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RGE et filière électrique

La mention RGE obligatoire pour les aides à la rénovation énergétique

Plus précisément, seules les entreprises qui interviennent sur les chantiers de rénovation énergétique et qui sont titulaires d’un signe de qualité « Reconnu garant de l’environnement » (RGE) pourront faire bénéficier leurs clients des aides publiques prévues : éco-prêt à taux zéro (éco-PTZ) à partir du 1er septembre 2014, aides locales, puis crédit d’impôt développement durable (CIDD) en 2015.

Sont concernés tous les travaux concourant à l’amélioration énergétique des bâtiments résidentiels (collectifs ou individuels) des particuliers.

Pour la filière électrique et les artisans électriciens, les travaux principaux concernés sont : travaux d’efficacité énergétique, installation d’équipements électriques hors énergies renouvelables, ventilation, installation d’énergies renouvelables, chauffage et/ou eau chaude solaire, pompe à chaleur, ballon thermodynamique.

La situation et l’importance de la mention RGE pour la filière

Côté face, il y a les acteurs qualifiés via Qualit’EnR, avec plus de 11 000 adhérents avec la mention RGE dont 6 700 sur les qualifications QualiPac, QualiPV et QualiSol.

Côté pile, il y a un écho plutôt faible des acteurs de la filière, depuis les fabricants, en passant par les distributeurs de matériels électriques.

« Nous avons anticipé en communiquant dès 2013 et mis en place début 2014 un programme de formations FEEBat accessible à nos clients dans l’ensemble de nos agences Rexel partout en France. Nos animateurs Habitat, accompagnés des équipes commerciales ainsi que de nos spécialistes en génie climatique et efficacité énergétique, ont alerté et communiqué sur les intérêts et les enjeux de la mention RGE », souligne Benoît Petit, chef de projet Marketing Client chez Rexel.

Nous constatons une montée en puissance récente du dispositif, mais sommes conscients du travail qu’il reste à réaliser pour sensibiliser encore plus de clients. Nous avons notamment renforcé notre dispositif de communication sur l’ensemble de nos supports. Nous mettons également en place un simulateur permettant, à côté du prix du projet, de mettre en évidence les aides qui sont disponibles (CIDD, CEE…) et le retour sur investissement, ajoute-t-il.

Cette amorce lente peut s’expliquer parce que la mention RGE est intéressante, en premier lieu pour les entreprises qui ont des clients particuliers ou qui interviennent sur des immeubles collectifs.

« De fait, les électriciens sont assez peu représentés, à peu près 5 % de la population que nous avons formés depuis un peu plus de 18 mois », souligne Jean-François Ploteau, responsable pédagogique et formateur au sein d’Ecolusis.

Et l’habitude de travailler en équipe n’est pas forcément bien installée, ce sont plutôt les autres artisans qui sollicitent les électriciens, mais en priorité pour le tirage de câbles et pas forcément pour l’efficacité énergétique active, complète-t-il.

« La formation pour obtenir la mention RGE est plutôt axée rénovation, et doit permettre au référent technique désigné par l’entreprise d’avoir pleine conscience que la rénovation performante ne se fait pas poste par poste mais globalement. »

Mise en évidence de détection des fuites d’air avec la caméra thermique. ©DR

Au-delà de la norme d’installation et de sécurité électrique, il est nécessaire de participer à l’efficacité énergétique globale avec des méthodes de travail qualitatives, qui respectent notamment l’étanchéité.

Du point de vue métier électricien, les impacts sont nombreux et divers :

  • La ventilation : avec d’une part l’enjeu de poser la bonne ventilation sur le bon type de bâtiment et, d’autre part, l’importance de réaliser des travaux électriques qui respectent l’étanchéité à l’air du bâtiment pour garantir la performance énergétique et le rendement du système de ventilation.
  • Sur la partie chauffage, les dispositifs de régulation, et notamment pièce par pièce particulièrement au niveau du chauffage électrique, sont des points fondamentaux.
  • Sur la partie domotique et courant faible, la rénovation globale d’un logement peut être l’occasion de proposer et de mettre en place les concepts qui vont de soi dans un habitat moderne : réseau VDI, domotique appropriée à la situation de l’occupant.
  • Sur la partie éclairage, les évolutions sont également substantielles, l’éclairage LED monte en puissance et diminue fortement la consommation d’éclairage.
  • Sur la partie courant fort, l’étanchéité nécessaire pour un habitat performant énergétiquement impacte aussi l’électricien : le placement des réseaux, l’étanchéité de ceux-ci, la mise en place du tableau en volume chauffé, les points d’attention sont multiples.
  • Sur la partie eau chaude sanitaire, le remplacement du cumulus électrique par un ballon thermodynamique ou un ballon solaire sont des solutions intégrantes d’une bonne gestion de l’énergie pour l’ECS.
  • Enfin, le comptage énergétique, obligatoire en neuf : avec la montée en puissance des dispositifs de flexibilité de la demande électrique et la nécessaire réduction ou effacement des consommations, ce dispositif peut aussi trouver sa place en rénovation.

Dominique Vignot, en charge de la Fabrique 21 (Pôle écoconstruction Seine aval, dans les Yvelines), ajoute : « Il ne faut surtout pas oublier qu’il n’est plus possible de travailler seul dans son coin, le geste de chacun impacte le résultat des autres et le succès final du projet. Et l’électricien, même si les travaux sont induits du fait par exemple de la mise en place d’une isolation intérieure, participe à ce résultat de manière forte. » De plus, tout sous-traitant concerné par un impact énergétique doit aussi disposer de la mention RGE.

Pour les électriciens qui veulent s’intéresser à la partie fluides et plus précisément à la ventilation (double flux thermodynamique…), nous proposons à la section Formation Fabrique 21 une formation Praxibat ainsi qu’une formation FEEBat rénovation des bâtiments tertiaires, qui, au-delà du RGE, met l’accent non seulement sur l’importance des systèmes de ventilation dans l’atteinte de l’objectif global de rénovation énergétique, mais également s’appuie sur un plateau technique pour mettre en œuvre les bonnes pratiques, ajoute-t-elle.

Les formations les plus adaptées parmi les formations FEEBat

Pour obtenir la mention RGE, trois chemins sont possibles au travers des qualifications Qualit’EnR, Qualibat et Qualifelec.

Pour Qualibat et Qualifelec, le parcours de formation s’appuie sur des modules standard FEEBat.

Deux parcours nous semblent les plus adaptés : les modules M1-M2, 5.1-5.2 ou bien encore un mix des deux parcours (sur 3 ou 4 jours), ajoute Jean-François Ploteau

Les modules 5.1 et 5.2 avec pratique sont intéressants pour sensibiliser aux impacts des métiers de chacun sur la performance globale. « Avec l’exemple d’une construction bois, si l’étanchéité est percée par un corps du second œuvre, la performance sera très vite dégradée. La formation M1-M2 ou même la toute nouvelle formation FEEBat Rénove sont également de bons parcours avec une approche incluant l’usage d’outils de simulation thermique. »

Les professionnels sensibilisés, mais…

L’avis de Christian Olsen, responsable de Luz Elec : « Nous ne travaillons pas beaucoup sur la partie fluides, l’essentiel de nos activités est en rénovation et est liée à la modernisation du chauffage électrique, aux dispositifs de régulation, à la mise aux normes et à la réfection des circuits électriques, et enfin aux courants faibles (VDI). De fait, l’utilité de la mention RGE n’a pas encore été complètement perçue au niveau de notre société, d’autant plus que le RGE ne touche que le logement particulier, et nous adressons aussi le petit tertiaire industriel et les collectivités locales. »

Anne Valachs, directeur général du Serce. ©DR

Et si la mention RGE était généralisée à la rénovation énergétique de tout type de bâtiment ?

Le point de vue d’un des syndicats de la profession : Anne Valachs, directeur général du Serce, Syndicat des entreprises de génie électrique et climatique.

« Pourquoi ne traiter que le logement ? La mention RGE devrait être élargie aux marchés et aux acteurs de la rénovation tertiaire et du logement social », énonce Anne Valachs.

La mention RGE intéresse nos adhérents uniquement pour l’instant « par ricochet », avec les travaux et la maintenance des marchés d’efficacité énergétique des logements sociaux. Par exemple, pour les contrats de performance énergétique (CPE), seules des entreprises compétentes peuvent s’engager en termes d’atteinte de résultats sur des objectifs d’économie d’énergie dans la durée. Former les équipes, assurer leur montée en compétences, est donc essentiel pour améliorer la performance énergétique lors des travaux de rénovation. C’est ce que valorise la mention RGE, mais sur un périmètre restreint.

Le Serce délivre des qualifications professionnelles à ses adhérents, dont une dans le domaine de l’efficacité énergétique. Actuellement, les entreprises peuvent intervenir notamment dans le petit tertiaire, par exemple dans le cadre de l’amélioration de la performance énergétique des équipements d’une école ou d’un petit hôtel. Toutefois, elles ne peuvent se prévaloir de la mention RGE à la différence de l’artisan qui intervient auprès des particuliers. En termes d’image et de communication, il y a donc un décalage malgré un savoir-faire en efficacité énergétique avéré.

« Élargir la mention RGE au tertiaire, mais aussi promulguer le décret relatif à la rénovation énergétique du parc tertiaire tant attendu par tous depuis trois ans… »

Cela ferait grand sens car le marché tertiaire est un marché solvable avec des gains potentiels en termes d’efficacité énergétique très importants. Cela inciterait les grands propriétaires tertiaires à aller vers la rénovation tertiaire. La rénovation énergétique des logements sociaux pourrait jouer, par leur exemplarité au vu des résultats obtenus, un rôle incitatif auprès des particuliers et des copropriétés.

« Nous souhaiterions donc une approche plus complète. La précarité énergétique et le logement individuel sont des aspects importants, mais ce ne sont pas les seuls si nous voulons réussir la transition énergétique. »

Qui dit transition énergétique dit également faire entrer le bâtiment dans sa globalité : le focus sur l’isolation nous semble trop restrictif, et agir sur les équipements nous semble indispensable pour atteindre les objectifs d’efficacité énergétique. L’opposition actif/passif doit vraiment disparaître, nous défendons une vision globale des projets de rénovation énergétique intégrant l’isolation et la gestion de l’énergie et, au risque de nous répéter, étendue à tous les types de bâtiment, conclut Anne Valachs.

Le RGE aussi pour les certificats d’économie d’énergie (CEE)

L’unanimité est faite sur l’importance de la mention RGE, et ce quel que soit le type d’activité des métiers de l’électricité.

Et RGE devient d’ailleurs un sésame de plus en plus incontournable puisque la nouvelle formule 2015 des certificats d’économie d’énergie devrait inclure la nécessité de la mention RGE pour obtenir les CEE.

Gageons donc que la filière électrique se mobilisera encore plus fortement autour de cette mention dans les mois qui viennent.

Interview de Thierry Autric, délégué général de l’association Qualit’EnR.

« Depuis 2013, tous nos adhérents sont automatiquement qualifiés avec la mention RGE. »

Thierry Autric, délégué général de l’association Qualit’EnR. ©DR
Thierry Autric, délégué général de l’association Qualit’EnR.

Pour la filière électrique, Qualit’EnR est, avec Qualifelec, un des deux organismes majeurs permettant d’obtenir une qualification associée à la mention RGE.

Quelle est la situation de vos adhérents sur ce sujet ?

Qualit’EnR a fait évoluer son dispositif fin 2012 pour être en pleine conformité avec la mention RGE, dans le cadre de la signature de la charte RGE.

Depuis cette période, les entreprises qualifiées par notre association sont automatiquement « RGE », ce qui simplifie grandement la démarche pour les professionnels des énergies renouvelables.

On compte à ce jour :

  • Qualisol / Solaire thermique : 2 500 qualifications actives.
  • QualiPV / Solaire photovoltaïque : 1 600 qualifications actives.
  • Qualibois / Bois énergie : 4 800 qualifications actives.
  • QualiPAC / Aérothermie et géothermie : 2 600 qualifications actives.

En quoi la mention RGE est-elle un plus ?

La mention RGE vient s’ajouter aux avantages de la qualification : elle permet aux entreprises de valoriser leur savoir-faire (campagne de communication, annuaire national sur www.renovation-info-service.gouv.fr) et leur professionnalisme dans le domaine concerné.

La mention RGE permet également aux clients de profiter de tous les dispositifs de soutien existants, notamment les aides publiques, et c’est désormais un véritable repère pour guider les particuliers dans le choix d’un installateur.

Avez-vous déjà des premiers retours d’expérience d’entreprises de la filière électrique ayant obtenu la mention RGE ?

Les témoignages que nous avons des entreprises qualifiées sont unanimes : la mention RGE permet de contribuer à identifier les entreprises réellement compétentes, dans un secteur où il faut à tout prix limiter les contre-références. Avec son contrôle de réalisation obligatoire, la qualification RGE permet aux installateurs de mettre en avant les résultats positifs des audits réalisés dans ce cadre.

C’est également cité comme un avantage concurrentiel important pour les entreprises qui savent mettre en avant leur qualification, notamment grâce aux outils de communication qui permettent de la valoriser auprès des prospects (affiches, flyers, site Internet…).

Parallèlement, les professionnels engagés dans la qualification RGE attendent des pouvoirs publics qu’ils stimulent le marché avec des aides incitatives pour les particuliers.

L’efficacité et la rénovation énergétique sont dans l’actualité du moment. Y a-t-il de nouvelles formations en réflexion sur ces sujets au sein de Qualit’EnR ?

Tous les systèmes énergies renouvelables couverts par nos qualifications concourent à l’amélioration énergétique du bâtiment, que ce soit dans le neuf ou dans l’ancien. Couplée à une rénovation, une installation EnR peut permettre de démultiplier les économies réalisées sur la facture énergétique du logement (électricité et/ou chauffage) tout en augmentant la valeur du bien immobilier.

Qualit’EnR travaille actuellement à l’extension de Qualisol au collectif, en partenariat avec Socol, initiative mise en place par Enerplan. D’autres projets à plus long terme sont en cours de réflexion, notamment dans le domaine des systèmes hybrides.

La mention RGE est-elle un véritable levier pour accompagner les changements de la profession ?

Ce dispositif national a un double avantage : permettre aux particuliers d’identifier facilement les professionnels à même de leur proposer des prestations de qualité, mais aussi accompagner une montée en compétence de la filière du bâtiment pour répondre au défi de la transition énergétique.

Une évolution de cette envergure ne se fait jamais sans difficultés, mais c’est un investissement indispensable pour s’adapter au modèle du XXIe siècle basé sur la performance, l’efficience et la responsabilité environnementale.

photo d’ouverture : crédit ©AGGLO.
Jean-François MOREAU:
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