Pouvez-vous nous faire une rapide présentation du Mondial du Bâtiment pour cette édition 2017, au regard des années précédentes ?
Guillaume Loizeaud – Le Mondial du Bâtiment est le plus important rendez-vous du bâtiment et de la construction au monde et aussi le plus international : un exposant sur deux est une marque étrangère. Les thèmes couverts par l’évènement sont très variés et vont de la conception amont des projets et des chantiers à l’enveloppe, en passant par les métiers du chantier (terrassement, matériel, outillage…) et le second œuvre (aménagement intérieur, salle de bains, décoration, génie climatique…). Cet évènement est donc unique de par la largeur de l’offre et les métiers couverts. Nous avons aujourd’hui deux éditions de recul, ce qui est très peu et nous avons donc procédé à la fois à des réglages et à l’introduction de nouveautés. Tout d’abord, les trois secteurs du salon ont été réaménagés, avec pour objectif de rapprocher les métiers qui œuvrent ensemble sur le terrain. Pour donner un exemple, nous avons installé le secteur « Aménagement intérieur » de Batimat à proximité d’Idéobain, car ces métiers adressent une clientèle de prescripteurs et d’architectes. Nous avons également procédé à un rapprochement des métiers plus général, en pensant solutions globales et projets complets. Parmi les nouveautés de cette édition, on distingue en premier lieu un espace baptisé « Hub des solutions », présent sur les trois salons. L’objectif de ces espaces est de présenter aux visiteurs des solutions globales bénéficiant au client final. Ce point est assez original, car les offres sont habituellement présentées par application. Les Hubs sont donc des espaces multimarques et classés par applications. Sur Batimat, un « Hub des solutions bâtiment du futur » regroupera les matériaux et objets connectés, ainsi que des applications faisant appel à la réalité augmentée et à l’intelligence artificielle. Cet espace regroupera des industriels et des start-ups pour faire un tour d’horizon des « Construction Tech ». Enfin, une autre nouveauté, logistique cette fois : l’objectif est de faciliter la venue de visiteurs français. Pour cela, nous avons mis en place un dispositif de bus gratuits en province, pour faire venir au salon tous les installateurs qui le souhaitent.
Quelles sont les grandes évolutions que vous constatez sur l’ensemble des thèmes abordés sur le Mondial ? G. L. – En 2013, le sujet des bâtiments à énergie positive était relativement peu abordé. Quatre ans après, le mouvement des bâtiments à énergie positive et bas-carbone est en marche. Des solutions existent dans tous les domaines, comme les produits biosourcés, l’économie circulaire et les équipements pour améliorer l’efficacité énergétique du bâtiment. Après 2017, le nouveau label E+C-, viendra récompenser les bâtiments économes en énergie et à faible empreinte carbone. Le marché a décollé et il sera représenté, solutions concrètes à l’appui, sur les trois salons. Une autre évolution, celle amenant à l’usage de l’autoconsommation électrique pour le résidentiel et le non-résidentiel, aura son propre « Village » sur Interclima+ElecHB. En ce qui concerne le BIM, nous considérons que cette approche séquentielle des projets de construction représente l’avenir. Nous avons donc prévu sur le salon un espace collaboratif baptisé « BIM 3.0 », qui permettra aux différents acteurs du bâtiment d’en comprendre les enjeux et devrait aider à dédramatiser ce sujet. Cet atelier se basera sur un projet concret et modélisera un immeuble de logements sociaux. Le rôle du Mondial du bâtiment est aussi d’aider les acteurs en faisant de la pédagogie et d’être vecteur d’accélération de l’innovation pour le bâtiment en apportant une vision large et une compréhension des enjeux.
Concernant la partie Interclima+ElecHB, comment voyez-vous évoluer cette division du salon ?
G. L. – J’ai une conviction profonde : c’était une excellente idée d’avoir rassemblé les trois salons. Cet évènement peut potentiellement répondre à l’ensemble des évolutions du marché. La tendance du digital universalise le langage du bâtiment et permet de sortir de l’approche en « silo ». Nous souhaitons suivre la tendance en aidant les acteurs à travailler ensemble en proposant un dispositif qui offre une vision d’ensemble. Interclima+ElecHB a donc toute sa place sur le Mondial du Bâtiment et répond aux besoins du marché. Sur Batimat, nous observons une croissance significative du nombre d’exposants avec une progression de 10 % observée depuis la dernière édition et les grandes marques qui reviennent année après année. Sur le salon Interclima+ElecHB, nous accueillons deux nouvelles marques d’envergure : Siemens et Carrier et la tendance est plutôt positive pour ce qui est des prévisions du visitorat, malgré une légère baisse du nombre de stands depuis la dernière édition.
Le décret de rénovation tertiaire, programmé puis abandonné aussitôt, aurait-il pu selon-vous dynamiser le secteur du bâtiment ?
G. L. – Le sujet de l’efficacité énergétique des bâtiments non-résidentiels n’est pas accessoire. L’enjeu est la massification des chantiers pour les bâtiments tertiaires. J’ai la conviction que le train se mettra en marche rapidement.
Qu’attendez-vous du projet de loi sur la rénovation des logements, annoncé comme l’un des leviers du plan climat de Nicolas Hulot ?
G. L. – Il s’agit d’une bonne nouvelle et nous pouvons espérer que le marché de la rénovation décolle enfin. Depuis les premières annonces sur le sujet, qui revient régulièrement sur la table depuis plusieurs années, la rénovation énergétique des logements ne décolle pas. Mais il s’agit tout de même d’un bon signal envoyé à la filière et cela participera peut-être à faire décoller le marché.
Comment organisez-vous un évènement international tel que le Mondial du Bâtiment ?
G. L. – La première clé, qui est une nouveauté dans notre métier, est d’être en capacité de comprendre les filières marchés et leurs évolutions. Les salons professionnels doivent proposer de plus en plus de contenu et nous réalisons pour cela une veille très en amont des évènements sur les thèmes des 3 salons. Nous nous appuyons donc sur des études et des observatoires, mais aussi sur les syndicats professionnels et les médias qui couvrent tous les marchés abordés sur le Mondial du Bâtiment. La deuxième clé est qu’aujourd’hui, un salon comme lieu de business et la convivialité n’est finalement qu’un plus. Il nous faut donc faire un savant mélange de business, de communication et de convivialité et développer tous les formats physiques et digitaux les plus adaptés. Auparavant, l’activité d’organisateur de salon relevait davantage de la logistique alors qu’aujourd’hui, l’objectif est de connecter une multitude d’acteurs venus d’horizons divers. Juste pour vous faire une idée, pour ce qui est de la logistique, nous gérons une flotte de 500 poids lourds lors des phases de montage et de démontage. Le Mondial du Bâtiment peut être comparé à une ville éphémère de 800 000 habitants qu’il faut monter, puis démonter une semaine plus tard. Il faut également coordonner les exposants, les prestataires mais aussi la sécurité.
Quel est le modèle économique ?
G. L. – Comme toute entreprise, nous fabriquons un service qui génère une valeur et nous nous rémunérons sur cette valeur créée. Pour être plus précis, nous ne vendons plus uniquement des mètres carrés de stands. Comme c’est le cas pour tous les métiers, notre chiffre d’affaires sur la partie digitale augmente considérablement et nous développons donc des solutions packagées.
Quels sont les écueils à éviter pour organiser un tel évènement ?
G. L. – La première contrainte est liée aux transports et touche les visiteurs, comme les exposants. Un problème de transports peut impacter de manière grave l’organisation du salon. Nous avons donc organisé une série de réunions avec les services de transports publics et privés un an à l’avance. Nous avons également fait le point en amont avec le département, la région, la gendarmerie et la police pour les sensibiliser à l’ampleur de l’évènement. Service par service, des actions spécifiques ont donc été prévues. Nous avons également demandé au STIF et à la RATP de pousser la ligne B du RER au maximum de ses capacités.
À titre personnel, quels grands chantiers avez-vous menés depuis votre nomination à la tête du Mondial du Bâtiment ?
G. L. – Si je ne dois en mentionner qu’un, je citerai le travail réalisé en amont de cette édition et la rencontre de tous les acteurs majeurs du bâtiment, des leaders de la filière aux syndicats professionnels. Pour l’organisation de Batimat, mes équipes et moi-même avons eu plus de 400 rendez-vous physiques avec des leaders du secteur. Nous avons aussi rencontré l’ensemble des syndicats professionnels, soit trois journées par mois pour balayer l’ensemble des thèmes abordés sur les trois salons.
Quelles évolutions souhaitez-vous conduire pour la prochaine édition ?
G. L. – Nous avons beaucoup d’idées pour la prochaine édition du Mondial du Bâtiment, autant pour des développements que pour des nouveautés, mais il serait plus raisonnable d’attendre la fin de cette édition 2017 pour vous les révéler.
Propos recueillis par Alexandre Arène