La Chambre de l’Ingénierie et du Conseil de France fête son centenaire au mois de novembre. L’occasion de revenir sur son rôle, ses valeurs et l’évolution des professions de l’Ingénierie de la Construction.
François Amblard : La CICF est un syndicat professionnel patronal représentatif. C’est un rôle extrêmement important puisque nous participons au paritarisme sur la gestion et l’organisation de notre convention collective. La Fédération représente l’ensemble des métiers qui fournissent des prestations intellectuelles afférentes au conseil, à l’ingénierie, à l’informatique ou au numérique.
Elle comprend 13 syndicats de métiers et 17 régions, et compte environ 1 800 adhérents, auxquels s’ajoutent un millier d’adhérents relevant d’associations professionnelles rattachées à la CICF (les groupements affiliés). La branche Ingénierie représente environ la moitié de nos adhérents. Parmi nos missions, la défense de l’intérêt de nos adhérents dans les relations avec les maitres d’ouvrages publics et privés est actuellement en développement. Nous avons un service dédié dont le rôle est d’alerter les maitres d’ouvrages qui ne respectent pas les procédures du Code des marchés publics, et d’être présent à leurs côtés. La participation dans les jurys de concours ou les jurys de maitrise d’œuvre est un autre rôle important de la CICF. C’est une vraie défense de nos métiers sur le terrain.
Quels messages souhaitez-vous faire passer à l’occasion de cet anniversaire ?
Le premier message auquel je tiens, c’est que je considère qu’un entrepreneur avec un grand « E », devrait s’imposer l’appartenance à un syndicat professionnel. Nos professions ne sont pas réglementées. N’importe qui peut demain s’installer comme bureau d’études ou cabinet de conseil. La CICF et ses syndicats de métiers veillent particulièrement à la professionnalisation de leurs adhérents, tant sur le plan technique qu’administratif. Le prix d’une journée ne s’improvise pas, il doit correspondre à une réalité économique.
Le deuxième message, c’est que la CICF a 100 ans. Il n’y a pas beaucoup de syndicats professionnels qui peuvent aujourd’hui se targuer de ce privilège. Bien sûr, elle a évolué et continue de le faire, puisqu’à l’occasion de notre centenaire, notre appellation va changer pour mieux représenter les métiers de la branche en rappelant l’objectif permanent de nos professions. Mais certains éléments importants sont restés les mêmes, tels notre code d’éthique, la moralité que doit avoir un professionnel, son indépendance, son obligation de formation. Cette volonté de professionnaliser, d’encadrer et de veiller qualitativement à la valeur de ses adhérents et de la profession est l’un des points-forts de la CICF. Notre organisme de formation, l’IPTIC*, est là pour répondre à leurs besoins.
Vous venez de participer en tant que grand témoin aux 6es Rencontres de la performance énergétique. Quels sont les enjeux pour vos professions ?
C’est un réel enjeu pour nos professions de l’ingénierie de la construction, qui sont positionnées au centre de la rénovation énergétique, mais pas seulement : le véritable chantier est celui de la rénovation de l’existant. C’est bien dans nos métiers que se trouve la clé du raisonnement qui doit conduire la réhabilitation, source de la performance énergétique du bâti. Ce défi est une chance, mais il comporte aussi un risque, car nous devons évoluer en compétences. D’autres composantes de nos métiers viennent gravir autour de cette problématique, entre autres les économistes. Beaucoup de cabinets de la CICF ont la double compétence de bureau d’études techniques et d’économistes. On peut s’interroger sur l’évolution de ces deux professions qui, inévitablement, vont se rapprocher.
Une difficulté supplémentaire, mais spécifique, provient du fait qu’il est extrêmement compliqué de faire évoluer les copropriétés. Il est inévitable que l’encadrement réglementaire de la gouvernance des copropriétés évolue, pour permettre de vrais choix cohérents d’amélioration énergétique de ce patrimoine privé. Autre écueil, ce marché a également trop souvent tendance à être capté par des « ensembliers ». Ils proposent un « paquet cadeau » dans lequel ils intègrent les études de faisabilité, l’accompagnement à la décision, les études après décision, la réalisation et le contrôle des travaux. On peut se demander si quelqu’un qui assure tous les rôles (la conception, la réalisation et l’exploitation) aura l’objectivité nécessaire pour poser les bonnes questions, assurer la bonne veille, apporter le bon conseil en toute impartialité ? Y compris les réponses aux questions pour lesquelles il n’a pas la réponse. Dans ce cas de figure, nos professions ont un rôle à jouer d’assistance à maitrise d’ouvrage. L’AMO ou l’ATMO (assistance technique à maitrise d’ouvrage) sont de nouveaux métiers qui sont loin d’être sans intérêt.
La CICF s’est engagée aux côtés de l’association Promotelec dans le Manifeste pour un habitat sûr, adapté à chacun, économe et respectueux de l’environnement. Comment concrétisez-vous ces engagements au sein de votre Fédération ?
Lorsque Promotelec cherche à améliorer l’habitat par des règles de comportement, de mise en œuvre ou autres, il est bien évident que nos professions ne peuvent pas rester en-dehors. La première façon de l’accompagner est d’intégrer dans nos études et dans les descriptifs de travaux demandés par nos clients les préconisations et évolutions portées par l’association. C’est un élément fondamental, puisque l’entrepreneur s’engage à suivre ces préconisations dans un document contractuel. L’association Promotelec et la CICF (avec l’IPTIC) doivent se rapprocher pour mettre au point des formations qui permettent aux professionnels de connaître ces évolutions, vite et bien.
* IPTIC : Institut de Promotion des Techniques de l’Ingénierie et du Conseil