Très peu évoquée lors du débat français sur la transition énergétique, la question du gaz comme énergie de complément pour les années à venir refait aujourd’hui surface. La Coénove, association créée en septembre dernier et regroupant les principaux acteurs de la filière (GRDF, Vaillant, Viessmann, Bosch, Atlantic…), revendique en effet un recours croissant au gaz en s’appuyant sur la complémentarité des réseaux énergétiques et la production de gaz vert.
Si l’exploitation du gaz dans la production d’électricité affiche un bilan carbone bien supérieur aux énergie renouvelables, elle présente toutefois quelques avantages bénéfiques à leur développement. La forte capacité de stockage énergétique du réseau gazier pourrait en effet, selon l’association Coénove, s’imposer comme une solution temporaire aux problèmes d’intermittence des énergies solaire et éolienne. Le réseau gazier actuel peut stocker jusqu’à 25 térawattheures d’énergie sous forme d’hydrogène, en incorporant 6% d’hydrogène dans le méthane, offrant ainsi la possibilité d’emmagasiner les excédents de production des énergies renouvelables électriques, dans l’attente de leur reconversion en électricité.
Comme l’explique sur Actu-Environnement, Benjamin Dessus, membre de l’association scientifique Global Chance, « il est aujourd’hui possible de jouer sur la complémentarité entre les réseaux en convertissant de l’électricité en hydrogène ou en gaz », atteignant à terme un système énergétique totalement renouvelable basé sur la synergie des réseaux électrique et gazier. Un argument de poids en faveur d’une énergie thermique très courante en France (21% contre 24% pour l’électricité dans la consommation finale d’énergie) et dont le bilan en terme d’émissions de CO2 et d’efficacité énergétique s’améliore chaque année.
En effet, les progrès technologiques opérés dans la filière gazière permettent aujourd’hui de réduire encore un peu plus son bilan carbone. Le chantier du Terminal méthanier de Dunkerque par exemple, troisième chantier industriel de France, propose dans ce sens un nouveau processus de réchauffement du GNL (Gaz naturel liquéfié) exploitant la chaleur existante des eaux rejetées par la centrale nucléaire de Gravelines située à 5 km (via un tunnel creusé à 50 mètres de profondeur sous la mer). Évitant ainsi au terminal de brûler du gaz pour réchauffer l’eau utilisée pour regazéifier le GNL (procédure indispensable à son exploitation et généralement très coûteuse en énergie), ce dispositif inédit réduira les émissions de CO2 de 50.000 à 100.000 tonnes par an et permettra de générer chaque année un gain énergétique équivalent à la consommation annuelle de gaz de l’agglomération dunkerquoise. Construit par Dunkerque LNG, coentreprise d’EDF (65%), du belge Fluxys (25%) et de Total (10%), le Terminal méthanier a mobilisé plus de deux milliards d’euros d’investissements et permettra de fournir l’équivalent de 20% de la consommation annuelle de la France et de la Belgique.
Ajouté à cela, le gaz renouvelable issu du processus de méthanisation progresse lui aussi. « Pour le moment, il n’en est qu’à ses débuts, moins de 1% du gaz consommé en France, mais il va monter en puissance, les objectifs sont d’ailleurs ambitieux, avec 10% de gaz renouvelable en 2030 et 70% en 2050 », explique Bernard Aulagne, président de l’association Coénove.
Enfin, les progrès technologiques des industriels gaziers concernent également l’efficacité énergétique et sont d’ores et déjà visibles chez les particuliers. Ces derniers peuvent désormais s’équiper de chaudières à condensation nouvelle génération permettant une économie d’énergie de 25% en comparaison aux chaudières traditionnelles.