Son but est d’introduire les méthodes de travail de l’Internet dans le monde des cleantechs et de faire travailler les start-up et les grands groupes, parfois insuffisamment ouverts à l’innovation externe. L’open innovation, par laquelle un grand groupe intègre l’innovation des start-up, est en effet cruciale. L’économie des géants du numérique, Microsoft et Google, fonctionne autour d’un modèle simple : des entreprises géantes environnées d’un écosystème de start- up, qui sont partenaires ou fournisseurs sur les projets. Pour schématiser, chez Microsoft, pour un employé de l’entreprise, il y en a cinq, employés par des start-up, qui travaillent en lien avec l’entreprise. Or l’économie française n’est traditionnellement pas structurée de cette manière. Elle est partagée entre de grands groupes qui s’appuient sur de l’innovation interne, et de toutes petites sociétés sous-traitantes, avec une insuffisance d’entreprises de taille intermédiaire. C’est d’autant plus dommage que la France ne dispose pas, comme aux États-Unis, de puissants fonds d’investissement, ou, comme l’Allemagne, d’un tissu très dense de grosses PME, voire des fonds publics chinois.
Les start-up doivent donc se tourner vers leurs partenaires naturels : les grands groupes. En effet, dans le secteur des technologies propres, elles ne peuvent s’en passer pour deux raisons. La première, pour compenser des frais de recherche et développement souvent importants car répartis sur des dizaines d’années. La commercialisation doit être conséquente, et les coûts de déploiement à l’échelle mondiale sont colossaux. Par exemple, sur le milliard de dollars de fonds levés par la société Tesla, spécialisée dans la voiture électrique, les trois quarts sont consacrés à la commercialisation. Cette situation est très marquée en France dans le domaine des infrastructures électriques : alors qu’en Allemagne, on peut dénombrer environ deux cents producteurs d’électricité significatifs, en France, les partenaires potentiels pour les start-up sont beaucoup moins nombreux. Pour les grandes entreprises, l’open innovation est la condition pour rester innovantes et pour se développer car plus aucune société n’est à l’abri de la mondialisation et des ruptures dans les modèles économiques. C’est un outil de management, pour dynamiser la recherche et le développement interne, qui débouche trop souvent sur des innovations marketing et pas assez sur des innovations de rupture. Or ces dernières permettent de fixer des standards et des modèles qui permettent ensuite de peser dans les standards mondiaux.
L’innovation est aussi financière. Le monde est dans une situation de surliquidité, d’excédents de capitaux. Beaucoup de capitaux devraient pouvoir se concentrer dans les secteurs du smartbuilding. Aux États-Unis, 90 % des panneaux solaires sont posés en tiers financement (un tiers financeur prête la somme pour installer les panneaux et se rembourse sur une partie des gains réalisés). Pour la première année, il va se poser plus de panneaux solaires aux États-Unis qu’en Allemagne, ce qui conduit à mobiliser l’énorme machine financière américaine, et à générer de l’innovation financière (par exemple, la titrisation (1) du parc de panneaux solaires). En France, le tiers financement du solaire ne se met pas en place.
Le problème est plus important dans l’efficacité énergétique, qui n’est pas aujourd’hui considérée comme « bankable » par les grandes institutions financières. Les projets sont trop petits : les grands financeurs ont besoin de gros projets. Il est difficile d’établir des ensembles homogènes, tant les projets d’efficacité énergétique sont différents. Enfin, le remboursement du financement par une partie des économies réalisées par l’efficacité énergétique manque de « track record » ; elle n’est pas encore considérée comme suffisamment fiable. Si ces conditions étaient réunies, le secteur de l’efficacité énergétique connaîtra un essor sans précédent dans les prochaines années.