsi que les différents usagers ou acteurs.
Pour Benjamin Bruet, responsable de l’activité Efficacité Energétique au sein de Siemens, « la GTB et la supervision migrent progressivement vers des offres globales de services aux usagers et intègrent des solutions de plus en plus complètes, notamment du monde numérique ». L’expert de Siemens précise : « En tant que constructeurs de solutions, nous nous devons d’être force de proposition et de développer des partenariats pour mettre à disposition une véritable plateforme de services avec nos propres solutions et des produits ou services tiers : pour exemple, la solution Enlighted, basée sur un capteur multi-mesures, appréhende le flux lumineux, le taux de CO2, la consommation de l’éclairage et les flux de personnes ou d’objets (via balise Bluetooth Low Energy) en dessous de son rayon de sensibilité.. Le capteur permet ensuite à une application d’analyse dans le cloud d’effectuer le monitoring et l’optimisation des flux de personnes et d’objets, ainsi que leur utilisation de l’espace. »
Des solutions variées sont en développement ou bien en cours de déploiement dans d’autres pays, par exemple avec un envoi massif de données vers des applications incluant de l’intelligence artificielle pour corréler de multiples facteurs. Par exemple, en optimisant l’efficacité énergétique avec une gestion très fine des ventilateurs au sein d’une salle de datacenter, pour obtenir une température la plus homogène possible, ou bien encore, dans d’autres cas, pour effectuer de la maintenance préventive.
La sécurité doit être à tous les niveaux
L’automate qui sert de passerelle vers l’extérieur intègre un Web serveur, et toute l’architecture est conçue avec les services informatiques du maître d’ouvrage et garantit au maximum traçabilité et sécurité, avec pour certains cas, des accès possibles synchronisés avec l’annuaire LDAP de l’entreprise. La connexion vers les applications cloud fait aussi l’objet de tous les mécanismes possibles de sécurisation, encryptage, voire utilisation de réseaux privés ou VPN. « Par ailleurs, l’automate qui sert de passerelle vers les applications en télégestion est lui aussi télé-maintenu avec une page Web d’administration, des fonctionnalités de backup/restore, et les mises à jour logicielles peuvent se faire également via le cloud, avec des mécanismes sécurisés d’ouvertures restreintes dans le temps, et une porte spéciale réservée à un profil d’utilisateur système, les autres ports d’accès étant désactivés », illustre Pascal Tigreat, responsable du département Automation de Wago.
« Que ce soit pour des magasins ou pour les gares d’Île-de-France, la télégestion apporte efficacité d’exploitation et meilleur confort et services pour les clients », Pascal Tigreat, Wago.
est en charge de sa gestion complète (ascenseurs, escaliers mécaniques, portiques de validation, grilles, etc.). Avec aussi pour objectif d’améliorer la connaissance des flux des Franciliens, pour optimiser la fréquence des trains par rapport à l’affluence en gare.
Tous les automates des gares d’Île-de-France sont reliés de façon centrale à un poste de contrôle SNCF. Les informations télécommuniquées sont transmises par un réseau interne privé et avec un protocole spécifique à la SNCF, mais l’automate peut aussi fonctionner seul en autonome, en cas de défaillance ou rupture de la liaison. Toutes les données recueillies sont « time-stampées » avec une possibilité jusqu’à 32 Go de capacité de stockage des données.
Dans un autre exemple, une chaîne d’environ 1 000 magasins alimentaires, la télégestion permet la remontée de l’ensemble des données de CVC, mais aussi les données énergétiques de consommation, la continuité du froid ou encore les taux de fréquentation et l’usage des différentes zones du magasin. Il est aussi possible de procéder à la fermeture complète à distance de tous les magasins, avec vérification de l’absence de personnel avant la mise en alarme.
« La télégestion est très répandue », Sébastien Siebert, chef de produit Régulation et systèmes connectés de Viessmann
« Sur le grand tertiaire, la mise en œuvre de la télégestion est systématique pour les chaufferies et systèmes de chauffage que nous mettons en œuvre. Pour cela, l’intégrateur s’appuie sur une solution passerelle baptisée Vitogate 300, qui fait le lien entre la ou les régulations sous LON de nos chaudières et des réseaux type BACnet ou Modbus de la GTB. » La passerelle est paramétrée par l’intégrateur aux souhaits de l’exploitant : jusqu’à dix régulations de chaudières peuvent être suivies, tout est ainsi accessible ou visible à distance, l’exploitant n’a pas nécessité d’être présent sur le site : la stratégie de régulation et de cascade s’il y a plusieurs chaudières, et bien entendu les variables importantes, températures, pression et débits.
Pour le petit tertiaire, la télégestion se fait par une passerelle, également avec une interface Web, qui permet le report des défauts, la possibilité de modifier les régulations, et des courbes de suivi et de tendance.
Jean-François Moreau