En France comme partout ailleurs, l’augmentation de la population, l’évolution des modes de vie conduisent à une hausse de la demande d’énergie. Certes, à l’heure actuelle, les énergies fossiles couvrent encore une bonne partie de ces besoins. Mais leur épuisement programmé, l’augmentation des coûts d’extraction et puis quand même, le besoin impérieux d’apporter, enfin, une véritable réponse au réchauffement climatique, tout cela devrait nous obliger à nous tourner significativement vers les énergies renouvelables. Le syndicat Enerplan, en France, est l’un de ceux qui défendent bec et ongles les intérêts de l’énergie solaire et des industriels qui innovent et développent la filière. Une énergie gratuite qui ne s’épuisera que dans quelques milliards d’années. De quoi, quand même, voir venir…
C’est à Marseille, ville baignée de soleil, qu’Enerplan, le syndicat des professionnels de l’énergie solaire, est né en 1983, « une époque où nous avons contribué à la normalisation du secteur de l’industrie du solaire thermique », évoque Daniel Bour, son président – une position qui en fait le porte-parole de la filière photovoltaïque en France. Un président d’autant plus en mesure de porter loin et efficacement les paroles de ses membres qu’il est aussi président fondateur de la Générale du Solaire, « un groupe [qui] est confronté au quotidien à des enjeux qui sont ceux de la plupart de nos membres. » PME indépendante d’une cinquantaine de salariés, présente sur de nombreux segments de marché du solaire photovoltaïque en France et à l’international, la Générale du Solaire exerce une vaste palette de métiers : « développement de projets, ingénierie, construction, financement, opérations et maintenance. Être à la tête d’une société aussi transverse est incontestablement un atout pour se tenir au fait des évolutions très rapides du secteur, et donc représenter au mieux une filière en plein développement. »
Enerplan, un syndicat, deux missions : défendre les professionnels du solaire, certes, mais aussi « animer, structurer et développer la filière solaire française. » Enerplan, qui compte quelque quatre cents membres sur l’ensemble de la chaîne de création de valeur, regroupe donc « l’écosystème solaire où TPE, PME, PMI, ETI et grands groupes ont chacun une voix délibérative, alors qu’une charte éthique s’impose à tous. » Des entreprises impliquées sur deux grands marchés, « répondre aux besoins énergétiques locaux avec l’énergie solaire (chaleur et électricité) pour alimenter le bâtiment, le quartier, l’îlot urbain, et alimenter le mix électrique avec le développement et l’exploitation de grandes centrales photovoltaïques. »
En 2006, le syndicat qui fut à l’initiative, avec le gouvernement de Dominique de Villepin, « pour mettre enfin en œuvre une vraie politique de développement du photovoltaïque en France, avec l’adoption d’un tarif d’achat incitatif », fut également à l’origine de la Garantie de résultat solaire (GRS), « afin de rassurer la maîtrise d’ouvrage sur la production d’eau chaude solaire collective, quand il ne se faisait que quelques projets par an ». Il participa aussi « à l’élaboration puis à la mise en œuvre du Plan de relance de la chaleur solaire en France, initié par l’Ademe avec les professionnels. » Après le Grenelle de l’environnement, « tandis que le marché du photovoltaïque s’emballait », Enerplan a plaidé alors « pour une baisse du soutien public à la filière, sans malheureusement être entendu. »
Cent fois sur le métier il faudra remettre l’ouvrage, « 2016 n’aura pas été un bon cru pour le développement de l’énergie solaire en France », moins de 2 % de la production d’électricité, « et 2017 ne sera guère plus reluisante. » En cause, « la course de lenteur pour le développement de notre filière, mise en œuvre en 2010 avec le moratoire. » Les signaux encourageants se feront donc attendre, « les changements de politique solaire intervenus dans les deux dernières années du précédent mandat vont seulement commencer à porter leur fruit en 2018/2019. Et il faudra encore des efforts significatifs de simplification au niveau de l’administration pour libérer enfin l’énergie des territoires, à l’heure où le coût de soutien au solaire devient marginal. »
Les pouvoirs publics ont « un rôle essentiel à jouer pour notre secteur. » Il y a des enjeux fondamentaux à la clé, « il faut que l’on desserre la bride administrative si l’on veut accélérer la transition énergétique et créer des milliers d’emplois associés. » Selon Daniel Bour, « il est ubuesque de maintenir un plafond de puissance de 100 kWc pour bénéficier d’un soutien via une aide “guichet”, tandis que le recours à l’appel d’offres est rendu obligatoire au-delà de 100 kW pour des installations qui vont générer 10 k€ de CA par an. » Sur ce point, Enerplan demande que « le seuil de l’appel d’offres soit remonté à 1 MW, pour fluidifier le marché et simplifier la vie de milliers d’entrepreneurs et de leurs clients. » Il y a du grain à moudre, la « mère des batailles » reste à encore à mener en 2018, « c’est l’aboutissement de la Programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE), qui porte haut les ambitions solaires pour le pays. Nous souhaitons que 10 % de la production électrique soit d’origine solaire en 2028, et que la chaleur solaire puisse contribuer significativement à la réduction des émissions de CO2. »
Au-delà de la PPE, il y a le cadre qui va se mettre en place pour le développement de l’autoconsommation photovoltaïque. « Un marché qui va se développer à mesure des progrès de compétitivité de l’électricité solaire », mais qui reste marginal, « moins de 0,05 % des Français sont concernés, aussi nous proposons de ne pas entraver son développement par une logique “centralisatrice”, en choisissant une aide lisible et simple avec une exonération décennale de CSPE et de TICFE* pour tous les nouveaux projets d’autoconsommation collective. » Les prochaines lois de finances permettront « aux pouvoirs publics de moduler l’exonération, et la mesure offre un cadre stable pour développer des projets. » Enerplan a trouvé son camp, « choisissons la simplicité de l’aide implicite plutôt que l’usine à gaz administrative de l’aide explicite, qui va subventionner le bailleur social et taxer par ailleurs les bénéficiaires d’électricité solaire. »
Au-delà des combats à mener et à gagner, des gaps technologiques majeurs modifieront significativement le futur du marché de l’énergie solaire. Notamment, « l’arrivée de la recharge intelligente des véhicules électriques, qui sont des batteries sur roues et qui joueront un rôle important dans la flexibilité locale (VEtoGrid, VEtoBuilding) », et qui devraient accélérer le développement de la production solaire locale. La convergence entre solaire et électromobilité « va considérablement faire évoluer la perception de notre secteur, plus besoin de pétrole quand l’électricité nous tombe du ciel. » Par ailleurs, l’industrie de l’automobile électrique est pourvoyeuse de batteries de seconde vie, « qui seront autant de stockages stationnaires pour pallier la variabilité prévisible de la production. » Effet d’aubaine, « cela va renforcer le potentiel d’autonomie de nombreux bâtiments, de quartiers et de territoires, avec de la création de valeur au niveau de la gestion optimale de la distribution. Le numérique et les réseaux électriques intelligents sont au cœur des innovations bénéfiques au solaire. » De l’innovation, de la créativité, il ne manquerait donc plus que la volonté politique pour que le secteur puisse véritablement prendre la place qu’il mérite et dont le climat a besoin !
Olivier Durand