Préserver l’identité architecturale du patrimoine, en rénovation comme en neuf
Il est un peu partout sur le territoire Français, cet impératif de préservation de l’identité architecturale sur les bâtiments classés ou inscrits proprement dit. Et cette contrainte concerne également les abords directs des ensembles remarquables bâtis ou paysagers, ou bien encore les sites inscrits ou classés comme les espaces protégés et les villages touristiques. Les architectes en font souvent référence comme des zones classées, ou zone « ABF », ou périmètre protégé.
Le Code du Patrimoine donne en effet une définition très large du patrimoine en son article L1 puisqu’il s’entend, au sens du présent code, « de l’ensemble des biens, immobiliers ou mobiliers, relevant de la propriété publique ou privée, qui présentent un intérêt historique, artistique, archéologique, esthétique, scientifique ou technique ».
« On le retrouve donc bien sûr en rénovation d’un bâti ancien classé mais aussi en construction neuve dans les abords directs des ensembles remarquables bâtis ou bien encore des paysages. Par exemple, nous avons effectué deux réalisations en 2016 dans ce cadre, l’une dans une caserne de Gendarmerie à Luz Saint Sauveur et l’autre pour un immeuble collectif à Vincennes dans le périmètre du château de Vincennes. L’un des objectifs principaux poursuivis pour chaque projet était d’arriver à inclure l’énergie solaire sur le bâtiment tout en préservant l’aspect extérieur de la toiture », illustre Sébastien Brasselet, responsable technico-commercial de la gamme Thermoslate au sein du leader de l’ardoise naturelle Cupa Pizarras.
En rénovation, patrimoine rime souvent avec isolation intérieure et rénovation du lot CVC
Isolation intérieure, qui, si elle est possible, nécessite une attention particulière du traitement des ponts thermiques et fuites d’air notamment des liaisons plancher-mur, menuiseries ainsi que des systèmes électriques. Et on arrive à des résultats très probants : ainsi, dans le cadre du label BBC Effinergie Rénovation*, la mairie de Tosse construite en 1906 et qui a une structure en pierre hourdée à la chaux a réussi une rénovation énergétique quasi-exemplaire : mise en place d’une pompe à chaleur pour le chauffage et l’ECS, changement de l’éclairage, isolation intérieure des murs, de la toiture avec de la fibre de bois et remplacement des menuiseries en double vitrage avec argon, ont permis d’obtenir un gain de 8 en Cep avec une valeur après travaux de 32 kWep/m2.an.
Toujours en BBC Rénovation Effinergie, citons également le cas du bâtiment Le Rossini, immeuble de bureaux situé à proximité de l’Opéra Garnier, qui est inscrit à l’inventaire supplémentaire des monuments historiques. Construit en 1793, les contraintes concernent notamment les garde-corps, les ferronneries et les arcades en pierre à bossage. Une isolation par l’intérieur a été effectuée et la toiture en zinc reconstituée dans sa totalité et isolée avec 24 cm de laine minérale. Côté équipement, le bâtiment est raccordé aux réseaux de chaleur et de froid et une ventilation double flux a été mise en place. Les consommations énergétiques ont été divisées par 2,8 et le Cep final est passé à 83 kWep/m2.an.
* source « retour d’expérience – rénovation basse consommation »
Côté supervision et GTB, des contraintes peuvent aussi exister
Pour certains patrimoines historiques, il convient également de respecter les contraintes internes du bâtiment : « Sur un projet immobilier de vente et rénovation d’un hôtel, la totalité du sol de la cour, certaines pièces ou encore le plafond vouté de l’escalier d’honneur ainsi que certains murs sont classés, les travaux de rénovation doivent donc être établis de façon minutieuse en étroite coordination avec l’Architecte des Bâtiments de France», illustre Marie-Line Tassius, présidente de Optimisme23, société de recherche et de développement foncier.
« Au sein du Musée du Louvre, un de nos clients a mis en place un système de supervision basé sur notre suite logicielle », illustre Cyril Rolland, responsable Marketing de l’éditeur Codra. « Hormis des contraintes physiques éventuelles sur la mise en place de capteurs ou le passage de câbles dans certaines zones intérieures à préserver, la particularité d’une supervision et GTB moderne d’un monument historique est que, de plus en plus souvent, la supervision se doit d’intégrer non seulement les traditionnels lots techniques CVC et éclairage, mais aussi les fonctions clés que sont, pour ces ERP particuliers, les fonctions de sécurité, vidéo et contrôle d’accès, alarme incendie. Les PC de sécurités ont ainsi une vision globale, homogène, avec une seule technologie qui unifie tous les équipements terrain. Ce type d’approche tend d’ailleurs à se généraliser pour les établissements recevant du public », conclut l’expert.
Utiliser l’énergie solaire tout en gardant l’identité architecturale, c’est possible
Beaucoup de projets sont concernés car, vis-à-vis d’un monument historique, toute construction visible du bâtiment classé ou visible en même temps que celui-ci et située à moins de 500 m est concernée par la préservation architecturale selon l’article L621-30-1 du code du Patrimoine.
Au-delà de ces aspects, tout capteur solaire devient un élément du bâti. Les PLU notent le plus souvent que ce nouvel élément du bâti sera discordant s’il se positionne en dehors de la logique du bâtiment. Il est donc préconisé que le capteur soit intégré en harmonie dans la composition et donc respecte des règles comme par exemple être dans le plan de la couverture, parallèle et aligné à celle-ci ou encore être proportionné et positionné de façon équilibrée avec le bâtiment.
Le capteur solaire, en toute discrétion, c’est l’ardoise elle-même
« Le système que nous avons développé utilise les propriétés propres à l’ardoise naturelle pour capter et redistribuer la chaleur via un fluide caloporteur contribuant à la production d’eau chaude sanitaire, en appoint à un système de chauffage classique ou encore pour le chauffage de l’eau des piscines », illustre Sébastien Brasselet de Cupa Pizarras.
D’une surface de 1,12 m², les panneaux sont composés d’un fond de panneau en tôle aluminium, d’un isolant pour conserver la chaleur récupérée, d’un élément absorbeur constitué d’une double plaque d’aluminium avec des minces canaux au plus près du matériau chaud, l’ardoise naturelle. Cette technologie permet d’obtenir un gain optimal et de minimiser la quantité de fluide caloporteur (glycol) par panneau.
Les panneaux sont prêts à poser et c’est l’entreprise de couverture qui met en œuvre les capteurs dans l’épaisseur d’un litonnage ou voligeage de 18-20 mm. Ensuite l’entreprise en charge du lot CVC effectue la mise en pression des capteurs avec le fluide caloporteur.
« L’ardoise naturelle, par ses propriétés d’auto-régulation, permet de récupérer près de 98% du rayonnement solaire reçu et cesse d’absorber la chaleur si bien que la température ne dépasse jamais 95° C», précise l’expert.
A noter qu’une solution similaire existe avec le zinc, où un échangeur zinc titane vient récupérer la chaleur thermique solaire.
La tuile d’aspect traditionnel qui produit l’électricité
La PME italienne Dyaqua a développé une tuile canal, d’aspect traditionnel, qui intègre en son sein des cellules solaires photovoltaïques. Commercialisées depuis juin 2016, ces tuiles remplacent la couverture existante, sans structure supplémentaire.
Baptisée « Invisible Solar », la tuile solaire conserve l’aspect de la terre cuite et est formée d’un composé polymère non toxique et recyclable, dans lequel est encapsulé des cellules solaires monocristallines. D’apparence opaque, ce composé laisse cependant passer une partie du rayonnement solaire qui est capté par les cellules solaires, tout en imitant parfaitement l’apparence des tuiles de terre cuite standard.
Des cellules photovoltaiques transparentes
Baptisées « Invisible Solar Cells » et développées par la startup Californienne Ubiquitous Energy, elles peuvent être déposées sur n’importe quelle surface vitrée de façon invisible. Fines, sous forme d’un film de moins d’un micron d’épaisseur, transparentes, elles n’absorbent pas le spectre visible de lumière mais retiennent seulement les UV et les infrarouges pour un rendement proche de 10%.
Un potentiel fort pour bien sûr les appareils mobiles, mais aussi pour les bâtiments avec de grandes surfaces vitrées.
Jean-François Moreau
l’abbaye de Fontevraud, une rénovation de GTB et nouvelle chaufferie dans un patrimoine historique
Classée monument historique et inscrite au Patrimoine de l’Unesco, nichée au sein de l’Anjou-Touraine, l’Abbaye Royale de Fontevraud, fondée en 1101, est aujourd’hui un lieu d’art, de culture et d’histoire, incluant à la fois des monuments touristiques, mais aussi des espaces de congrès et d’hôtellerie.
Le projet qui s’est échelonné sur près de trois ans a été conduit par Hervé Thermique.
Un des points principaux a été la création d’une chaudière biomasse en remplacement d’une chaudière fioul : la chaufferie et les systèmes d’extraction ont été enterrés ou semi-enterrés et s’intègrent ainsi parfaitement dans l’harmonie architecturale du site.
Les réseaux de distribution (eau chaude et eau froide) desservant la vingtaine de bâtiments du site, étendus sur une superficie de 13 ha, ont tous été enterrés.
La GTB concerne principalement la gestion des locaux techniques et CVC, le comptage d’énergie local et déporté et les communications d’informations aux différents services de l’abbaye (accueil touristes, commerciaux, services informatiques, exploitants).
La couche de communication sur IP fédère les échanges de la trentaine d’automates Saia Burgess Controls qui gèrent en outre les communications M-Bus avec les compteurs, la liaison Modbus avec la chaudière, une connexion FTP avec le logiciel de suivi énergétique NOE, les pages serveurs Web pour les tablettes mobiles des personnels et pour les totems ou TV d’information au public, la gestion des mails pour l’astreinte mais aussi vers l’hyperviseur PWS du site.
Légende : La GTB couvre également le pilotage CVC et éclairage de l’hôtel Saint Lazare de l’abbaye