Il est 8h du matin à l’ancienne Bourse de Paris, et le Ministre se fait attendre. Pour l’accueillir, des acteurs de tous horizons : ambassadeurs, acteurs institutionnels et civils, venus entendre les intentions affichées par la France, à un an de cette Conférence dont on attend beaucoup. La salle se remplit et l’invité d’honneur arrive enfin. Gilles Berhault et Bettina Laville, fondatrice du Comité 21 et présidente du Comité d’orientation scientifique du Club France développement durable rappellent en préambule l’obligation pour la France de convaincre les négociateurs ainsi que la forte implication de la société civile, autant au niveau des entreprises que des citoyens. La prise de conscience est aujourd’hui effective pour la plupart, reste à convaincre les sceptiques.
« Plus vaste Conférence diplomatique de l’histoire de France »
Au total pour la Conférence de 2015, 20 000 délégués, 20 000 invités et 3 000 journalistes seront attendus au Bourget pour « la plus vaste Conférence diplomatique de l’histoire de France » rappelle Laurent Fabius. « Il faudra convaincre 195 pays et 196 parties, en comptant l’Union européenne, ce qui n’est pas aisé sachant que la plus petite partie vaut la plus grande. » Ironise-t-il. Mais depuis quelques années, la prise de conscience se fait de plus en plus sentir et les fantômes des sommets sans accords commencent à s’éloigner pats à pats : « l’irruption scientifique, politique et civile » amène trois changements fondamentaux dans le traitement de la question climatique : la science d’abord, a permis d’apporter des preuves concrètes des changements climatiques si bien qu’aujourd’hui, mis à part quelques débats idéologiques aux Etats-Unis, le phénomène n’est plus contesté. La prise en compte du phénomène par les politiques constitue également un élément central, bien que peu d’accords concrets aient aboutis. Mais le point clé du changement climatique vient de sa prise en compte par la société civile, et en particulier par les entreprises, acteur central des bonnes conduites.
La préparation est la clé du succès
A en croire le ministre, les échecs des sommets précédents étaient dus à un cruel manque de préparation et à des accords à minima conclus la dernière nuit. Pour y remédier, les 196 parties devront fournir entre mars et octobre leurs engagements en faveur du climat et un outil juridique a même été créé pour assurer la qualité des résolutions : « une clause de non-régression a été mise en place pour interdire chaque partie à prendre des engagements inférieurs à ceux déjà pris. » Enfin, la mise en place d’un nouvel agenda, entamé lors de la Conférence de Lima, constituera un autre objectif de la Conférence de Paris.
5 blocs d’actions financières
Pour ce sommet, cinq points du domaine financier devront être mis sur la table : d’abord concernant les finances publiques, avec la création de fonds verts assurés par des banques bilatérales. Le rôle des banques centrales devra également être repensé, pour adapter davantage leur capacité à investir dans le sens du climat. Les agences de notation devront quant à elles évaluer en plus du risque financier, les risques climatiques. Du côté des finances privées, l’objectif sera d’orienter les marchés et les investisseurs vers le durable. Enfin, le carbone devra rapidement avoir un prix, induit dans chaque bien ou service qui mène à sa production. Pour le moment, rappelle Patrick Klugman, adjoint au maire de Paris au sujet des relations internationales, « l’économie verte représente aujourd’hui moins de 1 % du portefeuille traditionnel. L’objectif est d’atteindre les 10 % en 2020, grâce au soutien d’acteurs divers. »
Le sommet de Lima, faux départ pour la COP 21
Tenue en décembre dernier au Pérou, la Conférence de Lima avait pour objectif de fixer le cap en vue des négociations de la Conférence de Paris en 2015. Après 24 heures de prolongations, les 195 parties se sont mises d’accord sur la réduction de 40 à 70 % des émissions de gaz à effet de serre d’ici 2050, mesure reposant pour l’instant davantage sur la bonne volonté des Etats que sur la mise en place d’une quelconque législation contraignante. Pour que les négociations aboutissent à Paris, il faudra que les pays riches s’engagent à montrer l’exemple et à soutenir financièrement les pays en développement, souhait formulé par le groupe Afrique ou encore le Brésil et la Chine.
Un an avant la COP 21, le chemin est encore long pour aboutir à un accord ambitieux, contraignant et efficace. D’ici décembre, les négociateurs se retrouveront à l’occasion de plusieurs rendez-vous : du 8 au 13 février à Genève pour poursuivre les discussions autour du document de travail du futur accord de Paris et lors d’une réunion à Bonn du 3 au 14 juin. Une dernière session intermédiaire aura lieu fin novembre avant peut-être d’aboutir à un accord historique à Paris, qui entrerait en vigueur en 2020.