Retour du CES 2015 : une édition sous le signe du connecté
Le Consumer Electronics Show, ou CES, salon consacré à la haute technologie, se tient annuellement à Las Vegas. Il est aujourd’hui devenu le plus important événement du genre. Constructeurs, journalistes et férus de nouvelles technologies s’y côtoient sur les lieux d’exposition de la première ville des États-Unis en termes d’accueil de manifestations. Annonces majeures et présentation d’innovation sur place donne le ton pour l’année qui suit à la planète technologie. Lors de cette édition 2015, deux tendances étaient à retenir : la présence de la France et le décollage de l’Internet des objets.
Une vitrine internationale pour la technologie française
Pour une entreprise, venir au CES, c’est accéder à une vitrine internationale, avec ses 150 000 participants venus de 140 pays. Pour les 3 600 exposants, dont les géants de l’électronique Samsung, LG et Sony, sur une surface de 185 000 m2 entre le centre de convention de la ville et les grands hôtels, l’enjeu est de développer de la visibilité. La mission French Tech pilotée par Bercy avait fédéré les start-up françaises sous le slogan « France is innovante ». De fait, la France a emmené sur place la première délégation européenne et cinquième au niveau mondial avec 120 entreprises, loin devant l’Allemagne (39) et le Royaume-Uni (33), allant des grands groupes tels que Dassault Systèmes, L’Oréal, La Poste ou Valéo, aux start-up (66 contre 38 l’an dernier). Soit une sur trois dans l’espace dédié du salon Eureka Park ! Si le succès de communication est indéniable, il reste à la French Tech à transformer cette forte impression en succès économique durable.
Les objets connectés, du discours à l’industrialisation
Déjà grande tendance de 2014, la démocratisation des objets connectés a clairement continué à croître en 2015. Si les deux dernières années ont vu émerger de nouveaux objets dédiés au sport et au bien-être, on a découvert cette année des produits destinés à des usages plus spécifiques.
Pas moins de 900 entreprises du monde entier opérant dans le secteur des objets connectés étaient présentes à travers les innovations proposées par des acteurs bien connus du marché, comme Withings, Cityzen ou Archos, mais également des start-up encore peu connues comme Airboxlab, Photonotix, 3DRudder, Ticatag, 12 Monkeys… La concurrence augmentant fortement sur ce marché, il sera intéressant de voir si les innovations présentées sauront convaincre le grand public à moyen terme. Outre la mesure de soi, il est clair que la thématique de la maison connectée, et de la domotique sous des formes très variées, a fortement émergé lors de cette édition 2015.
La montée en puissance du smart home
Sur Eureka Park, l’espace Smarthome est presenté par Bosch : un parrainage thématique qui voit se décliner sous sa bannière des entreprises françaises comme Archos, Netatmo, MyFox, etc. Au CES Tech West, sur Sands expo, au Venetian, la plupart des entreprises sont récentes : Nod-on a tout juste un an et demi, OK-dokey, quatre ans, Holi en est à son troisième CES et Netatmo souffle ses quatre bougies.
Avec Security System par exemple, une alarme connectée à Internet destinée à prévenir les effractions avant même que les cambrioleurs soient entrés dans la maison, MyFox utilise un système de détection de vibration très pointu. Il reste possible de donner les « clés » des alertes à des personnes de confiance dans l’entourage, par l’intermédiaire de l’application smartphone dédiée. La fonction MyFoxAround prévient par ailleurs de la perte de connexion Wi-Fi en envoyant des alertes par ondes radio à d’autres Security Systems installés chez les voisins, dans un rayon de 3 kilomètres.
Chez Netatmo, société française qui s’est déjà illustrée avec une station météo connectée, la nouveauté s’appelle Welcome. C’est une petite caméra qui sait identifier les personnes qui passent face à son objectif et envoyer une alerte aux maîtres des lieux en cas de présence non sollicitée. Pour Raphaëlle Raymond, directrice marketing de Netatmo, le fonctionnement de cette caméra capable de reconnaître les membres de la famille se veut respectueuse de la vie privée et veille à ne partager aucune des données qu’elle recueille avec l’extérieur.
Un peu plus loin sur le stand de l’entreprise, se trouvent les produits « historiques », dont le thermostat pour smartphone, qui permet de contrôler son chauffage à distance pour qu’il suive les habitudes de vie et de réaliser de vraies économies d’énergie au quotidien.
« Ce dernier a été fabriqué pour être compatible avec les chaudières du marché européen, précise Raphaëlle Raymond, qu’elles soient au gaz, au fioul, au bois, et même les pompes à chaleur. »
Ouverture et compatibilité : des enjeux stratégiques
Pour nombre d’acteurs, le sujet imminent est celui de la compatibilité des applications et du système connecté de la maison.
Ainsi le constructeur français de smartphones, tablettes et objets connectés Archos ouvre-t-il sa solution Smart Home à d’autres marques de domotique. Bénédicte Ernoult, sa directrice marketing, présente ainsi au CES 2015 une nouvelle version de la tablette connectée « smarthome ». C’est une tablette placée au centre de la maison, qui permet de télécommander les applications du domicile. L’an dernier, Archos présentait des accessoires Bluetooth et low energy. Cette année, la compatibilité est augmentée. En ajoutant des accessoires RF 433, trouvés dans les magasins de bricolage et la grande distribution, ce sont portes de garage, volets, prises connectées, pilotables depuis la tablette ou le smartphone que les consommateurs vont pouvoir équiper. Une caméra IP est également intégrée afin de pouvoir surveiller depuis l’extérieur ce qui se passe chez soi.
Un peu plus loin parmi les stands s’expose la serrure connectée d’OK-dokey, société basée à Biarritz. Pilotée par une application mobile, elle permet d’ouvrir et fermer sa porte à distance, mais aussi de partager ses clés, sous forme de lien, avec ses voisins, sa famille ou des locataires. « L’ensemble se connecte au système de maison intelligente, avec interface et API ouvertes », explique Pascal Métivier, fondateur de l’entreprise. L’avantage : cela évite les échanges de clés physiques et peut se piloter à distance.
Fournisseur de device et de hardware, Nod-On a quant à lui pour objectif de donner accès à la domotique à tous à travers des objets connectés. « Avec un Design sympa et des canaux de distribution grand public permettant des prix abordables, précise Thomas Gauthier, CEO.
La start up travaille aujourd’hui sur deux protocoles technologiques : tout d’abord le protocole Enocean, qui a la particularité de fonctionner sans fil et sans pile. Avec des objets soft remote, il permet de faire du contrôle de chauffage ou des appareils électriques. Cela peut prendre la forme d’une télécommande, d’un interrupteur mural ou d’autres produits comme des capteurs d’ouverture de fenêtre. Présenter des produits bien designés peut apporter un plus au fonctionnement de la maison.
Par ailleurs, Nod-On propose une gamme de produits Z-wave, protocole très répandu aux Etats-Unis et de plus en plus en Europe. Interrupteur mural, smart plug, télécommande, à intégrer dans des réseaux larges, gérés par une gateway pour faire du contrôle de chauffage ou de lumière.
Après salon : des enjeux multiples
De retour de Las Vegas, ces start up innovantes vont avoir à faire face à un enjeu majeur qui est celui de l’industrialisation et de la distribution, rappelle Dimitri Carbonnelle, expert en objets connectés auprès de la mission French Tech.
Pour les entreprises traditionnelles, l’enjeu est de prendre conscience rapidement de l’urgence à se poser la question de l’influence de l’internet des objets sur leur activité, sous peine de se retrouver pour certaines marginalisées sur leur propre marché. En première ligne, l’automobile, l’hotellerie et l’équipement de la maison. A la vitesse où certains secteurs se réinventent, des réponses seront certainement données chez ces acteurs d’ici le CES 2016.