J3e – Quels sont les grands gisements d’efficacité énergétique pour les bâtiments et en particulier pour le tertiaire et les logements collectifs ?
Myriam Maestroni – L’efficacité énergétique constitue la « cinquième énergie », celle que nous ne consommons pas. En France et dans les pays développés, la surconsommation d’énergie est de l’ordre de 20 à 30 %, mais en parallèle 1,3 milliard de personnes n’ont pas accès à l’énergie dans les pays en développement. L’efficacité énergétique remet le consommateur au cœur de l’équation : il devient producteur de l’énergie qu’il ne consomme pas. Comme les petits ruisseaux font les grandes rivières, à l’échelle d’un pays, l’efficacité énergétique constitue une source d’énergie à part entière, que je considère comme constituant la « cinquième énergie ». Il existe trois leviers sur lesquels il faut agir : l’énergie 1.0 qui concerne les comportements, l’énergie 2.0 qui implique davantage la mise en place de travaux de rénovation énergétique et l’énergie 3.0, plus technique, qui englobe l’ensemble des technologies relatives à la gestion de l’énergie. Aujourd’hui, de nombreuses solutions existent, mais il ne faut pas croire à la solution « miracle ».
J3e – Selon-vous, quels sont les outils les plus efficaces pour encourager les particuliers et les entreprises à mener des actions d’économies d’énergie ?
Myriam Maestroni – Tous les outils sont efficaces ! La question que nous devons nous poser est : comment marketer les outils pour inciter les clients finaux à mener des travaux ? Selon nous, une solution s’est montrée particulièrement efficace : l’Eco-prime adossée aux CEE (Certificats d’Économies d’Énergie), qui permet un financement d’amorçage et joue un rôle pédagogique en expliquant les actions concrètes à mener, directement aux clients finaux. D’ailleurs, 62% des bénéficiaires déclarent que le distributeur de cette Eco-Prime a été un facteur important, voire décisif dans la décision de réaliser des travaux (étude TNS Sofres 2015). Pour la phase de mise en œuvre et le financement des travaux, des prêts bancaires spéciaux sont prévus en fonction des types de projets, des clients et selon les situations financières spécifiques. Notre objectif est aujourd’hui de proposer à nos clients des solutions personnalisées comprises dans des offres globales. Il nous faut pour cela travailler sur nos outils marketing et nos bases de données pour comprendre au mieux chaque situation et répondre à des besoins propres. Le marché potentiel qui s’offre à nous représente 500 000 rénovations de logements chaque année pour 15 millions de logements à rénover en France. Notre principal enjeu est donc l’élargissement de notre gamme de produits, mais aussi l’analyse des consommations et des besoins de nos clients.
J3e – Vous avez reçu au début de l’année 2015 le trophée de la femme en or dans la catégorie environnement, le prix des femmes engagées et le prix du développement durable. Pouvez-vous nous en parler ?
Myriam Maestroni – Après avoir occupé pendant 20 ans de hautes fonctions chez des grands producteurs et fournisseurs d’énergies fossiles (pétrole et gaz), j’ai fait en 2011 ma révolution copernicienne en passant de l’autre côté du miroir : je me suis lancée à partir de zéro dans la création d’une start-up qui, au lieu de vendre de l’énergie à ses clients comme j’en avais l’habitude, vendait des économies d’énergie. Pour moi, ces trois distinctions revêtent une portée symbolique et m’ont apporté une grande fierté personnelle et une reconnaissance envers mon engagement dans cette cause qu’est l’efficacité énergétique. Ces prix sont aussi un signe de reconnaissance pour mes équipes, très jeunes et un formidable signe d’encouragement. Je pense pouvoir dire aujourd’hui que c’est un pari gagné.