Avec « 1 051 000 salariés » (1), le secteur du bâtiment est le premier pourvoyeur d’emplois en France. Sous sa bannière, la Fédération Française du Bâtiment assure la défense des intérêts, de pas moins des deux tiers d’entre eux, auprès de l’administration, des pouvoirs publics, des décideurs économiques et des acteurs de la construction, y compris à Bruxelles. La Fédération, pour rappeler les droits des entreprises du bâtiment dans les dossiers communautaires, y dispose d’une tribune permanente par le canal de la FIEC (2).
Nombreux sont les dossiers que porte la Fédération, Jacques Chanut déclarait, le 17 mars dernier, à l’issue du conseil d’administration qui venait de le reconduire pour un second mandat dans ses fonctions de président, « il n’y a pas d’emploi sans entreprise. Il n’y a pas d’entreprise sans marché. Il n’y a pas de marché sans projet solide et réaliste. C’est pourquoi la priorité de mon deuxième mandat portera sur le développement de l’activité, l’assainissement de la concurrence et l’allègement des contraintes pour les entrepreneurs et les artisans ».
La Fédération est une vieille dame plus que centenaire. Sa naissance remonte au début du siècle dernier, en 1904, lorsque cinq fédérations régionales du BTP décident de s’unir pour créer une fédération nationale. Son utilité n’est alors pas à démontrer, puisque la Fédération, appelée Fédération Nationale du BTP (FNBTP), regroupe déjà 17 000 entreprises dès 1906. Au sortir de la guerre, en 1946, les travaux publics s’émancipent, quittent la FNBTP pour créer leur propre Fédération. Le moment est venu d’abandonner, cette même année, la référence aux travaux publics, de devenir la Fédération Nationale du Bâtiment et d’élargir ses domaines de compétences à l’étude de prix, la qualification des entreprises, la formation professionnelle. Moins de dix ans plus tard, elle se dote d’outils de recherche et de laboratoire d’essais, qu’elle installe dans le domaine de Saint-Paul, à Saint-Rémy-lès Chevreuse. Ce n’est qu’en 1998 que la Fédération Nationale devient Fédération Française du Bâtiment.
La Fédération, qui déclare être « au service de la liberté d’entreprendre », est organisée autour « d’un réseau de proximité ». Des fédérations départementales, « qui accompagnent et soutiennent les entreprises dans leur vie quotidienne ». Des fédérations régionales, « qui orchestrent les initiatives, mutualisent les expériences, les compétences et les moyens ». Des unions et syndicats, « qui représentent la profession et la FFB auprès des instances françaises et étrangères en matière de R&D, notamment ».
Année 2017, année d’élections, la FFB, prompte à battre le fer, a bien de la matière pour interpeller les candidats, « il est essentiel de mettre au cœur des débats le sujet de l’aménagement et de la construction, pour maintenir notre croissance et faire en sorte que celle-ci ne soit pas perturbée par des décisions contre-productives ». En creux, comprendre « [qu’]’il ne faut pas toucher à ce qui fonctionne » et travailler là où il y a des points d’amélioration. La fracture territoriale par exemple, « notre pays redémarre à deux vitesses, d’un côté les métropoles dynamiques concentrent l’activité à haute valeur ajoutée ». En témoignent d’ailleurs des projets fastueux dévoilés lors du MIPIM 2017 de Cannes, « l’Occitanie Tower » à Toulouse, le projet « Iconic » de Nice ou l’extension de la « skyline » lyonnaise, bientôt parée d’une nouvelle tour baptisée « Two Lyon ». De l’autre côté, « les villes moyennes et les territoires peu denses qui se fragilisent et se désertifient ».
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Plus largement, la Fédération multiplie les initiatives pour faire en sorte que soient allégées les contraintes qui pèsent sur son secteur, par la réduction du coût du travail et des prélèvements obligatoires, mais également par la simplification administrative. « Simplification qui ne se veut pas synonyme de remise en cause de la sécurisation de l’emploi », assure Jacques Chanut.
L’emploi justement, le dossier est sur le dessus de la pile. La filière, « [qui] a perdu 12 % de ses effectifs en quelques années et vu chuter de 21 % son activité entre 2007 et 2015 inclus », se redresse tout juste. En 2016, la FFB a relevé des signes de reprise, « nous avons constaté une augmentation de 1,9 % de l’activité en volume. Ce qui nous permet de relancer la formation de nos compagnons de demain ». Une reprise qui devrait perdurer sur l’année 2017, et générer la création d’au moins 10 000 postes nets.
De bonnes nouvelles, mais la FFB ne baisse pas sa garde pour autant. Un sujet reste sur la table, la « concurrence déloyale ». En cause, le statut des « travailleurs détachés » qui est d’autant plus une pierre dans son jardin que la filière porte seule sur ses épaules 37 % des travailleurs ayant ce statut en France, loin devant l’industrie (16 %) (3). Enjeux conséquents, à débattre la tête froide ! Pourquoi ? Le travailleur détaché, une directive européenne le définit comme tel : « Un travailleur est considéré comme “détaché” s’il travaille dans un État membre de l’UE parce que son employeur l’envoie provisoirement poursuivre ses fonctions dans cet État membre. Un prestataire de services peut gagner un contrat dans un autre pays et envoyer ses employés exécuter ce contrat sur place ». Avec un salaire et des conditions de travail qui relèvent des règles du pays dans lequel il travaille, le travailleur détaché en France se voit toutefois appliquer les cotisations sociales de son pays d’origine, et c’est sur ce point particulier que le bât blesse.
Comme on le voit, il reste du grain à moudre pour la FFB, « les candidats écoutent, mais tiendront-ils compte de nos recommandations ? ». Affaire à suivre…
Olivier Durand