Il en va des textes de lois comme des destins individuels : certains semblent nés sous une bonne étoile, d’autres pas. Pour l’instant, il n’est pas aisé de placer la loi de transition énergétique dans l’une ou l’autre de ces catégories, mais son avenir se dessine sur un fond de plus en plus sombre. Dernièrement, les rumeurs vont bon train sur le report à 2015 de la loi portée par Mme Royal, avant d’être infirmées dans la foulée. Parmi les points de blocage, d’après plusieurs sources, serait la question du financement. Ou plutôt du « tiers financement ».
Ce mécanisme, qui consiste à faire financer les investissements par les économies qu’ils font réaliser, présente pourtant de nombreux avantages. Il permet tout d’abord de ne pas trop attendre de soutien de la part d’un État de toute façon impécunieux. Un argument de poids en ces temps de diètes budgétaires. Surtout, il articule très clairement la question de l’investissement dans l’efficacité énergétique à un ROI clair et identifié dès le début. Mais, pour le mettre en place, il faudrait déroger au monopole bancaire sur le crédit – pas une chose aisée – et permettre à des sociétés spécialisées d’effectuer de tels prêts.
Parmi celles-ci, des sociétés d’économie mixte, des sociétés européennes ou des entreprises qui sont de véritables « réalisateurs d’économies d’énergie », disposent d’un véritable savoir-faire en la matière. Car, au-delà de la seule question du financement, c’est avant tout la capacité à réaliser des économies substantielles, qui est nécessaire. Dans ce numéro de j3e, Jean-Pierre Riche (Okavango Energy) incite d’ailleurs à considérer les économies réalisables sans investissement comme la première source de financement. En effet, en modifiant les comportements et en adaptant les usages, il est possible de diminuer sa consommation de 20 à 50 %. Les économies réalisées ainsi sur la facture énergétique peuvent dégager des marges de manoeuvre pour l’investissement dans des équipements plus coûteux.
Cependant, la facture énergétique est encore bien souvent perçue comme une ligne parmi d’autres, au sein de « frais généraux » mal maîtrisés. Dès lors, il est difficile pour une organisation ou une entreprise de consentir un investissement perçu comme important, pour un gain quasiment pas identifié. Ce qui nous rappelle que le premier levier de l’efficacité énergétique reste encore… la mesure.