J3E – L’année 2017 a été une année importante en matière de transition énergétique. La transition s’opère-t-elle assez vite pour que soit respecté l’objectif des deux degrés ?
Xavier Girre – L’engagement de la France dans la lutte contre le changement climatique et pour la transition écologique est indéniable. Les avancées en matière de réduction d’émissions de gaz à effet de serre et d’augmentation de la part des énergies renouvelables dans le mix électrique français sont incontestables. Ceci-dit, le One Planet Summit, qui s’est tenu en décembre 2017, a montré qu’il fallait faire encore plus, et plus vite. Aux côtés des pouvoirs publics, les entreprises ont un rôle essentiel à jouer pour accélérer ce processus de transition.
Pourquoi la France est-elle l’une des pionnières en matière de finance verte ?
Xavier Girre –Les acteurs du financement de l’économie privilégient de plus en plus les investissements qui favorisent une croissance bas carbone. Ils intègrent désormais dans leurs choix d’allocation des critères environnementaux, sociaux, sociétaux et éthiques.
Cette tendance a été amplifiée en France par la loi de transition énergétique pour la croissance verte du 18 août 2015, qui demande aux investisseurs d’expliquer la manière dont ils prennent en compte les critères dits » ESG » (Environnement, Société, Gouvernance).
Aujourd’hui, la France bénéficie d’un écosystème favorable au développement de la finance verte : les pouvoirs publics sont très fortement engagés, les investisseurs socialement responsables, qu’ils soient spécialisés ou institutionnels, sont nombreux et actifs sur la place de Paris et de grandes entreprises se sont saisies très tôt des outils de la finance verte. Par ailleurs, la recherche académique française est en pointe sur les questions de développement durable et de nombreux experts de qualité sont capables d’accompagner les démarches innovantes en la matière.
Quel rôle les entreprises peuvent-elles jouer pour favoriser l’essor de la finance verte ?
Xavier Girre –Dix ans après la première émission d’obligations vertes, ce marché de la finance verte est devenu particulièrement dynamique. Et ce, grâce aux entreprises qui se sont engagées dans la lutte contre le changement climatique, notamment dans les domaines du transport, du bâtiment et, surtout, de l’énergie.
Depuis la première émission verte d’EDF en 2013, les obligations vertes sont devenues essentielles au financement des ambitions du Groupe dans les énergies renouvelables. Au total, à ce jour, nous avons émis l’équivalent de 4,5 milliards d’euros en 5 tranches et en 3 devises (euro, dollar, yen). Les fonds sont alloués rapidement et ont déjà permis de financer 16 projets d’énergies renouvelables, représentant 2,9 GW brutes de capacité installée. Les Green Bonds financent aussi des opérations de rénovation et de modernisation de nos actifs hydroélectriques en France.
Le 11 décembre 2017, lors du Climate Finance Day, j’ai renouvelé l’engagement d’EDF à être présent à long terme sur le marché des Green Bonds et à continuer à mettre en œuvre des procédures de reporting rigoureuses. Nous espérons entraîner d’autres entreprises à nous suivre dans cette démarche. En tout, EDF et les huit autres entreprises signataires de cet engagement ont déjà émis 26 milliards d’euros d’obligations vertes, ce qui représente plus de 10% du total des obligations vertes en circulation dans le monde.
Comment les investisseurs peuvent-ils s’assurer que leurs capitaux serviront bien à financer des projets verts ?
Xavier Girre –Les principes applicables aux obligations vertes (Green Bond Principles) définissent un cadre, qu’EDF a contribué à élaborer – EDF est d’ailleurs la seule entreprise membre du comité exécutif des GBP. Il s’agit de lignes directrices, d’application volontaire, qui préconisent la transparence et la publication d’informations, et contribuent à l’intégrité du marché des obligations vertes.
Pour les Green bonds d’EDF, le respect de ces principes fait l’objet de revues externes, ex ante, au moment de l’émission puis, ex post, une fois les projets financés.
Les travaux en cours à la Commission européenne pour développer un standard commun s’appuient notamment sur ces GPB.
Lire la seconde partie de l’interview de Xavier Girre.