Électricien+ : Présentez-nous tout d’abord l’activité de Schneider Electric Retail.
Bruno Capdordy : Le Retail, c’est l’activité transactionnelle, les produits sur les étagères.
Nos clients sont composés d’un côté de la filière professionnelle qui construit, instrumente les réseaux de distribution et de contrôle de l’énergie et de la VDI dans le logement, dans le petit tertiaire.
Nous allons donc de l’artisan électricien au promoteur pour bien comprendre, aider la filière au quotidien et accompagner dans la transformation des logements et des bâtiments.
Nous adressons également les consommateurs via les canaux GSB.
Nous avons aujourd’hui identifié deux grandes filières dans le résidentiel : une filière du logement neuf industrialisé, avec des verticaux, des promoteurs, des constructeurs de maisons individuelles, des grands bureaux d’études ; et une filière du marché de la rénovation résidentielle et du petit bâtiment tertiaire, avec des artisans électriciens, des auto-entrepreneurs, des bricoleurs, des consommateurs…
Tous les installateurs français ont un compte chez un distributeur. Quelle est votre stratégie pour informer sur le point de vente ?
Nous avons beaucoup travaillé le parcours client.
Il y a aujourd’hui une fréquentation croissante des médias digitaux, y compris de la part de la clientèle professionnelle.
Nous voyons des acteurs de la distribution électrique professionnelle qui investissent sur le Web.
Concrètement, le contenu, hier matérialisé par des flyers, des brochures, des catalogues, est maintenant complété/amplifié et proposé via des médias digitaux.
Il y a aussi, de notre part, un relais en point de vente, car certains clients n’ont pas encore pris le virage du digital.
Ce relais en point de vente peut prendre notamment la forme de catalogues plastifiés et de catalogues papier à disposition des clients.
Dernière partie de notre stratégie, injectée cette année : le trade marketing et le merchandising, avec un dispositif en magasin qui amplifie les messages et soutient nos ambitions communes de transformation.
Nous pensons que la mutation de notre clientèle s’effectuera selon deux axes : d’abord le format digital, de plus en plus apprécié, ensuite une mutation des points de vente, avec du libre-service, du conseil pour les professionnels, un repérage un peu à l’image du rayon et de la tête de gondole, pour interpeller et expliquer les technologies.
Quelles offres proposez-vous pour augmenter la valeur ajoutée de l’installateur chez son client ?
Notre objectif est de connecter nos tableaux résidentiels et nos tableaux tertiaires, de délivrer un service supplémentaire pour le client final, qu’il soit consommateur ou utilisateur.
Nous faisons donc un relais sur la partie applicative et sur le site Web, soit directement vis-à- vis du consommateur via des campagnes de communication ; soit via des outils qui permettent à l’installateur de faciliter la vente, en face à face, avec des formations pour l’aider à vendre et à réaliser le bon devis ; soit via des applications qui permettent de montrer les différentes connexions d’appareillages.
Nous avons également des applications facilitant le chiffrage et l’upselling sur le chiffrage.
Vous pouvez voir, par exemple, en changeant tel ou tel élément de déco – le Mix&Match de Schneider Electric –, quel sera l’effet sur le devis.
La domotique se développe. Schneider Electric semble surtout se focaliser sur le côté énergétique…
La partie énergétique est effectivement un angle prioritaire pour nous.
Nous sommes dans ce sentiment d’urgence, de nécessité de réduire notre consommation et notre empreinte carbone en France, de réduire la consommation énergétique des consommateurs et des bâtiments tertiaires et industriels.
C’est l’ADN cœur de Schneider Electric, qui est le leader de la gestion de l’énergie dans le monde.
La domotique résidentielle a été la traduction de ce positionnement.
Au-delà, nous travaillons sur le contrôle d’autres usages, pour rendre le logement ou le bâtiment tertiaire plus confortable, plus agréable.
En contrôlant les volets roulants, l’éclairage, les prises, nous parvenons à créer un écosystème domotique plus complet.
Et, via une stratégie de partenariats, nous travaillons aussi sur la visibilité de l’information, par exemple pour connecter nos produits de collecte d’informations énergétiques Wiser Link et les projeter sur un portier vidéo.
Nous avons développé ces deux dernières années des packages produits qui travaillent à la fois sur les piliers de l’énergie et du confort.
Pouvez-vous dresser un premier bilan après trois ans de vente de l’offre Wiser ?
Sur la partie Wiser Link, nous avons une offre située dans le tableau résidentiel électrique, qui vise à mesurer les usages, à remonter cette information sur un écran, puis sur la tablette et le smartphone des particuliers.
Aujourd’hui, c’est un produit plébiscité par la filière professionnelle, qui n’est pas encore tout à fait révélé au consommateur.
Il nous reste un travail à faire pour qu’il prenne conscience de ce que peut lui apporter ce produit dans son logement, en matière d’énergie visible et, demain, de sécurité visible.
Nous sommes très satisfaits de la pénétration de ce produit sur le marché, mais nous pouvons aller encore plus loin.
Le Wiser Smart, concerne les logements en rénovation pour connecter le chauffage et les prises, et pour mesurer la consommation.
Le marché est naissant et nous faisons de la pédagogie pour éduquer le marché.
L’IoT (Internet of Things, ou Internet des objets) se développe très fortement, mais de manière désordonnée. Quelle est la stratégie de Schneider Electric sur ce secteur ?
Tout d’abord, pour nous, l’IoT doit être entre les mains du professionnel, via son installation connectée, pour rendre plus de services et plus de bénéfices à l’usager.
Des modules sont créés pour le consommateur, mais lorsque nous devons couvrir tous les grands verticaux d’un logement/bâtiment (chauffage, contrôle des volets roulants…), la filière professionnelle apporte une très grande valeur ajoutée.
Nous travaillons sur des partenariats industriels parce que, comme nous sommes sur de l’installation parfois industrialisée, il faut faire gagner du temps lors de l’installation et ne pas pénaliser le chantier. Le deuxième pilier de notre stratégie, c’est d’avoir des interfaces utilisateurs « best in class », avec une expérience client maîtrisée.
Sur Wiser Smart, nous souhaitions avoir des systèmes plutôt fermés pour nous assurer que l’expérience consommateur serait best in class.
Le challenge est plutôt réussi puisque nous avons une application aboutie, qui apporte du confort, qui est rapide, et le client est satisfait.
Le troisième pilier, c’est une ouverture avec le protocole KNX.
Et nous avons une passerelle « KNX to cloud » appelée HomLynk, lancée l’année dernière, qui pourra se doter d’éléments pour remonter les informations à distance et assurer la compatibilité.
Pour résumer, notre stratégie concerne l’intégration dans un chantier, sans pénaliser ce dernier.
Ensuite, la maîtrise par le consommateur de la technologie.
Puis l’ouverture sur un backbone KNX. Le futur, c’est la participation aux alliances, aux technologies d’Apple et Google.
Nous devons voir comment sécuriser l’expérience consommateur et utilisateur tertiaire, et garantir la compatibilité avec ces systèmes.
Les dernières nouveautés produits Schneider Electric sont très numériques. Est-ce la nouvelle tendance ?
C’est une volonté.
Aujourd’hui, quand vous voulez connecter des écosystèmes les uns avec les autres pour réaliser un réseau intelligent, il faut digitaliser l’information quelle qu’elle soit, et donc arriver à digitaliser le chiffre et la conception des tableaux tertiaires, à connecter les produits au cœur de Schneider Electric, et renvoyer les datas.
Il faut aussi digitaliser et connecter les produits de contrôle…
C’est une tendance de fond de notre entreprise.
Jean-Pascal Tricoire l’a très bien exprimé, la stratégie de Schneider Electric couvre le court, le moyen et le long terme, elle vise à connecter l’ensemble de son portefeuille de produits, à digitaliser l’information de consommation, de protection, de contrôle, pour réaliser ce fameux réseau intelligent.
L’affichage de la consommation marque le pas et ne passionne pas grand monde. N’est-ce pas un frein à la diffusion de vos produits ?
Nous restons cohérents par rapport à notre position et à nos convictions.
Nous sommes tous préoccupés, chez Schneider Electric, quant à l’urgence de la situation énergétique.
Il y a quelques années, les particuliers et les entreprises n’étaient pas très préoccupés par ce phénomène.
Nous estimons qu’il y a urgence et que nos offres doivent permettre à des particuliers qui ont le même sentiment que nous de réaliser des économies dans leur logement, en termes de consommation énergétique.
Il y a tout un pan de la domotique entraîné aussi par la sécurité, par le contrôle des volets roulants, et nous ne le négligeons pas.
Nous l’adressons via une offre packagée KNX qui permet d’allier le confort à l’efficacité énergétique, mais nous ne renierons pas nos convictions.
Les installateurs ont-ils les compétences et les formations pour installer autant de numérique ?
C’est le devoir de tous les fabricants d’accompagner la mutation de la filière vers ces technologies, par des formations.
La filière s’est beaucoup améliorée sur ces sujets au cours des dernières années, et nous avons également développé des produits plus faciles à connecter.
Notre devoir se situe, en effet, à deux niveaux : la simplicité du produit, et la formation. Les installateurs sont pointus, ce n’est pas la première fois qu’ils font du réseau.
C’est donc une mutation naturelle pour eux, même s’il y a des problèmes un peu compliqués d’adressage.
En 2014, vous lanciez l’Openinnovation.club. Quel bilan dressez-vous et avez-vous trouvé LA pépite industrielle ?
Il s’agissait d’un concours d’innovation avec des start-up.
Il nous a apporté quatre innovations que nous avons injectées dans nos gammes, dans des produits lancés ou qui vont l’être.
L’Openinnovation.club nous a permis de collecter beaucoup d’idées et de réaliser des partenariats avec des entreprises.
Nous vous en dirons plus dans quelques mois quand les produits sortiront…
Pour conclure, comment résumeriez-vous votre stratégie ?
En résumé, notre stratégie est d’assurer les fondamentaux en termes de performance, de qualité de montage sur les fonctions cœur des produits, puis de le connecter et de digitaliser l’information car celle-ci permettra de mieux
servir les objectifs du bâtiment, du logement et du site industriel.
En effet, en comprenant comment se comporte le bâtiment, le logement en temps réel, nous pouvons réajuster celui-ci et le rendre plus flexible, en harmonie avec les besoins des occupants, gestionnaires de patrimoine, consommateurs.
À court terme, notre objectif est de connecter le tableau logement, de rendre cette énergie visible, de rendre également visibles les organes de sécurité sur des applications pour le particulier, sur smartphones et tablettes.
De créer aussi de la déco sur le tableau logement – un héros mal connu ! –, qui protège tout le monde dans la maison depuis des années.
Grâce à lui, il y a moins d’incendies en France, il y a moins d’électrocutions.
On le voit quand un tableau est mal conçu ou n’est pas mis à jour.
Notre objectif est de rendre justice à ce tableau, à le rendre un peu plus esthétique, à faire en sorte qu’il se connecte pour que vous puissiez voir en direct votre consommation et ce qui est sécurisé ou pas… Voilà ce qui va alimenter notre communication et notre stratégie dans les mois et les années à venir.