Electricien+ interviewait François-Xavier Jeuland en février 2017. Beaucoup de choses ont avancé et la FFDomotique travaille conjointement avec la SBA pour que les bâtiments soient Smart, interopérables, avec des prestataires compétents. Tout un programme.
Pouvez-vous résumer la convention FFDomotique 2019 ?
Ce que j’en retire, c’est avant tout l’état d’esprit. On a su garder quelque chose de très humain, les gens sont ravis de venir discuter, échanger avec leurs confrères en toute décontraction et quel que soit leur métier. Il n’y avait pas tant d’intégrateurs que cela, même si, aujourd’hui, plus de la moitié de nos membres sont des intégrateurs. En revanche, tousles métiers étaient représentés, aussi bien les distributeurs, les fabricants, les éditeurs de logiciels que les bureaux d’études, les formateurs et même des chercheurs. C’est très positif.
On voit apparaître de nouvelles filières là où nous n’avions pas énormément de membres, comme les motorisations, et quatre nouveaux membres dans les métiers des serrures connectées. Certaines évolutions du marché des objets connectés qui remportent aussi un bon succès auprès du grand public.
Nous faisons l’unanimité et nous avons énormément de louanges sur le dispositif destiné aux Prestataires Smart Home de confiance évalués par Afnor Certification. C’est quelque chose que je retiens, car c’était notre grand chantier 2018 et je pense que nous l’avons bien réussi. Évidemment, ce n’est qu’un début. Nous voulons cinquante membres certifiés d’ici à fin 2019, afin de créer un vrai réseau national d’experts de confiance.
Nous avons déjà les labels R2S (pour Ready-to-Service) tertiaire et Prestataire Smart Home de confiance, conçus avec la SBA. Nous aurons bientôt les référentiels R2S résidentiel, les labels AMO Smart de confiance et Prestataires Smart Building de confiance.
Qui est intéressé par le label Prestataire Smart Home de confiance ?
Un électricien qui va avoir une demande ponctuelle ; un électricien déjà habitué à la domotique ; un domoticien ; un intégrateur en domotique. L’idée est de répondre au besoin de confiance. Il faut savoir que le frein n° 1 du Smart Home en France est la défiance que peut avoir le grand public ou la presse sur ces sujets-là. Aujourd’hui, le logement connecté peut être extrêmement fiable et sécurisé si on fait appel à des gens qui ont été formés et savent de quoi ils parlent. Donc pour moi, le bénéfice n° 1 d’un installateur, c’est de pouvoir rassurer son client final et pouvoir se démarquer de ses concurrents grâce à ce dispositif qu’il va pouvoir mettre en avant sur son devis, sur sa camionnette et ainsi, passer le message de sérieux, de professionnalisme, d’évolutivité et de déontologie. Le conseil que je donne à tous les installateurs, c’est d’y répondre avec ce dispositif ou bien de s’associer à un intégrateur ou un installateur qui, lui, est déjà certifié par Afnor Certification. C’est ce réseau maillé collaboratif dont nous parlons toujours au sein de la FFDomotique, et c’est ce que l’on voit apparaître dans des régions car les membres se sont rencontrés et ont commencé à travailler main dans la main avec une réelle complémentarité de compétences. Ils se sont rendu compte que le Smart Home est très vaste et qu’individuellement ils ont du mal à répondre à tous les besoins qu’un client peut avoir dans ce domaine-là. En s’associant avec un ou plusieurs partenaires, ils rassurent le client.
Est-ce qu’un électricien peut être membre FFDomotique ?
Oui, bien sûr, il va trouver dans les travaux de la FFDomotique des arguments et même des contre-arguments. Le client a énormément d’idées préconçues en tête, positives et moins positives, et il faut être capable d’argumenter et de contre-argumenter. À travers les discussions qu’il aura avec les différents membres ou les événements auxquels il va assister (convention de janvier, journée d’échanges en juillet, Universités en septembre, salons et rassemblements régionaux…), il va comprendre le périmètre du Smart Home, qui est très vaste, et identifier de nouveaux besoins et de nouvelles propositions qu’il va pouvoir faire à ses clients.
Un autre intérêt, c’est qu’il pourra détecter des binômes qui sont complémentaires avec sa vision des choses, ses compétences et profiter des dernières technologies et des derniers produits.
Lors de la convention, on a vu une vingtaine d’exposants qui ont montré leurs derniers produits innovants, c’est aussi une façon de se faire connaître. Un autre argument un peu plus terre à terre, c’est qu’il paiera beaucoup moins cher son évaluation Afnor Certification, car il n’y a pas de frais de dossier Dès lors que l’on est membre, le coût annuel est beaucoup plus bas, on va l’accompagner dans cette certification.
Est-ce que l’AMO Smart fait sens dans les projets ?
Tout va dépendre du périmètre et de l’ampleur du projet. Lors de la convention, nous avons entendu le témoignage d’un représentant de la ville de Puteaux qui, pour son écoquartier, se fait accompagner par un AMO Smart afin de réfléchir aux services numériques de demain et impose aux promoteurs qui voudront répondre à ses différents lots d’être eux aussi accompagnés d’un AMO Smart.
On voit, petit à petit, qu’au niveau de la conception d’un quartier ou d’un bâtiment, l’AMO Smart devient un élément incontournable. Il est valorisé par des labels comme NF Habitat HQE et fait gagner des « points » aux promoteurs. Notre ambition est que de plus en plus de projets donnent lieu à cette réflexion, car un AMO Smart est là pour accompagner cette démarche.
On voit des AMO Smart qui travaillent sur des projets de bâtiment petit tertiaire, d’hôtels ou de bâtiments collectifs. Progressivement, nous voulons légitimer ce nouvel acteur car, même si le métier d’AMO est très connu, nous voulons le faire connaître dans sa dimension Smart, notamment dans le label HQE. Nous le faisons actuellement à travers R2S tertiaire et évidemment R2S résidentiel où ce rôle d’AMO Smart va être fondamental. Nous mettons ces démarches en avant dans nos nouveaux référentiels, car nous considérons que si l’on veut avoir les moyens de ses ambitions, il faut se poser les bonnes questions et mettre de la matière grise en amont.
Le bureau d’étude va avoir une analyse fonctionnelle et un objectif clair. Il n’aura pas besoin d’inventer ou d’imaginer des services car il aura un cahier des charges extrêmement précis. Le bureau d’étude va pouvoir intégrer dans son CCTP des fonctions et des technologies basées sur le réel besoin du client final, avoir une vision sur ses futurs besoins, qui est la logique de R2S.
On est encore loin d’une demande massive, mais on s’aperçoit que, petit à petit, l’AMO Smart apparaît sur de plus en plus de projets.
L’électricien va trouver dans les travaux de la FFDomotique des arguments et même des contre-arguments, car le client a énormément d’idées préconçues en tête.
Qu’en est-il de Ready to Services résidentiel ?
On arrive au bout de la première phase, avec R2S résidentiel, nous sommes maintenant prêts à partager avec les promoteurs, les bailleurs sociaux, les constructeurs, les fabricants et les organisations professionnelles. D’ici à quelques mois, nous aurons un référentiel qui sera validé par toutes les parties. On a pris le contre-pied de R2S tertiaire parce que nous considérons que dans le résidentiel il vaut mieux partir des services quand le tertiaire parlait des infrastructures. Par exemple, nous avons déjà identifié une soixantaine de services qui parleront aussi bien au client final qu’à l’exploitant d’un bâtiment. À partir du moment où le donneur d’ordre va trouver des services dans ce référentiel qui vont avoir un sens pour ses futurs acquéreurs ou ses futurs clients, il va choisir de rentrer dans cette démarche R2S et, de ce fait, il va imposer à toute la chaîne de valeur un certain nombre de recommandations, avec un niveau d’ambition choisi par le promoteur, ce qui va permettre cette interopérabilité, cette gouvernance, ce niveau de sécurité et d’ouverture, ainsi qu’une infrastructure très haut débit mutualisée. L’ambition n’est pas de faire une certification à part entière, mais d’élaborer un référentiel solide et concret pour que les organismes certificateurs s’en emparent.
Comment allez-vous communiquer sur R2S résidentiel ?
Nous allons commencer par le faire connaître et expliquer aux professionnels du bâtiment et du numérique qu’il existe un référentiel. Nous allons nous concentrer sur ces deux écosystèmes car, en le présentant à nos collègues anglais, allemands et au CES Las Vegas, nous avons compris que nous étions le premier pays à avoir ce niveau d’ambition et qu’énormément de pays et d’organisations dans le monde sont intéressés par cette approche.
Nous allons accompagner la mise en place des formations sur ces sujets et sur l’utilisation de ce référentiel pour tous les acteurs de la chaîne de construction. Nous voulons le déployer le plus possible pour monter le niveau de qualité de la construction et de satisfaction des utilisateurs.
Existe-il une convergence avec la Smart Building Alliance ?
Même si nous ne travaillons pas tout à fait sur les mêmes sujets, nous sommes très complémentaires. Nous avons été créés en même temps, nous avons le même ADN, nous avons fait beaucoup de travaux, de salons ou de groupe de travail en commun. Nous avons clairement des synergies qui se renforcent, de façon assez naturelle. En 2019, nous allons travailler sur ces synergies, car nous serons beaucoup plus forts ensembles. Il faut à tout prix travailler main dans la main. Quand on est chacun dans son coin, on est inaudible ou inefficace et dès qu’on est soudés, nos messages portent plus loin. Le but est de faire avancer les choses, nous allons définir un mode de fonctionnement plus ambitieux pour avoir un impact plus important sur les évolutions indispensables du bâtiment.
Donc, les travaux sont conjoints avec la SBA ?
Exactement. Le cadre de confiance dont nous parlons est porté par le référentiel R2S. Pour moi, c’est le premier étage de la fusée. Nous allons étendre ce dispositif en créant AMO Smart de confiance et nous travaillons actuellement avec la SBA et Afnor Certification sur les prestataires Smart Building de confiance. On voit parfaitement les complémentarités. On ne réinvente pas, on s’appuie sur ce qui fonctionne et cela donne de la confiance pour ceux qui ne connaissaient pas, soit la SBA, soit la FFD. À partir du moment où on s’appuie sur des organismes qui ont fait leurs preuves dans certains domaines, on gagne du temps, on gagne en crédibilité, on gagne en confiance. Nous allons pouvoir, assez rapidement, aider tous les professionnels du bâtiment à atteindre un niveau plus crédible sur le sujet du numérique. Il s’agit là du deuxième étage de la fusée.
Puis, le troisième étage est R2S Connect, qui permettra aux fabricants, aux éditeurs, d’avoir un référentiel pour que cette fameuse interopérabilité soit renforcée et éviter aux intégrateurs les problèmes d’intégration des produits et des logiciels non compatibles R2S. Grâce à R2S Connect, l’intégration sera plus facile et les évolutions garanties. Certains pays comme la Suisse, la Belgique, l’Allemagne, l’Angleterre et Outre-Atlantique, sont intéressés par nos modèles. Tant mieux ! Ce sont des choses que nous n’avions pas forcément anticipées, mais on voit que nous sommes plutôt en avance sur ces sujets par rapport à nos voisins. Plus nous pourrons le faire à un niveau européen et international, plus cela servira le marché.