Alors que le grand éolien vise l’équilibre offre-demande du système électrique français en diminuant le contenu carbone du bouquet énergétique, le petit éolien se positionne plutôt comme une production diffuse d’électricité renouvelable. Il mobilise des niveaux d’investissement moins élevés, nécessite des référentiels normatifs moins complexes et des conditions de connexion au réseau moins règlementées que le grand éolien. Quelles sont les technologies existantes, notamment sur le bâti urbain ? Quels sont leurs avantages et leurs inconvénients et les perspectives du marché ? État de l’art en matière d’éolien, via quelques projets emblématiques.
L’éolien domestique, des solutions technologiques variées
Grâce à des pales situées en haut d’un mât, l’éolienne domestique produit de l’électricité lorsqu’elle est exposée à des vents forts, réguliers et fréquents. Le courant produit, continu, est transformé en courant alternatif par un onduleur pour la revente au réseau ou pour une consommation directe. Ce type d’éolienne est une solution efficace pour produire proprement de l’électricité. Cependant, sa rentabilité pour les particuliers est pour le moins un sujet de débat, comme le souligne le site quelleenergie.fr. Avec un prix d’éolienne domestique encore élevé – entre 10 000 et 90 000 €, installation comprise –, les revenus générés par la revente de l’électricité produite, n’excédant pas 1 000 € par an, ne permettent pas d’amortir l’investissement.
L’éolien en environnement tertiaire, entre projets pilotes et supports de sensibilisation
Ces dernières années, plusieurs projets pilotes ont été réalisés dans le monde, avec pour objectif de tester les technologies, mais également de communiquer sur des dispositifs plus ou moins spectaculaires, au service d’une stratégie de développement durable.
Ces solutions présentent certains avantages, notamment le fait que la structure du bâtiment fait office de mât, ce qui peut permettre d’atteindre des hauteurs importantes et de faciliter la maintenance. La production d’électricité peut être utilisée sur place, évitant ainsi d’avoir recours à du transport, donc réduit les pertes.
Mais ces éoliennes présentent aussi certains inconvénients.
Comme les turbulences générées par les bâtiments, qui réduisent le rendement énergétique du système. Mais également les vibrations qui peuvent endommager le bâti, auxquelles il faut ajouter la problématique de sécurité liée à la rotation des pales.
Parmi ces projets, dans le cadre de la rénovation globale du 1er étage de la tour Eiffel en 2015, la Société d’exploitation de la tour Eiffel (SETE) a installé deux éoliennes à axe vertical sur le monument. Fabriquées par la société américaine Urban Green Energy, les deux éoliennes mesurent 7 m de haut pour une envergure de 3 m.
Elles ont été intégrées à 127 m au-dessus du sol, au niveau du 2e étage, cet espace étant le plus adéquat pour une prise au vent optimale.
Avec une production de 10 000 kWh par an, l’énergie des deux éoliennes permet de couvrir l’équivalent de la consommation énergétique de la boutique du 1er étage. Même si cela reste « symbolique », comme l’indiquait la Société d’exploitation de la tour Eiffel. En effet, la dame de fer consomme environ 6,7 gWh par an. Ce qui signifie que ces deux éoliennes ne couvrent que 0,15 % des besoins en électricité de la tour.
Autre réalisation, quelques années plus tôt et sous d’autres latitudes : en 2008, le World Trade Center de Bahreïn (BWTC) mettait en service ses éoliennes révolutionnaires. Avec trois hélices de 29 mètres de diamètre situées sur cette icône architecturale du Bahreïn, elles étaient les premières au monde à être intégrées à un complexe commercial. Les turbines des éoliennes ont une capacité totale de 675 Kw et couvrent 11 à 15 % de la consommation d’électricité des tours. Les tours sont situées face à la mer, leur disposition et leur forme créent un couloir dans lequel le vent s’engouffre. La mise en place des éoliennes fut le fruit de la collaboration entre Atkins Architects and Engineers et les spécialistes danois en éoliennes de Norwin.
Un stade d’expérimentation
Ces exemples montrent une intégration réussie de l’éolien urbain, qui plus est sur des bâtiments emblématiques. Pour autant, le secteur des éoliennes urbaines intégrées aux bâtiments n’en est encore qu’au stade de l’expérimentation. Il y a plusieurs raisons à cela, détaille-t-on sur ecosources.info. Tout d’abord, la ressource en vent et les turbulences provoquées.
Pour produire de l’électricité et être rentable, une éolienne doit être entraînée par un vent puissant et idéalement constant. Afin de capter ce type de vents, on cherche la hauteur ainsi que l’éloignement avec les obstacles que représentent les bâtiments et les arbres. La hauteur peut en effet être obtenue en installant la machine au sommet du bâtiment.
Par contre, la proximité avec le bâtiment est source de turbulences : le vent se transforme en rafales et devient difficilement exploitable ; les pièces mécaniques, très sollicitées, s’usent rapidement.
Deuxième type de frein : les vibrations et le bruit. Les vibrations émises par l’éolienne peuvent endommager le bâti et engendrer des bruits gênants. Sans parler des autorisations, l’installation d’éolienne en ville apparaît donc difficilement réalisable, c’est pourquoi l’éolien se développe principalement en milieu rural.
En revanche, sur le front de mer, où soufflent des vents puissants, sont menés certains projets pilotes comme l’éolienne urbaine d’Equihen de type Darrieus à axe horizontal, qui a la particularité de ne pas s’orienter par rapport au vent, ce qui réduit la complexité de la machine et son usure.
On note qu’au WTC de Bahreïn, le bâtiment qui comporte 3 éoliennes tri-pâles est également placé face à la mer.
Le petit éolien, entre source d’énergie d’appoint et infrastructure rurale
Comme l’analyse l’ADEME, le respect de la contrainte d’efficacité économique impliquerait aujourd’hui de centrer le marché du petit éolien sur le domaine rural : ainsi, d’une part la ressource en vent est de meilleure qualité, d’autre part le petit éolien permet de faire levier sur l’enjeu du secteur agricole de diminution de la dépendance énergétique ou d’apporter une solution aux zones non connectées. Enfin, même si l’enjeu énergétique de la diffusion du petit éolien est dans un premier temps bien moindre que celle du grand éolien, les modalités de déploiement du petit éolien peuvent avoir un impact important en termes d’image sur l’ensemble de la filière éolienne. Il convient donc d’orienter cette filière pour favoriser des installations de qualité.
L’arbre à vent, un compromis urbain ?
Aeroleaf est le nom donné à la micro-turbine mise au point par NewWind. Elle a été pensée en termes de pluralité pour capitaliser les watts et en faire des kilowatts. L’Aeroleaf est capable de capter de petits souffles d’air pour produire de l’électricité renouvelable. Le choix d’une pale à axe vertical de type Savonius s’est imposé à ses concepteurs dès le début grâce à ses nombreux avantages : elle a un faible encombrement, elle est silencieuse, il est possible de la styliser pour lui donner l’apparence d’une feuille d’arbre, ce qui facilite une intégration biomorphique dans tous les types de paysage ; enfin, ce type de pale est sensible à toutes les directions de vent et parce qu’elle est très légère elle démarre à des vitesses de vent très faibles. Chaque Aeroleaf possède un générateur synchrone à aimants permanents. Les générateurs développés par NewWind sont constitués d’un stator (bobinage de cuivre) et d’un rotor (2 plaques qui portent les aimants). Chaque Aeroleaf produit 100 W à vitesse nominale, correspondant à 16 m/s de vent.
Placé en milieu urbain, un tel dispositif permet de créer de l’énergie de proximité. Encore au stade de démonstrateurs dans de nombreux lieux symboliques (COP21, Rolland Garros), l’arbre à vent séduit déjà certaines collectivités qui n’hésitent pas à le placer dans des lieux de passage.
Aymeric BOURDIN