Les établissements de santé, gourmands en énergie et à l’exploitation exigeante, font l’objet d’une attention toute particulière en matière de gestion des consommations. Marie-Paule Dayer nous donne les clés de la performance énergétique de ces infrastructures.
Quelles sont les particularités des bâtiments de santé d’un point de vue énergétique ?
Marie-Paule Dayer – Les bâtiments de santé comme les hôpitaux et les cliniques fonctionnent en service continu et doivent apporter aux patients des soins de qualité, en toute sécurité et au niveau de confort attendu. Ces exigences génèrent des dépenses énergétiques dont le montant avoisine 1,5 % du budget total de fonctionnement d’un établissement. Au regard des autres postes budgétaires, cela peut paraître peu, mais tout euro non dépensé en énergie peut être directement réaffecté à des postes plus stratégiques. Par ailleurs, ces infrastructures subissent de constantes évolutions au fil du temps : des modifications de services, des agrandissements, des rénovations. À la remise des clés d’un bâtiment, sa performance énergétique est optimale (par conception, puis par réglage à la livraison). Mais par la suite, la régulation n’est pas systématiquement reprise avec les évolutions de l’architecture ou des équipements intégrés, générant des gaspillages énergétiques. C’est un levier critique à mettre en œuvre, mais très efficace pour atteindre une meilleure performance énergétique.
Quelles sont les contraintes lourdes de ces installations ?
M.-P. D. – Je citerais tout d’abord les contraintes réglementaires, applicables à la régulation thermique ou la ventilation, notamment pour garantir le bon niveau de traitement d’air des blocs opératoires. Ensuite, les températures des chambres en service de maternité ou de gériatrie doivent nécessairement être plus élevées. Il faut ajouter à ces contraintes la continuité de service 24 h/24 et 7 j/7, ce qui impacte le dimensionnement des infrastructures. Cependant, en optimisant la conception et en équipant les réseaux des énergies par des compteurs et des capteurs, il est possible de limiter les surconsommations (par exemple en cas de non-usage des blocs ou d’absence dans les chambres), et aussi de supprimer rapidement les pertes par fuite. D’autre part, ces objets connectés (capteurs, compteurs, débitmètres, etc.) permettent d’accéder aux données en temps réel puis d’analyser les performances du bâtiment. Ces informations permettent la mise en place des démarches d’amélioration continue, et aussi de sensibiliser les utilisateurs au changement.
Selon vous, la prise en compte des questions énergétiques de ces bâtiments particuliers se traite-t-elle de la même manière qu’un bâtiment tertiaire conventionnel ?
M.-P. D. – Cette question dépend avant tout de l’usage du bâtiment de santé. La typologie est très variée entre les établissements orientés chirurgie ambulatoire, qui ont très peu d’espace hôtelier, et ceux qui sont constitués de pavillons psychiatriques ou de pôles d’urgence… Certains sites disposent aussi de leurs utilités de blanchisserie, de cuisine centrale et de stérilisation, qui sont également des postes consommateurs d’énergie, sur des échelles de temps différentes. Pour la recherche d’optimisation, le focus est alors porté davantage sur l’usage d’une zone ou sur un process plutôt que sur le bâtiment en tant que tel, dans un premier temps. Puis, les échanges de bonnes pratiques se multiplient et certaines dynamiques du tertiaire sont aussi adoptées dans les bâtiments de santé, en particulier sur les zones administratives et hôtelières. C’est donc autant de leviers que l’on peut utiliser dans ces bâtiments particuliers !